Pays-Bas : un juge exige une évaluation des micro-perforations des filtres de cigarettes

9 novembre 2022

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 9 novembre 2022

Temps de lecture : 4 minutes

Pays-Bas : un juge exige une évaluation des micro-perforations des filtres de cigarettes

Examinant les travaux de RIVM sur les filtres de cigarettes, aux Pays-Bas, un juge a ordonné une expertise des émissions constatées et menace de retirer les produits concernés du marché, pour manquement à la législation.

En 2018, l’Institut national de la santé publique et de l’environnement (RIVM) néerlandais avait analysé les émissions de cigarettes au niveau du filtre. Il était non seulement apparu que le taux de nicotine absorbé par les fumeurs était bien plus élevé que ce qu’indiquent les fabricants, mais que d’autres émissions, comme les teneurs en goudrons et en monoxyde de carbone, étaient également présentes à des taux bien supérieurs à ceux communiqués officiellement.

Des teneurs bien supérieures à celles affichées sur les paquets

RIVM met en cause les micro-perforations placées sur les filtres par les cigarettiers. Lors des tests classiques, pratiqués par les fabricants avec des « machines à fumer », ces micro-perforations laissent passer l’air et permettent d’obtenir des taux assez bas, qui sont reportés sur les paquets de cigarettes. Mais lorsqu’un fumeur place ses doigts ou ses lèvres sur le filtre, il bouche ces micro-perforations et les concentrations de nicotine, de goudrons et d’autres substances toxiques, comme le monoxyde de carbone (CO), sont alors 2 à 26 fois plus élevées.

RIVM ayant porté l’affaire devant la justice, le juge de Rotterdam en charge de l’affaire a exigé que l’Autorité néerlandaise pour la sécurité de l’alimentation et des produits de consommation (NVWA) examine, dans un délai de six semaines, si les émissions mesurées au bout des filtres de cigarettes sont bien conformes avec les teneurs maximales autorisées par la réglementation européenne[1]. A défaut les cigarettes avec filtre concernées devraient être retirées du marché néerlandais. Ce jugement fait écho à une décision de la Cour européenne de justice, qui était parvenue en février 2022 aux mêmes conclusions.

Les mesures trompeuses des machines à fumer

L’utilisation des « machines à fumer », mises au point par l’industrie du tabac et parfois utilisées par des organismes de contrôle, est critiquée depuis plusieurs décennies, tout comme le recours à ces micro-perforations sur les filtres. La Commission Européenne incite ses membres à vérifier les différentes teneurs présentes dans les cigarettes, sans pour autant avoir agréé de méthode de mesure standardisée. Peter van den Driest, un porte-parole local de Philip Morris, avait déclaré en 2018, que ces machines ne mesuraient pas l’exposition réelle, mais étaient « destinées à rendre comparables les marques lorsque les cigarettes sont fumées de manière identique »[2], ce qui ressemble fortement à une pirouette puisque les teneurs en nicotine, goudrons et CO reportées sur les paquets sont censées provenir de cette mesure et informer les fumeurs.

En France, ces indications des soi-disant teneurs en nicotine, goudrons et CO ont disparu en 2016 au moment de l’instauration du paquet neutre pour tous les produits du tabac, car les études avaient démontré qu’elles induisaient en erreur les consommateurs sur la teneur réelle de ces substances dans les cigarettes. Le débat, porté par les associations de plusieurs pays, est actuellement de demander la suppression de ces « filtres » de cigarette, dont l’appellation elle-même est trompeuse puisqu’ils ne filtrent aucune particule, donnent une fausse impression de sécurité aux fumeurs alors même que les risques semblent être aggravés par la présence du filtre et génèrent une pollution importante et persistante.

Les filtres et les mégots de cigarettes représentent en effet l’un des déchets les plus présents dans le monde ; on estime que 4 000 milliards de ces mégots finissent chaque année au sol et terminent leur parcours dans les rivières et les océans. Composés d’acétate de cellulose, une forme de plastique, les filtres sont, depuis 2019, soumis à la directive européenne sur les produits à usage unique.

Décryptage - Faut-il interdire les filtres dans les cigarettes ? Mots-clés : filtre, goudrons, monoxyde de carbone, plastique, Pays-Bas

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Cigarette testing method may downplay tar, nicotine content, court rules, DutchNews, publié le 4 novembre 2022, consulté le 7 novembre 2022. [2] Anti-tobacco groups threaten court to get ‘too unhealthy’ cigarettes banned, DutchNews, publié le 1er août 2018, consulté le 7 novembre 2022. Comité national contre le tabagisme |

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