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La Belgique entend riposter aux influenceurs qui font la promotion du tabac

Le ministre de la Santé belge a annoncé le renforcement de la surveillance et des sanctions contre les influenceurs qui font la promotion des produits du tabac sur les réseaux sociaux.

Très utilisés par les adolescents et les jeunes adultes, les réseaux sociaux se sont imposés ces dernières années comme des sources majeures de promotion commerciale. Les industriels du tabac ont été parmi les premiers à fortement miser sur ce média pour promouvoir leurs nouveaux produits du tabac et de la nicotine : tabac chauffé, cigarettes électroniques à capsule, sachets de nicotine. Le journal The Guardian avait par exemple révélé en 2021 que British American Tobacco (BAT) avait investi un milliard de livres sterling (1,16 milliards d’euros) dans la promotion de ses nouveaux produits sur les réseaux sociaux[1].

En parallèle de ces produits et malgré les déclarations selon lesquelles ils s’éloignent du tabac fumé, les industriels du tabac continuent également de promouvoir leurs produits du tabac conventionnels par le biais des réseaux sociaux. Des chercheurs de l’université en santé publique de Milwaukee ont ainsi identifié sur Instagram, entre le 31 juillet 2022 et le 31 mars 2023, 183 publications promouvant l’usage ou la vente de produits du tabac et de la nicotine et 34 publications de contre-marketing. Les produits du tabac (chicha, cigarillos) étaient majoritaires (54,6 %) parmi les produits promus, devant les accessoires et les produits de vapotage.

C’est pour lutter contre ces deux phénomènes que Frank Vandenbroucke, le ministre de la Santé belge, a décidé de renforcer la surveillance et les sanctions contre les influenceurs qui font la promotion de produits du tabac et de la nicotine.

Rappel de l’interdiction de la publicité pour les produits du tabac et de la nicotine

Pour Frank Vandenbroucke, la lutte contre la publicité pour les produits du tabac et de la nicotine s’inscrit pleinement dans le cadre de la Stratégie inter-fédérale 2022-2028 pour une génération sans tabac[2]. Il a rappelé que « cette interdiction s’applique à l’ensemble des canaux de diffusion, y compris les médias sociaux. » Il a également annoncé, à compter du 1er janvier 2025, un budget renforcé sur trois ans pour étoffer les effectifs du service d’inspection du Service public fédéral Santé publique (SPF Santé publique) et mieux encadrer le commerce et la publicité en ligne[3]. L’objectif est de distinguer les infractions à la publicité effectuée par les influenceurs des autres infractions à l’ensemble des publicités. Sept influenceurs, dont l’identité n’a pas été révélée, ont déjà été repérés par les autorités pour avoir fait la promotion d’une boutique en ligne de cigarettes électroniques.

Pour la députée Catherine Fonck, du parti Les Engagés, la promotion du tabac sur les réseaux sociaux ne se limite pas à la mise en avant d’une marque, mais inclut tous les comportements de fumeurs, comme avoir une cigarette à la bouche ou à la main[4]. Ce qu’elle considère comme une « publicité déguisée », quand ces messages ou comportements apparaissent sur TikTok ou Instagram, est connu sous le nom de « placements comportementaux ». Comme c’est également le cas avec le cinéma, le pouvoir d’influence des réseaux sociaux sur les adolescents et les jeunes adultes agit alors par identification et par mimétisme.

Une méta-analyse de l’organisme Truth Initiative a, de son côté, montré que l’exposition à des contenus sur les réseaux sociaux renforce l’adhésion aux produits, facilitent l’initiation et renforce l’habitude d’usage des produits[5]. Cette étude a indiqué que les réseaux sociaux constituent également une opportunité pour les fabricants de diffuser des croyances et des informations trompeuses ou non vérifiées.

Appliquer la loi exige des moyens

De nombreux pays ont prononcé une interdiction de publicité, de promotion et de parrainage pour les produits du tabac, comme le prescrit l’article 13 de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT). Une partie d’entre eux ont étendu cette interdiction aux produits de vapotage, mais l’application de ces interdictions reste une gageure permanente, en particulier pour ce qui concerne les communications sur internet. Faire appliquer ces dispositions exige ainsi des moyens, à l’image des efforts engagés par le ministre de la Santé belge.

Mots-clés : Belgique, réseaux sociaux, publicité, Stratégie interfédérale 2022-2028

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Davies R, Chapman M, Tobacco giant bets £1bn on influencers to boost ‘more lung-friendly’ sales, The Guardian, publié le 20 février 2021, consulté le 17 janvier 2024.

[2] Stratégie interfédérale 2022-2028 pour une génération sans tabac, Cellule Générale de Politiques Drogues, version du 23 mars 2022, 10 p.

[3] Swysen D, Frank Vandenbroucke déclare la guerre aux influenceurs qui font de la pub pour les produits du tabac, SudInfo, publié le 11 janvier 2024, consulté le 17 janvier 2024.

[4] Phelippeaux C, Les influenceurs qui font la promotion du tabac sont scrutés avec attention en Belgique, Les Gens d’Internet, publié le 15 janvier 2024, consulté le 17 janvier 2024.

[5] Industry influencer: how tobacco content is infiltrating social media, Truth Initiative, publié le 20 juillet 2023, consulté le 17 janvier 2024.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 23 janvier 2024