Etat d’avancement de la lutte contre le tabagisme dans la région Europe

9 décembre 2024

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 6 décembre 2024

Temps de lecture : 7 minutes

Etat d’avancement de la lutte contre le tabagisme dans la région Europe

Dans un rapport, l’Organisation mondiale de la Santé analyse la progression des pays de la région Europe en matière de lutte contre le tabagisme, au regard des dispositions prévues dans la Convention-cadre de l’OMS.

La région Europe de l’OMS est un ensemble de 53 pays, allant bien au-delà des frontières de l’Union européenne, et comprenant notamment la Turquie, Israël, et certains pays d’Asie centrale comme le Turkménistan[1].

Chiffres de prévalence et mortalité

Entre 2000 et 2022, la prévalence tabagique (quotidienne et occasionnelle) est passée de 34,4% à 25,3%. La région européenne compte désormais 179 millions de fumeurs, contre 229 millions en 2000. Bien que significative, cette diminution de 17% est toutefois bien en deçà de l’objectif de l’OMS d’une réduction du tabagisme de 30% entre 2013 et 2020. La région observe de fortes disparités de genre, avec une prévalence masculine établie à 32% en 2022 (114 millions de fumeurs), et une prévalence féminine à 18,5% (65 millions). Les projections de l’OMS estiment que la prévalence tabagique en 2030 devrait être respectivement de 28,3% pour les hommes et de 17,9% pour les femmes. Seuls six pays enregistraient en 2022 une prévalence tabagique inférieure à 15% de leur population, dont l’Islande, la Norvège et le Royaume-Uni. A l’inverse, la France, la Hongrie, Chypre ou encore la Bulgarie figurent parmi les 14 pays de la région avec une prévalence tabagique supérieure à 30%. Dans l’ensemble, le tabagisme entraîne la mort prématurée d’une personne sur cinq dans la région.

Fiscalité des produits du tabac

Dans 28 pays de la région Europe, les taxes représentaient en 2022 au moins 75% du prix de vente au détail, contre 16 pays en 2008. De plus en plus de pays se tournent vers des systèmes de taxation efficaces, permettant une augmentation des prix de vente tout en réduisant l’écart entre les marques pour éviter les transferts de consommation vers les produits les moins chers. Depuis 2012, le tabac est devenu moins abordable dans seulement 19 pays de la région. Le prix du tabac n’a pas enregistré d’évolution depuis 2012 dans 24 pays, et a même relativement baissé dans neuf autres. Compte tenu de l’efficacité des hausses de taxes pour réduire la consommation de tabac, l’OMS estime ce constat « préoccupant », d’autant que le prix du tabac est moins abordable depuis 2020 dans seulement six pays de la région.

Conformément à l’article 6 de la Convention-cadre, l’OMS encourage les pays à mettre en place des hausses de taxes régulières, significatives, et supérieures à l’inflation. Par ailleurs, l’OMS recommande aux pays de simplifier la structure fiscale du tabac, et d’allouer une partie des recettes générées à la lutte contre le tabagisme.

Tabagisme passif et espaces sans tabac 

Selon l’OMS, près des deux-tiers des pays de la région Europe ont une réglementation insuffisante concernant la protection à l’égard du tabagisme passif, avec des interdictions partielles de fumer dans les espaces publics (établissements de santé et scolaires, universités, bureaux, restaurants et cafés, transports publics, établissements administratifs et d’Etat).

Les pays européens étendent de plus en plus les interdictions de fumer à d'autres lieux publics, qu’il s’agisse des lieux culturels (34 pays), les commerces (31 pays) ou les zones d'attente intérieures des transports (30 pays). Toutefois, seuls 19 pays ont adopté des interdictions totales de fumer dans les aéroports, sans fumoir. La moitié des pays de la région interdisent de fumer dans les zones extérieures réservées aux enfants, et 14 d’entre eux ont rendu illégale la consommation de tabac dans les voitures transportant des mineurs. L’OMS rappelle par ailleurs que les lignes directrices de l'article 8 de la convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) indiquent que « chaque Partie devrait s'efforcer d'assurer une protection universelle dans un délai de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la CCLAT ». À ce jour, 32 pays n’ont pas encore mis en œuvre cette mesure au plus haut niveau, en dépit du délai expiré.

Dispositifs d’aide à l’arrêt

Entre 2007 et 2022, le nombre de pays disposant d’une ligne téléphonique nationale d’aide à l’arrêt et prenant en charge le coût des substituts nicotiniques est passé de trois à onze. Toutefois, les traitements de substitution nicotinique ne sont pas disponibles dans sept pays de la région, et figurent dans la liste des médicaments essentiels dans seulement 13 pays. Ces produits sont le plus souvent disponibles en pharmacie (39 pays), bien que la vente des substituts soit également autorisée dans les commerces généralistes dans certains pays (7). Face à ce constat, l’OMS recommande notamment aux pays de sanctuariser un financement pour l’aide à l’arrêt, de développer la formation au sevrage tabagique auprès de l’ensemble des professionnels de santé, et souligne la nécessité de systématiquement demander le statut tabagique du patient lors de toute consultation médicale.

Information au consommateur, avertissements sanitaires et paquet neutre

Entre 2007 et 2022, le nombre de pays imposant l’apposition d’avertissement sanitaires de grandes tailles sur les paquets de cigarette est passé de trois à 41. Dans 38 pays de la région, ces avertissements sont également obligatoires sur les produits du tabac sans fumée, à l’instar du tabac à chauffer. Toutefois, la taille des avertissements varie beaucoup d’un pays à un autre, pouvant aller de 30% en Azerbaïdjan, à 93% pour la Turquie. Par ailleurs, treize pays ont adopté le paquet neutre, dont le Royaume-Uni, la France, la Belgique, la Géorgie ou les Pays-Bas. L’article 11 de la CCLAT prévoit que les Parties adoptent et mettent en œuvre « des mesures efficaces en matière de conditionnement et d'étiquetage dans un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la CCLAT ». Neuf pays ont toutefois dépassé ce délai sans avoir mis en œuvre cette disposition.

Enfin, entre juillet 2020 et juin 2022, moins de la moitié des pays de la région ont mené une campagne nationale de prévention sur le tabagisme dans des médias de masse (49%).

Interdiction de publicité

Treize pays de la région Europe ont interdit toute forme de publicité directe ou indirecte pour le tabac en 2022. Toutefois, les publicités dans les médias, sur les panneaux d’affichage, sur Internet, mais également les placements de produit ou la distribution gratuite de produits du tabac sont interdits dans la plupart des pays de la région. Les différentes restrictions et interdictions concernant la publicité a toutefois poussé l’industrie du tabac à se tourner vers la publicité sur le lieu de vente, qui n’est interdite que dans 19 pays de la région. Les observatoires menés par le CNCT montrent en outre qu’en France, l’interdiction de publicité pour le tabac sur le lieu de vente n’est pas respectée en ce qui concerne les nouveaux produits, notamment la forte présence de publicité pour le tabac à chauffer chez les buralistes. De la même manière, les placements comportementaux sont des stratégies régulièrement mobilisées par les fabricants pour contourner l’interdiction de placements de produits dans les œuvres culturelles.  Enfin, 38% des pays autorisent encore la vente de tabac dans des distributeurs automatiques, tandis que 58% autorisent la vente en ligne.

[1] Organisation mondiale de la Santé, Les nouveaux aide-mémoire de l’OMS/Europe font état de progrès inégaux en matière de lutte antitabac dans la Région européenne, 02/12/2024, (consulté le 03/12/2024)

©Génération Sans Tabac

FT

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