Le plaidoyer et la communication en matière de santé peuvent être des outils puissants pour réduire le tabagisme en Afrique

21 août 2023

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 21 août 2023

Temps de lecture : 6 minutes

Le plaidoyer et la communication en matière de santé peuvent être des outils puissants pour réduire le tabagisme en Afrique

Les pays africains sont confrontés à une augmentation du tabagisme. L'Afrique subsaharienne a connu la plus forte hausse relative au nombre de fumeurs par rapport aux autres régions et devrait devenir l'épicentre de l'épidémie de tabagisme. Le plaidoyer et la communication sur les effets sanitaires et économiques du tabac sont essentiels pour mobiliser et responsabiliser le public, en particulier les jeunes, et pour informer et éduquer les décideurs politiques et les autres parties prenantes sur les solutions à apporter à l'épidémie mondiale de tabagisme[1].

De nombreux pays africains peinent à mettre en œuvre des politiques antitabac efficaces. Les avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes, les interdictions de fumer dans les lieux publics, et les interdictions de publicité pour les produits du tabac dans les lieux de vente n’ont été adoptés que par environ un tiers des pays de l’Afrique subsaharienne. Une situation souvent exacerbée par une mauvaise application des textes et l’absence de contrôles et par la forte ingérence de l’industrie du tabac[2].

Le fardeau sanitaire et économique du tabagisme en Afrique

On prévoit que d'ici 2025, l'Afrique comptera environ 84 millions de fumeurs, soit une augmentation de 61,5 % du nombre de fumeurs par rapport à l’année 2000. En outre, la population jeune de la région africaine devrait doubler d'ici 2050, ce qui fait de l'Afrique une destination attrayante pour l'industrie du tabac. Or, sur un continent où les ressources allouées aux soins de santé sont limitées et où les infrastructures sanitaires sont limitées, l'augmentation rapide de la consommation de tabac dans la région risque d'avoir des conséquences dévastatrices sur le système de santé et la santé des populations.

Le tabagisme représente également une charge économique de plus en plus lourde pour les pays africains. Sans prendre en compte toutes les externalités négatives du tabac, ce fardeau comprend notamment le coût du traitement des maladies liées au tabac ainsi que les pertes de productivité dues aux maladies et aux décès prématurés. Un récent rapport de l’OMS a montré que l’augmentation de l’incidence des maladies non-transmissibles menacent les progrès en santé réalisés en Afrique ces dernières années. La consommation croissante de tabac, l’alcool et la consommation d’aliments transformés sont particulièrement à l’origine de la progression des maladies non transmissibles[3].

La communication et la sensibilisation : une composante de la réduction du tabagisme

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît, dans les stratégies à mettre en œuvre, l’importance de la sensibilisation et de la communication pour promouvoir la lutte antitabac. Les campagnes d’informations peuvent inciter les individus à modifier leur comportement et les communautés à adopter des politiques visant à réduire le tabagisme, à prévenir l'initiation au tabac et à limiter l'exposition au tabagisme passif. La Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) cite ainsi les campagnes de sensibilisation du public comme une dimension incontournable des politiques publiques de lutte antitabac. L’Article 12 de la CCLAT énonce que « chaque Partie s’efforce de promouvoir et de renforcer la sensibilisation du public aux questions ayant trait à la lutte antitabac, en utilisant, selon qu’il conviendra, tous les outils de communication disponibles ». En juillet 2022, Santé Publique France et le secrétariat de la CCLAT ont signé un mémorandum d’accord pour la création d’un pôle de connaissance sur le tabac. Cette plateforme, bilingue en anglais et français, aura pour objectif de favoriser le transfert de connaissances entre les Parties au traité notamment les pays francophones d’Afrique et vers les acteurs concernés afin de renforcer la mise en œuvre d’actions efficaces en matière de lutte contre le tabac dans ces pays, conformément à l’article 12[4].

Les campagnes de prévention permettent à la fois d'obtenir le soutien du public pour des politiques et des programmes solides de lutte contre le tabagisme. Elles informent le public et les décideurs des enjeux de la réduction des maladies et décès liés au tabagisme. Elles permettent aussi de réduire les disparités de santé liées au tabagisme car elles peuvent toucher différents publics cibles.

Les communications en matière de santé et plus particulièrement celle sur les nombreux risques de la consommation du tabac viennent contrer les actions promotionnelles en faveur du tabac déployées par l’industrie du tabac en particulier dans les pays africains. Elles tentent également de faire face aux initiatives de désinformation sur le sujet. La culture du doute et les infox entretenues par l’industrie du tabac restent un obstacle majeur à la mise en place de mesures antitabac efficaces dans de nombreux pays.

Les communications en matière de santé sont par ailleurs relativement aisées à mettre en place ; elles touchent rapidement une grande partie de la population et peuvent être diffusées via différents canaux notamment dans les médias traditionnels (télévision, radio, sur des panneaux d'affichage, dans les transports en commun, sur des plateformes en ligne ou dans la presse écrite) ou sur des canaux digitaux comme les réseaux sociaux très prisés par les jeunes générations.

Diverses campagnes de communication ont été évaluées et ont démontré leur efficacité à la fois pour sauver des vies et économiser des milliards de dollars en soins de santé. En 2012, la campagne nationale d'éducation sur le tabac USA Tips From Former Smokers® a coûté 48 millions de dollars et a incité 100 000 fumeurs à arrêter définitivement de fumer. Ceci aurait permis d'éviter plus de 17 000 décès prématurés. En France, une étude, qui a évalué l’efficacité de la campagne « Mois sans tabac », indique ainsi que le dispositif a permis de déclencher 1,8 million de tentatives d’arrêt entre 2016 et 2019[5].

Mots-clés : Afrique, lutte antitabac, prévention, sensibilisation, campagnes médiatiques, Article 12, CCLAT, arrêt du tabac

©Génération Sans Tabac

AE

[1] Chimezie Anyakora, Ofure Odibeli, Advocacy and health communication: A key strategy for tobacco control in Africa, Business Day, publié le 15 août 2023, consulté le 17 août 2023

[2] Génération sans tabac, Afrique : l’ingérence de l’industrie du tabac rend difficile la mise en place de mesures antitabac, publié le 5 août 2023, consulté le 17 août 2023

[3] Génération sans tabac, Les maladies non-transmissibles menacent les progrès en santé réalisés en Afrique ces dernières années, publié le 23 mars 2023, consulté le 17 août 2023

[4] Génération sans tabac, Signature d’un accord entre Santé Publique France et le secrétariat de la Convention-Cadre de l’OMS, publié le 7 juillet 2022, consulté le 17 août 2023

[5] Génération sans tabac, Mois sans tabac : utilisation du marketing social dans la lutte antitabac, publié le 23 décembre 2021, consulté le 17 août 2023

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