En Corée du Sud, la baisse du tabagisme traditionnel ralentie par le tabac chauffé et les nouveaux produits de la nicotine
22 octobre 2025
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 16 octobre 2025
Temps de lecture : 5 minutes
La proportion d’hommes dans la vingtaine et la trentaine qui fument des cigarettes a fortement diminué entre 2015 et 2024, selon un rapport de la Korea Disease Control and Prevention Agency (KDCA). En 2024, 28,5 % des trentenaires et 22,6 % des hommes âgés de 19 à 29 ans étaient fumeurs, soit une baisse de 19,5 et 16,1 points de pourcentage respectivement par rapport à 2015, les plus fortes diminutions observées parmi toutes les classes d’âge[1]. Cependant, d’autres produits de tabac, de vapotage et de la nicotine enrayent cette diminution et représentent un marché lucratif pour l’industrie du tabac et de la nicotine.
La consommation de cigarettes recule mais la consommation d’« alternatives » comme le tabac chauffé est en hausse
Même si elle est en baisse, la proportion de fumeurs de cigarettes combustibles chez les hommes dans la quarantaine demeurait toutefois très élevée (36,9 %), contre 45,8 % en 2015. Chez les quinquagénaires, 34,1 % fumaient encore, soit une légère baisse de 2,4 points. L’évolution est en revanche défavorable chez les hommes sexagénaires avec une hausse de la prévalence qui passe de 26,1 % à 26,4 %. En revanche, elle a diminué de 17 % à 13,5 % chez les hommes de 70 ans et plus.
Si le tabagisme traditionnel recule, la consommation totale de produits de la nicotine, incluant les produits de vapotage mais aussi le tabac chauffé, diminue plus lentement, voire augmente du fait de l’évolution à la hausse de la consommation de ces produits. En 2024, 40 % des trentenaires déclaraient utiliser au moins un produit de la nicotine, soit une baisse de seulement 4,9 points depuis 2019, bien inférieure au recul de 10,7 points observé pour les seules cigarettes combustibles.
Une tendance similaire apparaît chez les plus jeunes : entre 2019 et 2024, l’usage de la cigarette a chuté de 15,2 points, mais l’usage global de produits à base de nicotine n’a reculé que de 10,5 points chez les hommes de 19 à 29 ans. Chez les quadragénaires, qui est la tranche d’âge la plus consommatrice, la part d’usagers de produits de la nicotine a même augmenté de 1,6 %, malgré une légère baisse du tabagisme classique.
En 2024, Philip Morris International (PMI) indiquait que sa part de marché pour les produits à tabac chauffé en Corée du Sud atteignait 8,1 %, contre 7,1 % en 2023. Le ministère coréen des Finances rapportait au premier semestre 2023 que la part des ventes du tabac à chauffer dans le total des ventes de cigarettes est passée à 16,5 %, contre 14,8 % un an auparavant.
Le tabac chauffé perçu à tort comme une alternative saine et amalgamé aux produits du vapotage
La Corée du Sud ne comptabilise l’usage de l’ensemble des produits de la nicotine que depuis 2019, une période marquée par la montée du vapotage et des tabacs chauffés, amalgamés dans le langage courant et administratif sud-coréen comme deux sous-catégories du grand ensemble « e-cigarettes », même si elles sont traitées différemment sur le plan fiscal et sanitaire.
Une croyance largement répandue, notamment chez les jeunes, est que les produits de la nicotine « alternatifs » seraient tous moins nocifs que les cigarettes combustibles, quand en réalité ce n’est le cas que pour les cigarettes électroniques, sous réserve d’un arrêt total du tabac. Une enquête menée en septembre auprès d’élèves du primaire, du collège et du lycée indiquait que 32,2 % d’entre eux considéraient les cigarettes électroniques comme moins dangereuses, voire inoffensives.
De plus, depuis quelques années, des produits dits « nicotine-like » comme la 6-méthyl-nicotine et le nicotinamide, du fait de l’ajout d’analogues de la nicotine, sont apparus dans plusieurs pays dont la Corée du Sud. Les analogues ne sont pas considérés comme des produits de la nicotine et échappent au contrôle, ce que certaines entreprises présentent comme un avantage commercial. Les experts de santé estiment que ces produits soulèvent des enjeux de santé publique encore mal évalués, notamment du fait de leur potentiel addictif et de l’absence de données sur leurs effets à moyen et long terme.
Si les mentalités sont encore appelées à évoluer sur les nouveaux produits de la nicotine, la société civile coréenne commence néanmoins à alerter sur les agissements de l’industrie du tabac et son coût pour la santé publique. De mars à juin 2025, le Service national d’assurance maladie sud-coréen (NHIS) a déposé auprès de la cour d’appel une pétition signée par plus de 1,5 million de personnes, dans le cadre de son procès contre trois fabricants de tabac, KT&G, Philip Morris Korea et BAT Korea, pointant notamment le manque de reconnaissance par les entreprises de l’impact du tabac sur les cancers du poumon.
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[1]Yoon Min-sik, Cigarette use drops drastically since 2015: study, The Korea Herald, publié le 11 octobre 2025, consulté le 13 octobre 2025