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Un rapport interroge le système actuel de la responsabilité élargie des producteurs pour le tabac

Un rapport de la Fondation Surfrider fait le point sur l’application de la responsabilité élargie des producteurs (REP) aux filtres en plastique des produits du tabac au sein de l’Union Européenne ; il souligne les retards et limites du dispositif, pour lequel des recommandations sont formulées.

Adoptée en 2019, la directive européenne sur les plastiques à usage unique (Directive SUP) s’applique aussi aux filtres en plastique des produits du tabac. Les mégots de cigarettes étant le type de déchet au sol le plus répandu, leur collecte et leur traitement représentent en effet des coûts importants, jusqu’alors exclusivement supportés par les collectivités locales. Cette directive établit, avec la mise en place de la responsabilité élargie des producteurs (REP), les responsabilités environnementales des fabricants.

Un rapport de la Fondation Surfrider Europe, publié au nom de l’alliance Rethink Plastic, fait aujourd’hui le point sur l’état d’avancement de cette directive SUP et du système de la REP appliqué aux filtres de cigarettes en plastique[1]. Ce rapport rappelle brièvement, au-delà du champ de la directive, l’ampleur des dommages environnementaux liés au tabac. Les auteurs analysent de manière critique la mise en œuvre des différentes obligations prévues dans la directive : la transposition du texte dans les différents Etats membres, la prise en charge des coûts de la collecte des mégots et de leur traitement, la gouvernance des éco-systèmes, les obligations d’information, etc.

Des retards dans la transposition de la directive

Si la directive européenne sur les plastiques à usage unique a été transposée dans la législation de la plupart des pays européens, quelques pays ne l’ont pas encore intégrée. Parmi les pays en retard sur ce plan, on trouve l’Allemagne, la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie, l’Estonie et Chypre.

Dans les pays où elle a été transposée, cette directive a le plus souvent été reproduite sans adaptation particulière. Dans ces cas, les coûts imputés aux fabricants se sont souvent limités à ceux évoqués dans la directive, sans prendre en compte l’ensemble des atteintes environnementales imputables à l’industrie du tabac[2]. Certains pays ont mis en avant le retard de la publication par la Commission européenne des lignes directrices sur les critères des coûts de nettoyage pour différer la transposition de cette directive.

Seuls quelques pays ont introduit des précisions et des dispositions supplémentaires, afin d’augmenter le potentiel de la directive. Certains ont, par exemple, fixé des objectifs de réduction. D’autres ont appelé à interdire les filtres des cigarettes ou les cigarettes électroniques jetables (« puffs »).

La question de la place de l’industrie du tabac dans le dispositif.

Les auteurs du rapport saluent l’application du principe pollueur-payeur mis en œuvre dans le cadre de la Directive européenne sur les plastiques à usage unique. Cependant, concernant les produits du tabac, ils rappellent que l’industrie du tabac n’est pas une industrie comme les autres. L’article 5.3 de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, ratifiée par l’Union européenne et tous ses états-membres, exige que les politiques publiques soient préservées des interférences de cette industrie, sur la base du caractère inconciliable des objectifs respectivement poursuivis. Or, certains éco-organismes chargés de la mise en œuvre de la directive sont composés de représentants des fabricants de tabac. Ces derniers se sont vu confier des campagnes de sensibilisation sur les déchets du tabac ou y ont été associés.

Selon la Fondation Surfrider Europe, tenir l’industrie à l’écart des décisions concernant la REP permettrait, d’une part, d’en garantir une meilleure efficacité. Elle écarterait, d’autre part, la possibilité d’être utilisée par les industriels pour se présenter comme des acteurs responsables et d’améliorer leur image.

Surfrider Europe recommande de se saisir de certaines opportunités réglementaires au niveau international, comme la négociation du traité sur les plastiques, en 2024 et 2025, ou la révision de la directive européenne sur les plastiques à usage unique, en 2027. Une coalition de 130 organisations environnementales et de santé avait, en 2023, ainsi demandé à ce que la question de l’interdiction des filtres des cigarettes soit incluse dans le traité sur les plastiques.

Mots-clés : Surfrider Foundation Europe, responsabilité élargie des producteurs, filtre, plastique

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Haut G, Single Use Plastics Directive Implementation Assessment Report, Surfrider Foundation, rapport, février 2024, 44 p.

[2] Pollutions : les cigarettiers ne paient pas assez, Reporterre, publié le 5 février 2024, consulté le 6 février 2024.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 13 février 2024