Les filtres de cigarettes : un « écocide en puissance »

2 juin 2021

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 2 juin 2021

Temps de lecture : 4 minutes

Les filtres de cigarettes : un « écocide en puissance »

Dans une tribune parue le 31 mai 2021 dans le magazine Forbes, l’eurodéputée Michèle Rivasi examine la question des filtres de cigarettes, générant des coûts colossaux pour la collectivité, et responsables d’un écocide, une pollution environnementale durable et à grande échelle[1].

L’élue écologiste du Parlement européen souligne la responsabilité première des fabricants de tabac dans la question du filtre, dont les bénéfices sanitaires sont aujourd’hui très largement remis en cause par la communauté scientifique.

Un facteur majeur de pollution

Comme le rappelle Michèle Rivasi, les mégots sont à l’origine d’une pollution environnementale majeure. Sur les 6000 milliards de cigarettes produites dans le monde, 90% d’entre elles sont constituées d’un filtre, dont 66% finiront jetés dans la nature après consommation. Ces filtres, composés d’acétate de cellulose, mettent des années à se dégrader dans la nature. Par ailleurs, le mégot, renfermant après consommation près de 6000 composés chimiques, dont certains cancérigènes notoires et certains métaux lourds, est le premier facteur de pollution des cours d’eau et des océans, et participe à l’acidification des sols.

Le principe du pollueur-payeur encore trop insuffisamment appliqué

L’eurodéputée européenne regrette par ailleurs que l’entrée en vigueur du principe du pollueur-payeur, supposée être mis en place depuis le 1er janvier 2021, ne soit toujours pas effective. Ce principe, qui vise à faire participer financièrement l’industrie à réparer les dégâts que leur activité génère en matière de pollution, demeure insuffisante. Selon Michèle Rivasi, alors qu’ils sont les premiers responsables de la pollution de l’environnement par les mégots, les cigarettiers ne participent qu’à l’effort de dépollution, sans participer à celui de la prévention (collecte, traitement).

Ainsi, la responsabilité élargie des fabricants de tabac ne couvre à ce jour que les pollutions de l’espace public, faisant ainsi l’impasse de la gestion des mégots collectés dans les ordures ménagères. Cet angle mort est pour l’élue écologiste d’autant plus problématique que la petite taille et la forte toxicité des mégots en font des déchets particulièrement difficiles à recycler et à traiter.

L’absence de justification sanitaire pour le filtre

Comme le mentionne Michèle Rivasi, l’existence du filtre de la cigarette tient davantage de l’argument marketing que de l’argument sanitaire. En effet, le filtre est une invention des fabricants de tabac destiné à rassurer. Il vise aussi à adoucir le goût de la cigarette, et à faciliter l’initiation de deux populations cibles de l’industrie : les jeunes et les femmes. Dans le viseur de l’industrie depuis près d’un siècle, la situation sanitaire de ces dernières est aujourd’hui inquiétante. En France, le tabac est responsable de la mort prématurée de 20 000 femmes par an. Michèle Rivasi pointe une tendance « alarmante » : entre 2002 et 2015, chez les femmes, le nombre de nouveaux cas annuels de cancer du poumon a augmenté de 72% et d’infarctus du myocarde de 50%.

Le mégot, un « écocide en puissance »

La députée fustige une disposition du code pénal français, qui sanctionne d’une amende de 68 euros le jet de mégot sur la voie publique. Selon elle, la charge financière de la pollution est uniquement portée par le consommateur, alors que les fabricants en sont les premiers responsables.

Enfin, pour Michèle Rivasi, la situation générée par les mégots entre en résonnance avec la notion d’écocide, telle qu’elle est définie par la directive 2008/99/CE du Parlement européen : « le rejet, l’émission ou l’introduction d’une quantité de substances dans l’atmosphère, le sol ou les eaux, causant ou susceptibles de causer la mort ou de graves lésions à des personnes, ou une dégradation substantielle de la qualité de l’air, de la qualité du sol, ou de la qualité de l’eau, ou bien de la faune ou de la flore ». Rejetés en masse dans l’environnement, les mégots aboutissent à un écocide, à travers la contamination durable de l’environnement et de ses écosystèmes, constituant « autant de violations des droits fondamentaux des générations futures ».

F.T

Mots clés : Ecocide, Filtre, Mégots, Rivasi, Pollution ©Génération Sans Tabac

[1] Forbes, Filtres à cigarettes : une pollution majeure pour des bienfaits sanitaires mineurs, 31/05/2021, (consulté le 01/06/2021)

Comité National Contre le Tabagisme |

Ces actualités peuvent aussi vous intéresser