France : les médecins généralistes encore trop peu formés au sevrage tabagique

6 juin 2024

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 6 juin 2024

Temps de lecture : 5 minutes

France : les médecins généralistes encore trop peu formés au sevrage tabagique

L’ACT-Alliance contre le tabac et l’institut d’enquêtes BVA ont mené une enquête[1] auprès de 500 médecins généralistes en France afin d’évaluer la prise en charge du sevrage tabagique de leurs patients et leur perception des produits du tabac et de la nicotine. Plus de la moitié d’entre eux (53%) souhaite recevoir une formation spécifique sur le sevrage tabagique.

L’enquête a été menée en ligne, auprès de 500 médecins généralistes entre février et mars 2024.

Les médecins généralistes, en première ligne pour accompagner le fumeur

Si près de la totalité (99%) des médecins généralistes ont déclaré aborder le statut tabagique avec leur patient, ils ne sont que 38% à le faire systématiquement. Lorsqu’ils apprennent que leur patient est fumeur, ils ne sont que 58% à suggérer systématiquement d’arrêter (35% souvent et 6% de temps en temps). Parmi les freins avancés par les praticiens à la prise en charge de l’arrêt du tabac, le manque de temps (71 %) est la première raison évoquée. A cela s’ajoutent le fait que le motif d’origine de la consultation n’est pas la question du tabac (56 %) ou encore la crainte de paraître intrusifs (26 %). L’enquête révèle également que l’exposition au tabagisme passif n’est évoquée que par 60% des professionnels.

Les médecins généralistes sont essentiels pour accompagner le fumeur dans sa démarche d’arrêt. L’accompagnement par un professionnel de santé augmente de 70% les chances de réussir son sevrage et de maintenir l’abstinence. Pourtant, selon l’enquête, près d’un quart d'entre eux (23 %) n'a pas le sentiment d'être efficace dans la prise en charge du sevrage. Ainsi, ils sont 53% à souhaiter recevoir une formation spécifique sur la question du sevrage tabagique.

L’enjeu du sevrage tabagique reste essentiel alors que la consommation de tabac stagne à un niveau très élevé en population générale. Ainsi 31,8% des adultes français de 18-75 ans se déclarant fumeurs, 24,5% fument quotidiennement. Si la question du tabac fait partie du cursus en formation initiale des médecins généralistes, cette formation parait insuffisante au regard de l’importance du problème sanitaire que le tabagisme représente. Ce besoin de formation apparaît encore plus conséquent pour les autres professionnels de santé habilités à prendre en charge le sevrage de fumeurs mais n’ayant pas eu de formation. Pour répondre à cet enjeu, une formation gratuite pour les professionnels de santé sur le sevrage tabagique a été ouverte dans le Grand Est en avril dernier[2].

Une amélioration nécessaire dans la prescription des substituts nicotiniques

L’enquête met aussi en lumière que la prescription des substituts nicotiniques, pourtant efficaces dans l’arrêt du tabac, reste sous-exploitée par les médecins généralistes. Le Professeur Daniel Thomas, vice-président de l’ACT et du Comité national contre le tabagisme (CNCT) s’étonne de la persistance des idées fausses sur les traitements nicotiniques de substitution (TNS) ou la réticence à prescrire des substituts fortement dosés pour les gros fumeurs.

Face à ces constats, l’ACT propose de mettre en place des formations obligatoires dédiées à l’addiction à la nicotine et à sa prise en charge, dans le tronc commun des parcours Santé à l’université, mais aussi en formation continue. Est également recommandée la création d’une cotation dédiée à la consultation d’accompagnement au sevrage tabagique pour l’ensemble des professionnels de santé.

L’ACT et ses membres souhaitent aussi une mise à jour du cadre réglementaire des autorisations de mise sur le marché (AMM) des TNS qu’ils n’estiment plus pleinement conformes aux recommandations. La possibilité de prescrire plusieurs patchs pour assurer la dose suffisante de nicotine aux patients les plus dépendants et celle d’associer plusieurs TNS est particulièrement soulignée.

Des médecins mal informés sur la question des nouveaux produits du tabac et de la nicotine

Les médecins généralistes se déclarent très majoritairement (90%) mal informés sur les nouveaux produits du tabac et de la nicotine. S’ils considèrent pour la plupart les autres produits du tabac (tabac chauffé et snus) comme étant aussi nocifs que les cigarettes classiques, près de 40% d’entre eux considèrent les sachets et perles de nicotine comme étant des outils efficaces de sevrage alors qu’à ce jour, aucune étude indépendante confirme l’efficacité de ces produits dans l’arrêt du tabac. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) ne considère pas ces produits comme des outils d’aide à l’arrêt et appelle les pays à les réglementer plus strictement. Les nouveaux produits de la nicotine, notamment les produits oraux comme les sachets et perles, sont promus comme outils dans l’arrêt du tabac par les fabricants du tabac. Il s’agit donc d’un vecteur de marketing destiné en particulier à dissuader aux fumeurs pour les dissuader d’un arrêt total de tout produit à la nicotine.

Plus de 90 % des médecins généralistes se disent ainsi mal informés pour accompagner leurs patients vers le sevrage de l’addiction de ces nouveaux produits souvent très fortement dosés en nicotine.

©Génération Sans Tabac

AE


[1] Communiqué, Sevrage tabagique : près de la moitié des médecins généralistes attendent une formation spécifique, Alliance contre le tabac, publié le 31 mai 2024

[2] Génération sans tabac, Grand Est : lancement d’une formation gratuite sur le sevrage tabagique pour les professionnels de santé, publié le 19 avril 2024, consulté le 5 juin 2024

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