En Afrique du Sud, le lobby du tabac gagne du terrain

29 septembre 2021

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 29 septembre 2021

Temps de lecture : 4 minutes

En Afrique du Sud, le lobby du tabac gagne du terrain

La situation en Afrique du Sud s’est détériorée en matière de lutte contre l’influence du lobby des cigarettiers, selon le dernier rapport mondial d’interférence de l’industrie du tabac. La dernière édition pointe notamment des manquements de la part des membres du gouvernement, une absence de transparence dans les interactions entre l’industrie et les pouvoirs publics, et la poursuite d’activités de responsabilité sociale[1].

L’indice d’interférence de l’industrie du tabac vise à évaluer le degré d’interférence de l’industrie du tabac dans plusieurs dizaines de pays dans le monde, tous Parties du traité international de l’OMS, la Convention Cadre pour la Lutte Antitabac (CCLAT). Cet indice s’attache également à analyser la capacité des pouvoirs publics à mettre en place de bonnes pratiques de gouvernance destinées à se protéger de l’influence de l’industrie du tabac.

Une proximité problématique entre décideurs et le lobby de l'industrie du tabac

Le rapport dénonce l’existence de relations non nécessaires entre les membres du gouvernement et l’industrie du tabac. Ces relations sont, pour les auteurs de l’indice, d’autant plus problématiques que l’existence de ces réunions avec les cigarettiers n’est pas rendue publique, et que les comptes rendus ne sont pas accessibles au public. Pour le Dr Mary Assunta, responsable de la recherche mondiale et du plaidoyer du Centre mondial pour la bonne gouvernance dans la lutte antitabac (GGTC), l’enregistrement et la publicisation de toutes les interactions entre les décideurs politiques et l’industrie doit être systématisée pour mettre un terme à l’ingérence des cigarettiers.

Des activités de responsabilité sociale pour gagner en influence en Afrique du Sud

Une partie de l’influence de l’industrie du tabac en Afrique du Sud s’explique par les activités de responsabilité sociale des entreprises. Si la loi actuelle interdit les activités RSE pour les fabricants, elle autorise néanmoins l’industrie du tabac à réaliser des dons caritatifs, sous réserve que ces derniers ne fassent pas l’objet d’une publicité. Pour les auteurs du rapport, cette exception constitue une lacune, et doit impérativement être supprimée. De la même manière, au cours de l’année écoulée, plusieurs ministères sud-africains se sont associés à des ONG financées par l’industrie du tabac. Pour les auteurs du rapport, ces situations sont le fruit de stratégies mises en place par les fabricants dans l’objectif d’infiltrer les cercles de décision, les institutions, et neutraliser les politiques de santé publique.

La nécessité de changer de paradigme

Selon le Pr Olalekan Ayo-Yusuf, directeur du Centre de surveillance et de recherche sur les politiques de l'industrie du tabac, les cigarettiers bénéficient encore d’avantages injustifiés, en raison du fait que la question du tabac demeure appréhendée avant tout comme une question économique et non de santé. Pourtant, le rôle de l’industrie dans l’économie nationale est largement surévalué par les fabricants. En réalité, par le coût environnemental que sa production représente, et par le coût sanitaire que sa consommation entraîne, le tabac représente un véritable fardeau pour les finances publiques.

Lutter contre les pratiques illégales du lobby des fabricants en Afrique du Sud

Enfin, le rapport pointe également la nécessité d’apporter une réponse aux pratiques illégales de l’industrie du tabac. En particulier, les auteurs appellent à la mise en place d’une enquête sur les accusations à l’endroit de British American Tobacco, suspecté de surveillance et d’espionnage illégal, de corruption de fonctionnaires et de décideurs. Par ailleurs, compte tenu du rôle des fabricants dans l’organisation et la facilitation du commerce illicite, et de l’ampleur du phénomène en Afrique du Sud, le Pr Olalekan Ayo-Yusuf souligne la nécessité pour l’Afrique du Sud de ratifier le Protocole de l’Organisation mondiale de la santé pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac, avec, en particulier, la mise en place un système de suivi et de traçabilité pleinement indépendant des fabricants.

Mots clés : Afrique du Sud, Lobby, Ingérence, CCLAT ©Génération Sans Tabac

FT


[1] Tobacco Industry Interference Index, South Africa 2021, septembre 2021, (consulté le 28/09/21)

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