Angleterre : l’objectif d’une génération sans tabac pas atteignable avant 2039
7 novembre 2024
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 5 novembre 2024
Temps de lecture : 4 minutes
Selon Cancer Research UK (CRUK), si les taux de tabagisme sont en baisse, ils ne diminuent pas assez rapidement pour parvenir à l’objectif fixé du gouvernement de faire de l'Angleterre un pays « sans tabac » d'ici 2030. En cause, le taux de tabagisme des populations plus précaires qui reste très élevé et baisse moins rapidement que dans le reste de la population[1].
En 2019, le gouvernement a annoncé son intention de parvenir à une génération sans tabac en Angleterre d'ici 2030, soit une prévalence inférieure à 5% au sein de la population adulte.
Une prévalence tabagique qui reste plus élevée chez les populations précaires
Environ 6 millions d'adultes britanniques - moins d'un sur huit (11,9 %) – fument. Il s’agit de la proportion la plus faible jamais enregistrée et elle est en baisse par rapport aux 20,2 % de 2011, selon les données les plus récentes de l'Office des statistiques nationales. L'Angleterre affiche la prévalence la plus faible (11,6 %) - 4,9 millions de personnes y fument encore - et l'Écosse la plus élevée (13,5 %).
Bien que cette tendance à la baisse doive se poursuivre, les projections du CRUK montrent que l’évolution sera trop faible pour réduire la prévalence tabagique à moins de 5% dans l’ensemble de la population. Derrière les chiffres de prévalence nationale se cachent de fortes inégalités : en Angleterre comme en France et ailleurs, le tabagisme est un véritable marqueur social, et touche principalement les populations les plus défavorisées. Des villes plus populaires comme Manchester demeurent avec des niveaux de consommation relativement élevés (20,8%), tandis que Wokingham ou Richmond upon Thames observent des prévalences tabagiques beaucoup plus faibles (respectivement 5,5% et 6%). Par ailleurs, certains groupes sociaux semblent davantage touchés par le tabagisme. Ainsi, comme le soulignent les chiffres gouvernementaux, 21,4% des travailleurs manuels se déclarent fumeurs[2].
Ainsi, selon les projections du CRUK, la prévalence devrait atteindre l'objectif de 5 % parmi le décile le plus riche de la population d'ici 2025 en Angleterre, mais seulement en 2050 chez le décile plus défavorisé de la population. En outre, même lorsque l'objectif d’une génération sans tabac dans la population générale sera atteint en 2039, les personnes les plus pauvres seront presque quatre fois plus nombreuses à consommer du tabac que les personnes les plus favorisées (459 000 de fumeurs appartenant au dixième le plus défavorisé de la population contre environ 119 000 personnes appartenant au dixième le plus favorisé).
Avoir des mesures plus ciblées à l’encontre de ces populations
Le Royaume-Uni devrait très prochainement mettre en place de nouvelles mesures antitabac très restrictives (Tobacco and Vaping Bill), en instaurant notamment une interdiction générationnelle du tabac, une hausse de la fiscalité sur les produits du tabac et une réglementation plus forte sur les produits du vapotage. Cependant, de nombreux experts alertent depuis des années sur la nécessité de renforcer les politiques de sevrage tabagique au Royaume-Uni. Un rapport gouvernemental de 2022 avait par ailleurs préconisé d’investir davantage dans la lutte contre le tabagisme avec 125 millions de livres sterling supplémentaires par an, soit 145 millions d’euros environ. En particulier, cet investissement devrait pour partie être consacré à une amélioration de la prise en charge et de l’accompagnement des fumeurs dans leur sevrage tabagique avec un accent sur les populations plus fragiles et défavorisées.
AE
[1] Denis Campbell, England may not be ‘smoke-free’ until 2039, cancer charity warns, The Guardian, publié le 4 novembre 2024, consulté le jour-même
[2] Gov.uk, Communiqué de presse, Government launches landmark reviews to tackle health disparities, publié le 4 février 2022, consulté le 4 novembre 2024
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