Contribution de Smoke Free Partnership au processus de révision de la directive cadre européenne sur les déchets 2008/98/CE

La Commission européenne a lancé une consultation publique sur la révision de la directive-cadre sur les déchets. La finalité est de parvenir à fixer des objectifs européens de réduction des déchets, à améliorer le résultat environnemental global de leur gestion, conformément à la hiérarchie des déchets et à la mise en œuvre du principe du pollueur-payeur.

La lutte contre le tabagisme a pour finalité de parvenir le plus rapidement possible à des générations sans tabac – d’ici 2032 en France et 2040 au sein de l’Union européenne. Cette politique s’inscrit dans une optique de santé publique mais également de réduction de l’impact environnemental grave induit par la consommation des produits du tabac et nouveaux produits de la nicotine.

Smoke Free Partnership est la coalition européenne en charge de porter les mesures validées et soutenues par la société civile dans l’ensemble des États membres voire au-delà dans l’ensemble de la région Euro de l’OMS. Dans le cadre de la consultation publique lancée par l’Union européenne, diverses recommandations ont ainsi été portées par la société civile.

Ce document est une adaptation du document en anglais de Smoke Free Partnership

smokefree-partnership-cancer-union-européenne-tabac

 

SOMMAIRE

Résumé

Propositions relatives aux filtres des produits du tabac

  1. Les mégots de tabac devraient être classés parmi les déchets dangereux ;
  2. Les filtres de cigarettes devraient être interdits
  • Les coûts humains, environnementaux et de gestion des déchets des mégots de cigarettes ;
  • Opportunité et faisabilité de la mesure d’interdiction des filtres

Propositions relatives à la responsabilité de l’industrie pour les dommages causés à l’environnement

  1. Empêcher toute communication de type « entreprise socialement responsable » y compris dans les dispositifs de REP ;
  2. Transférer les coûts de gestion des déchets à la charge des fabricants ;
  3. Mettre en place dans chaque État membre un mécanisme fiscal pour la gestion des déchets à la charge des fabricants ;
  4. Imposer des dispositions réglementaires et obligatoires en matière de responsabilité des fabricants à l’égard de leurs produits ;
  5. Mettre en place un mécanisme de financement indépendant de la recherche afin d’évaluer les dommages environnementaux du tabac ;
  6. Exiger des fabricants de tabac qu’ils fournissent les informations nécessaires pour combler le manque de données sur les impacts environnementaux de leurs activités ;
  7. Mettre en place des mécanismes de coopération entre les ministres de la santé, de l’agriculture et de l’environnement afin de réduire les méfaits du tabac sur l’environnement.

Résumé

Outre les effets dévastateurs et évitables de l’industrie du tabac sur la santé, lesquels sont déjà bien connus, les responsables politiques devraient maintenant reconnaître les coûts environnementaux directs et secondaires du tabac. Ils renvoient vers la question des déchets des produits du tabac et des nouveaux produits à la nicotine. La révision de la directive-cadre de l’Union européenne relative aux déchets est une occasion unique de s’attaquer aux coûts environnementaux du tabac qui pèsent sur les États membres et de faire en sorte que ces coûts (externalité négatives) ne soient plus pris en charge par la collectivité publique mais bien par l’industrie elle-même qui en est responsable.

La révision de la directive européenne sur les déchets devrait prendre des mesures établissant la responsabilité de l’industrie du tabac dans les coûts induits pour l’environnement du fait de ses produits et obligeant cette industrie à réduire les déchets. Pour y parvenir des mesures fiscales / financières, des obligations positives pesant sur les fabricants voire des recours en justice devraient être retenus. Aucune disposition à caractère partenarial et volontaire ne devrait en revanche être adoptée.

Les États membres devraient s’efforcer de supprimer les filtres des cigarettes. Il s’agit d’un plastique dangereux à usage unique, nocif pour l’environnement et pour la santé humaine. En outre, les dispositifs relatifs à la responsabilité élargie des producteurs (REP) devraient être adaptés au regard des caractéristiques particulières de l’industrie du tabac, en particulier afin d’éviter toute démarche de blanchiment écologique, et ce, conformément aux obligations liant les parties au traité de la Convention cadre pour la lutte antitabac. Il convient également de consacrer davantage de fonds à la recherche indépendante sur les dommages et les coûts environnementaux de l’industrie du tabac qui devrait être tenue de fournir les informations nécessaires pour combler le manque de données existant. Enfin, la collaboration multisectorielle entre les ministères de la santé, de l’environnement et de l’agriculture est essentielle.

 

PROPOSITIONS RELATIVES AUX FILTRES DES PRODUITS DU TABAC

  1. Les mégots devraient être classés parmi les déchets dangereux

Les mégots de cigarettes[1] et autres produits du tabac sont les déchets les plus jetés dans le monde[2][3][4]. Chaque année, 4,5 trillions de mégots de cigarettes sont jetés de manière inappropriée. Ces mégots sont considérés comme l’un des déchets les plus dangereux et l’une des menaces environnementales les plus graves au monde[5].

Les filtres sont fabriqués en acétate de cellulose, un type de plastique qui, une fois jeté, se brise en morceaux, libérant ainsi des microplastiques. À cela s’ajoutent les 7 000 produits chimiques et métaux lourds qu’ils contiennent[6]. Les filtres de cigarettes sont hautement toxiques et constituent l’une des principales sources de microplastiques dans nos océans[7], se retrouvant ainsi dans la chaîne alimentaire humaine. Lorsqu’ils sont ingérés, ils peuvent être mortels pour les espèces de poissons marins et d’eau douce.

Des études[8] ont montré que les mégots de cigarettes devraient être classés comme des déchets dangereux, au moins par HP 6 (toxicité) et HP 14 (écotoxicité) selon la classification de la directive-cadre européenne sur les déchets. La différenciation entre les produits bénéfiques et les produits intrinsèquement nocifs ou dangereux est cruciale. Par conséquent, les organisations européennes de santé réunies au sein de SFP recommandent de créer un code pertinent pour les mégots de cigarettes dans la liste harmonisée des déchets (UE, 2014b).

  1. Les filtres de cigarettes devraient être interdits

A. Les coûts humains, environnementaux et de gestion des déchets des mégots de cigarettes

Outre les effets désastreux de l’industrie du tabac sur la santé et l’environnement[9], les mégots de cigarettes constituent une menace importante pour notre écosystème. Le principal plastique dont sont faits les mégots, l’acétate de cellulose, accumule la nicotine et d’autres toxines provenant de la cigarette fumée et peut être nocif ou mortel s’il est avalé par des enfants ou des animaux. Des milliers d’oiseaux meurent chaque année après avoir ingéré des mégots de cigarettes jetés.

Les coûts sanitaires d’un déchet dangereux, sans utilité, mais répandu

Les filtres à cigarettes ont été introduits dans les années 1950[10] par l’industrie du tabac en réponse aux craintes de cancer du poumon et aux critiques croissantes concernant la létalité de ses produits. Plusieurs analyses de documents internes de l’industrie du tabac et de rapports[11] de recherche ont depuis prouvé que les filtres ne constituent qu’un « outil de marketing » et que les fabricants de tabac savent que les filtres ne protègent pas le consommateur. Ils libèrent non seulement des fibres de plastique lorsqu’il y a inhalation et constituent un risque pour un type plus agressif de cancer du poumon.

Les filtres de cigarettes induisent les consommateurs en erreur en leur faisant croire que le produit est plus sûr[12]. Ils contribuent à rendre le produit plus attractif, en particulier lors de l’initiation pour les enfants et les adolescents. L’industrie profite d’une asymétrie d’information envers les consommateurs pour faire de fausses déclarations concernant un produit mortel et addictif. La coalition Smokefree Partnership considère que les États membres devraient imposer des exigences spécifiques sur la conception d’un produit lorsque la conception et les composants de celui-ci sont incompatibles avec les objectifs de durabilité et sont utilisés pour tromper les consommateurs actuels et potentiels[13].  Outre les 8 millions de décès annuels dus à des maladies liées au tabac dans le monde, les quelques 700 000 décès dans l’UE et les 25,3 milliards d’euros de coûts en soins de santé[14] sont également à prendre en considération à une époque où la résilience des systèmes de santé est remise en question.

Les mégots de cigarettes tuent notre planète

Les filtres toxiques de tabac polluent les océans et les terres depuis au moins cinq décennies. Rien que pour les dix dernières années, la perte de valeur des écosystèmes s’élèverait à environ 186 milliards de dollars américains (187,3 milliards d’euros)[15].  Cette estimation ne tient pas compte des dommages environnementaux causés par les produits chimiques et les métaux toxiques libérés par les cigarettes[16].  Elle ne tient pas compte non plus d’autres coûts connexes, tels que les sécheresses, qui coûtent à l’Union européenne 9 milliards d’euros par an[17].

Les mégots de cigarettes épuisent nos ressources en eau

Un mégot de cigarette contamine jusqu’à 500 litres d’eau[18].  Dans le contexte d’épisodes de sécheresse intense et d’insécurité alimentaire dans l’Union européenne, il est important de garder à l’esprit que le tabac nécessite jusqu’à huit fois plus d’eau par comparaison par exemple, avec les tomates ou les pommes de terre[19]. Le stress hydrique augmente et les épisodes de sécheresse grave, qui se produisaient auparavant à une fréquence d’une fois tous les cent ans, devraient se produire tous les cinq ans[20].

La gestion des déchets de filtres à cigarettes est coûteuse, dangereuse et inefficace

Les services de gestion des déchets sont fortement affectés par les problèmes de collecte et les défis posés par la gestion des mégots de cigarettes. L’émergence de sociétés collectant les mégots de cigarettes conduit à un nouveau flux de déchets, exclusivement constitué de mégots, alors qu’ils étaient auparavant mélangés aux déchets ménagers et municipaux. Les mégots de cigarettes sont des déchets dangereux dont la plupart des fumeurs ne se débarrassent pas correctement. Les mégots nécessitent une minimisation des déchets, une réduction à la source (retrait des filtres ou des contenus toxiques) et un traitement spécial des déchets en raison de leur toxicité. À ce jour, il n’existe aucun moyen durable de traiter les mégots de cigarettes. Les campagnes de lutte contre les déchets financées par les fabricants de tabac, notamment la distribution de poubelles et de cendriers de poche, n’ont pas eu d’effet significatif sur la réduction des déchets de tabac[21].  Selon des estimations conservatrices, la gestion des déchets de produits du tabac et les coûts de la pollution marine induite par ces produits dans la région européenne s’élèvent à plus de 2,6 milliards de dollars US (2,62 milliards d’euros)[22].

Les mégots recyclés ou les bio-filtres ne sont pas la solution

Les études soutenues par l’industrie sont favorables au recyclage des mégots[23] de cigarettes, mais elles ne parviennent pas à prouver leur innocuité pour l’homme ou l’environnement. En effet, même si les filtres deviennent biodégradables, ils continueront à disséminer des produits chimiques et des métaux dangereux [24].

Les toxines chimiques dangereuses libérées par les mégots de cigarettes ont suscité des inquiétudes quant au fait de les laisser dans les décharges, notamment en raison de la forte teneur en métaux qu’ils contiennent [25], ou de les incinérer. Outre le coût élevé du recyclage des produits dangereux, celui-ci présente également des risques pour la santé [26], alors que le principe de précaution devrait plutôt s’appliquer.

Enfin, la recherche [27] a démontré que l’introduction par l’industrie de soi-disant alternatives écologiques aux filtres de cigarettes renvoie essentiellement à des stratégies de marketing et de politique d’image. Cette dernière vise à permettre aux fabricants d’être présents à la table des décideurs afin d’interférer dans les politiques publiques de santé et de développement durable. Il s’agit à cet égard d’une violation de l’article 5.3 de la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac (CCLAT de l’OMS), traité international de santé publique ratifié par l’Union Européenne et l’ensemble des états membres et juridiquement contraignant.

 

B. Opportunité et faisabilité d’une interdiction des filtres

Une mesure facile à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs révisés de la directive-cadre sur les déchets

La révision de la directive-cadre sur les déchets est une occasion unique de traiter les plastiques des filtres de cigarettes avant qu’ils ne deviennent une pollution et d’empêcher leur entrée dans notre écosystème et dans la chaîne alimentaire. L’élimination des filtres de cigarettes réduirait considérablement un important flux de déchets hautement dangereux, ce qui aurait un impact positif sur la santé humaine et l’environnement. Elle améliorerait grandement le rapport coût-efficacité du système de gestion des déchets au niveau de l’UE et réduirait considérablement les coûts liés aux externalités négatives induites par l’industrie du tabac pris en charge par les gouvernements et les collectivités publiques de l’UE.

Une interdiction des filtres de cigarettes est réalisable et nécessaire pour garantir une mise en œuvre correcte de la hiérarchie des déchets, car elle favorise la prévention des déchets. Comme démontré ci-dessus, elle serait conforme et en cohérence avec les principes généraux de précaution et de durabilité applicables à l’environnement. Elle renforcerait la protection des ressources naturelles et préserverait les ressources financières, avec un impact bénéfique sur l’économie, la société et la sécurité des consommateurs.  Elle contribuerait aussi à l’objectif de la directive européenne révisée sur les déchets de promouvoir des flux de déchets plus sûrs et plus propres.

L’interdiction des filtres de cigarettes serait conforme au droit européen et international

Une telle interdiction pourrait « dénormaliser » la consommation de cigarettes, sur la base de préoccupations environnementales. Elle contribuerait à la réalisation des objectifs du plan européen de lutte contre le cancer [28], à savoir réduire la pollution environnementale – à laquelle la fumée de tabac contribue dans une large mesure [29] [30]  et réduire la prévalence de la consommation de tabac à 5 % de la population d’ici 2040. Une interdiction des filtres serait conforme à la CCLAT de l’OMS [31], car elle réduirait l’attractivité du produit, notamment pour les jeunes (articles 9 – 13 et 14 du traité, relatifs à la réglementation de la composition des produits du tabac, l’interdiction de la promotion du tabac et sur la promotion du sevrage tabagique). Elle protégerait l’environnement (article 18 du traité). Une telle interdiction serait également conforme à l’ambition du prochain traité mondial des Nations unies sur la pollution par les plastiques [32], qui vise à éliminer les plastiques à usage unique (SUP) et à réduire les plastiques vierges – les filtres de cigarettes sont dérivés de plastiques vierges et principalement fabriqués à partir d’acétate de cellulose, qui est un plastique à usage unique. Elle serait également conforme aux objectifs de développement durable des Nations unies [33], puisque la cible 3.a du programme des objectifs de développement durable vise à « renforcer la mise en œuvre de la CCLAT de l’OMS dans tous les pays ». Selon l’OMS, si l’objectif 3 est le plus manifestement applicable au tabac, bon nombre des 17 objectifs ont un lien direct ou indirect avec la lutte antitabac, notamment les objectifs 1 (éradication de la pauvreté), 5 (égalité entre les sexes), 10 (réduction des inégalités), 12 (consommation responsable) et 17 (partenariats pour les objectifs mondiaux).

 

PROPOTIONS RELATIVES A LA RESPONSABILITÉ DE L’INDUSTRIE DU TABAC POUR LES DOMMAGES CAUSÉS À L’ENVIRONNEMENT

 

  1. Empêcher toute communication de type « entreprise socialement responsable » y compris dans les dispositifs de REP

Les programmes de gestion des déchets du tabac résultant de la mise en œuvre de la responsabilité élargie des producteurs (REP) [34] [35] ne doivent pas devenir une occasion de blanchiment écologique pour l’industrie. Le système actuel de REP pour les déchets de produits du tabac, introduit par la directive SUP [36], a révélé ses limites. Il porte atteinte à l’interdiction de la publicité, de la promotion et du parrainage en faveur du tabac (article 13 de la CCLAT de l’OMS). Il implique une responsabilité financière sous la forme de versements à un fonds public destiné à prendre en charge la gestion des déchets, mais il n’interdit pas explicitement à l’industrie d’être partie prenante et de se présenter en référence à des entreprises socialement responsables (RSE). Ceci va à l’encontre des articles 13 (interdiction de toute publicité, promotion) et 5.3 de la CCLAT de l’OMS (sur la protection des politiques publiques à l’égard de l’interférence de l’industrie du tabac).

L’affichage par l’industrie du tabac d’un positionnement de type « entreprise socialement responsable » est fermement condamné par l’OMS [37], qui a récemment réitéré sa demande d’interdiction d’une telle communication qui relèvent de la définition de la publicité, de la promotion et du parrainage de la CCLAT de l’OMS (article 13). La RSE de l’industrie du tabac est, selon l’OMS [38], « une contradiction inhérente, car les activités essentielles de l’industrie du tabac sont en contradiction avec les objectifs des politiques de santé publique concernant la lutte antitabac. »

Le rôle attribué à l’industrie du tabac dans la gestion des mégots de cigarettes en France est un bon exemple de la façon dont, sans clarification de la Commission européenne, les États membres peuvent entièrement déléguer à l’industrie du tabac la gestion, ou une partie de la gestion, de ses déchets. La France a confié à tous les industriels du tabac, réunis dans un éco-organisme appelé ALCOME, la gestion et la communication autour de la pollution de ses mégots. ALCOME a ainsi déjà signé plusieurs dizaines de contrats avec des collectivités locales et en profite pour rendre les fumeurs responsables de sa pollution [39].

Compte tenu de l’impact désastreux des produits du tabac sur la santé humaine, l’environnement et les systèmes économiques et financiers, l’industrie du tabac ne doit pas être traitée comme n’importe quelle industrie. Imposer des obligations de « responsabilité sociale » (telles que la REP) à un producteur de tabac pourrait nuire aux politiques de lutte antitabac, en particulier lorsque cela confère une image positive de cette industrie ou permet une forme de promotion et de parrainage de ses produits. Aussi, la coalition Smokefree Partnership et ses membres recommandent que la directive européenne révisée sur les déchets garantisse que tous les systèmes de REP s’appliquant à l’industrie du tabac soient strictement réglementés afin de garantir le respect de l’article 5.3 de la CCLAT de l’OMS.

 

  1. Transférer les coûts de gestion des déchets à la charge des fabricants

Actuellement sauf exception, les coûts de nettoyage des produits du tabac jetés par terre sont à la charge des contribuables, alors qu’ils résultent de l’activité de l’industrie du tabac qui a créé ce problème.

L’une des principales stratégies des programmes de lutte contre les déchets de mégots de cigarettes déployés par les fabricants de tabac consiste à s’assurer que l’industrie du tabac n’est pas tenue pour responsable des dommages afin de les protéger des conséquences pratiques ou financières. Ceux-ci font donc prévaloir que les déchets de cigarettes et autres produits du tabac, relèvent de «  la responsabilité d’une élimination correcte qui incombe à l’utilisateur du produit »[40].  La stratégie consistant à pointer le consommateur est systématiquement observée lorsque l’industrie est impliquée dans des activités de communication sur la gestion des déchets, comme c’est le cas avec ALCOME en France.

Compte tenu de la conception défectueuse des filtres à tabac démontrée ci-dessus et de leur nature toxique intrinsèque, la coalition Smokefree Partnership et ses membres estiment que l’Union européenne dans la directive révisée devrait appliquer le principe du pollueur-payeur à l’industrie du tabac et veiller à ce que les coûts soient à sa charge. Les dommages environnementaux et les actions de dissimulation de cette industrie ont retardé de manière inexcusable l’action climatique. La reconnaissance de la responsabilité environnementale de l’industrie est essentielle pour permettre la réparation des dommages environnementaux, notamment par le nettoyage de la pollution causée.

  1. Mettre en place dans chaque État membre un mécanisme fiscal pour la gestion des déchets à la charge des fabricants

La disposition la plus efficace pour réduire de manière significative les dommages pour l’environnement liés aux mégots de cigarettes est la suppression du filtre.

La mise en place d’une taxe sur les mégots en application du principe pollueur-payeur est également à retenir, mais elle ne devrait pas retarder ou éviter une interdiction des filtres de cigarettes en tant que plastiques à usage unique.

Selon le principe du pollueur-payeur, les compagnies de tabac devraient assumer proportionnellement la responsabilité financière du nettoyage des déchets qu’elles produisent. L’OMS encourage vivement les gouvernements à imposer une taxe environnementale sur les déchets de tabac afin de rendre l’industrie responsable de ses dommages environnementaux [41].  L’article 6 de la CCLAT de l’OMS consacré aux mesures fiscales comporte des lignes directrices d’application concrète fondées sur les bonnes pratiques. Elles prévoient notamment l’affectation de taxes à la promotion de la santé, tandis que l’article 19 de la CCLAT de l’OMS consacré à la responsabilité de l’industrie du tabac prévoit le mécanisme d’indemnisation.

Certains pays et villes ont imposé une taxe environnementale sur les produits du tabac [42].  En 2010, la ville de San Francisco a instauré une taxe destinée à financer le nettoyage des déchets de cigarettes, tels que les mégots et les emballages en plastique, ainsi que l’application de restrictions sur les déchets sauvages et la diffusion de messages d’information au public. La taxe, qui était de 20 cents par paquet en 2010, est passée depuis lors à 75 cents par paquet. D’autres États américains font de même [43].  Une vingtaine de pays ont imposé une forme de surtaxe, de redevance ou de redevance sur les pollueurs sur les cigarettes et l’ont affectée à diverses fins [44]. Une taxe environnementale de 30 % sur les cigarettes, au regard des dommages causés à l’environnement, est à l’étude.  La Commission devrait également prévoir l’introduction d’écotaxes sur les produits du tabac – autres que les filtres – ayant un impact environnemental élevé, tels que les sachets de nicotine ou les nouveaux produits du tabac et de la nicotine.

 

  1. Imposer des dispositions réglementaires et obligatoires en matière de responsabilité des fabricants à l’égard de leurs produits

Les démarches de l’industrie du tabac de type initiatives volontaires sont associées à d’intenses actions de communication et de relations publiques destinées à améliorer l’image des fabricants au détriment de la santé publique et de l’environnement [45]. Conclure des accords volontaires irait à l’encontre de l’article 5.3 des directives de la CCLAT de l’OMS qui interdit ce type d’accord avec l’industrie du tabac, sauf s’il fait partie d’une décision de justice ou exécutoire. Ils ne seraient également pas conformes aux obligations liées à l’article 13 de la CCLAT de l’OMS concernant l’interdiction de la publicité, de la promotion et du parrainage du tabac, y compris sous la forme d’une communication de type « RSE ». Afin de garantir une responsabilité adéquate des fabricants de tabac, la coalition Smokefree partnership et ses membres recommandent que les mesures de la directive révisée de l’UE sur les déchets s’appliquant à l’industrie du tabac soient réglementaires et obligatoires.

  1. Mettre en place un mécanisme de financement indépendant de la recherche afin d’évaluer les dommages environnementaux du tabac

L’estimation des dommages et des coûts environnementaux du tabac est cruciale pour tenir l’industrie du tabac responsable de ces derniers, mais les données sont très limitées. Par exemple, aucune recherche à ce jour n’a examiné les effets à long terme des cigarettes électroniques [46] sur l’environnement, bien qu’il s’agisse de produits en plastique, électroniques, jetables, dont la fabrication nécessite beaucoup d’énergie et de ressources, et qui ne devraient pas se dégrader avant des centaines ou des milliers d’années [47]. La plupart des études existantes sont sujettes à des conflits d’intérêts financiers étant financées par l’industrie du tabac. Or la recherche a démontré combien combien des études financées par les compagnies de tabac avaient des résultats et des recommandations influencés par ces financements intéressés[48]. Aussi, les États membres devraient investir dans de nouvelles recherches indépendantes dans ce domaine afin de soutenir l’élaboration de politiques publiques. Dans cette perspective, la coalition Smokefree Partnership et ses membres recommandent que les sources de financement pour une recherche indépendante sur les dommages environnementaux causés par le tabac et les nouveaux produits du tabac soient explicitement identifiées et incluses dans la directive révisée sur les déchets. L’industrie du tabac pourrait être tenue de payer pour ces recherches par le biais de taxes environnementales.

  1. Exiger des fabricants de tabac qu’ils fournissent les informations nécessaires pour combler le manque de données sur les impacts environnementaux de leurs activités

Conformément à l’article 5.3 de la CCLAT et ses directives d’application, les fabricants de tabac devraient également être tenus de communiquer les informations nécessaires pour « combler les lacunes en matière de données, avec des sanctions sévères en cas de transmissions de fausses informations ». Les normes sectorielles sur le tabac, qui sont actuellement élaborées par le Groupe consultatif européen sur l’information financière (EFRAG), conformément à la directive sur la publication d’information en matière de durabilité par les entreprises [49], pourraient être une autre occasion d’inclure des exigences de divulgation en matière d’environnement, telles que la toxicité des produits ainsi que les activités de marketing, de parrainage et de recherche. Ces mesures d’information devraient aller de pair avec une surveillance par un tiers indépendant.

  1. Mettre en place des mécanismes de coopération entre les ministres de la santé, de l’agriculture et de l’environnement afin de réduire les méfaits du tabac sur l’environnement

Une collaboration multisectorielle est nécessaire pour lutter contre les méfaits du tabac sur l’environnement. La prise en compte des préoccupations environnementales et sanitaires nécessitera des processus de coopération innovants entre les États membres. Pour optimiser la collecte de données sur les méfaits de l’industrie du tabac sur l’environnement, la directive révisée sur les déchets pourrait proposer des mécanismes de coopération innovants entre les ministres de la santé, de l’agriculture et de l’environnement, tout en s’inspirant des dispositifs en vigueur concernant la CCLAT (articles 17, 18 et 19 de la CCLAT de l’OMS).

Mots-clés : Smoke Free Partnership, mégots, déchets, directive européenne, commission européenne, filtre, interdiction, environnement, écologie, éco-blanchiment

©Génération Sans Tabac


[1] Un mégot de cigarette est composé du filtre et du tabac restant de la cigarette fumée.

[2] Ocean Conservatory. Cleanup Reports. Disponible : https://oceanconservancy.org/trash-free-seas/international-coastal- cleanup/annual-data-release/

[3] Truth initiative. Why are cigarette butts the most discarded item on earth? Disponible : https://truthinitiative.org/research-resources/harmful-effects-tobacco/why-are-cigarette-butts-most-littered-item-earth

[4] NBC News. J Rainey. Plastic straw ban? Cigarette butts are the single greatest source of ocean trash. (27 août 2018). Disponible : https://www.nbcnews.com/news/us-news/plastic-straw-ban-cigarette-butts-are-single-greatest-source-ocean-n903661

[5] Global Journal of Environmental Science and Management. M Hazbehiean, N Mokhtarian, A Hallajisani. Converting the cigarette butts into valuable products using the pyrolysis process. (11 Juin 2021).  Disponible : https://www.gjesm.net/article_244343.html

[6] UNEP. UNEP, Secretariat of the WHO FCTC partner to combat microplastics in cigarettes (1er février 2022). Disponible : https://fctc.who.int/newsroom/news/item/01-02-2022-unep-secretariat-of-the-who-fctc-partner-to-combat-microplastics-in-cigarettes

[7] Earth.org. M Igini. Are microplastics harmful and how can we avoid them? (21 Avril 2022). https://earth.org/are-microplastics-harmful/

[8] Science Direct. F Rebischung, L Chabot, H Biaudet, P Pandard. Cigarette butts: A small but hazardous waste, according to European regulation. Disponible : https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0956053X18305798

[9] WHO. Tobacco: poisoning our planet. (29 Mai 2022). Disponible : https://www.who.int/publications/i/item/9789240051287

[10] CNN Health. S Lazarus. Cigarette filters are the No.1 plastic pollutant … and don’t prevent cancer. https://edition.cnn.com/2019/01/24/health/dirty-truth-about-cigarette-filters/index.html

[11] Tobacco Control. Harris Bradford. (25 Janvier 2011). The intractable cigarette ‘filter problem’. Disponible : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/20/Suppl_1/i10

[12] Tobacco Control. K Evans-Reeves, Hathrin Lauber, Rosemary Hiscock. The ‘filter fraud’ persists: the tobacco industry is still using filters to suggest lower health risks while destroying the environment. (26 Avril 2021). Disponible : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/31/e1/e80

[13] Tobacco Tactics. Cigarette Filters. (13 Décembre 2021). Disponible : https://tobaccotactics.org/wiki/cigarette-filters/

[14] P 33. European Commission, DG SANCO. A study on liability and the health costs of smoking. (2008). https://health.ec.europa.eu/publications/study-liability-and-health-costs-smoking-0_en

[15] P 29. Global Center for Good Governance in Tobacco Control. Tobacco’s toxic plastics: A global outlook. Disponible : https://ggtc.world/library/tobaccos-toxic-plastics-a-global-outlook

[16] P 4. Global Center for Good Governance in Tobacco Control. Tobacco’s toxic plastics: A global outlook. Disponible : https://ggtc.world/library/tobaccos-toxic-plastics-a-global-outlook

[17] Corriere Della Serra. E Comelli. La «corsa» pazza dei prezzi? «Non c’è solo la guerra dipende anche dalla siccità». Disponible : https://www.corriere.it/buone-notizie/22_giugno_16/corsa-pazza-prezzi-non-c-solo-guerra-dipende-anche-siccita-bae15164-e3e0-11ec-8fa9-ec9f23b310cf.shtml

[18] Brussels.be. Survey on ashtrays: answers to the questions. (13 Décembre 2019). Disponible : https://www.brussels.be/ashtrayBXL#:~:text=It%20is%20important%20to%20note,on%20the%20environment%20is%20enormous

[19] P 3. WHO. Tobacco: poisoning our planet. (29 Mai 2022). Disponible : https://www.who.int/publications/i/item/9789240051287

[20] La Repubblica. M Bussolati. Perché con la siccità dovremmo pensare anche alle alluvioni. Disponible : https://www.repubblica.it/green-and-blue/dossier/siccita–gestione-acqua/2022/07/22/news/siccita_danni_economici_agricoltura_crisi_idrica-358646427/

[21] Tobacco control. EA Smith, EA McDaniel. Covering their butts: responses to the cigarette litter problem. (21 Octobre 2010). Disponible : https://doi.org/10.1136/tc.2010.036491

[22] P31. Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC). Tobacco’s toxic plastics: A global outlook. Disponible : https://ggtc.world/library/tobaccos-toxic-plastics-a-global-outlook

[23] According to the Golden Holocaust, it is cheaper for cigarette companies to manufacture filtered cigarettes than unfiltered cigarettes of the same size. Pour en savoir plus : https://ia802305.us.archive.org/21/items/geopolitique/Golden-Holocaust-La-conspiration-des-industriels-du-tabac.pdf

[24] Tobacco control. E Slaughter, RM Gersberg, K Watanabe, J Rudolph, C Stransky, TE Novotny. Toxicity of cigarette butts, and their chemical components, to marine and freshwater fish. (1er Novembre 2011). Disponible : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/20/Suppl_1/i25

[25] P11. Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC). Tobacco’s toxic plastics: A global outlook. Disponible : https://ggtc.world/library/tobaccos-toxic-plastics-a-global-outlook

[26] Treehugger. S Lebby. The Environmental Pros and Cons of Acetate. (6 Août 2021). Disponible : https://www.treehugger.com/the-pros-and-cons-of-acetate-5176132

[27] Tobacco control. EA Smith, PA McDaniel. Covering their butts: responses to the cigarette litter problem. (21 Octobre 2010). Disponible : https://doi.org/10.1136/tc.2010.036491

[28] Europe’s Beating Cancer Plan. (3 Février 2021). Disponible : https://health.ec.europa.eu/system/files/2022-02/eu_cancer-plan_en_0.pdf

[29] European Respiratory Journal.  A Ruprecht, C De Marco, P Pozzi, R Mazza, E Munarini, A Di Paco, P Paredi, Gi Invernizzi, R Boffi. Outdoor second-hand cigarette smoke significantly affects air quality. (26 Mai 2016). Disponible : https://erj.ersjournals.com/content/48/3/918

[30] Tobacco control. G Invernizzi, A Ruprecht, R Mazza, E Rossetti, A Sasco, S Nardini, R Boffi. Particulate matter from tobacco versus diesel car exhaust: an educational perspective. Disponible : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/13/3/219

[31] WHO. WHO Framework Convention on Tobacco Control. (25 Mai 2003). Disponible : https://fctc.who.int/who-fctc/overview

[32] UNEP. What you need to know about the plastic pollution resolution. (2 Mars 2022). Disponible : https://www.unep.org/news-and-stories/story/what-you-need-know-about-plastic-pollution-resolution

[33] WHO. (2019). Tobacco control & the sustainable development goals. https://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0020/340193/TOBACCO-CONTROL-AND-THE-SUSTAINABLE-DEVELOPMENT-GOALS_Edited.pdf

[34] La responsabilité élargie des producteurs est un concept de « pollueur-payeur » qui vise à responsabiliser les industriels pour les déchets qu’ils mettent sur le marché. (Consulté le 23 août 2022) Disponible : https://leshorizons.net/responsabilite-elargie-producteurs/

[35] En application du principe pollueur-payeur, l’Union européenne a adopté en 2019 une directive sur les produits plastiques à usage unique, dont les filtres de cigarettes. Entre autres obligations, ce texte oblige les producteurs de tabac à couvrir les coûts liés au nettoyage, au transport et au traitement des mégots de cigarettes et les États membres à développer des mesures de sensibilisation sur ce sujet.

[36] EUR-Lex. Directive on the reduction of the impact of certain plastic products on the environment. (5 Juin 2019). Disponible : https://eur-lex.europa.eu/eli/dir/2019/904/oj

[37] STOP. Talking Trash: Behind the Tobacco Industry’s “Green” Public Relations. (Mai 2022). Disponible : https://exposetobacco.org/wp-content/uploads/Talking_Trash_EN.pdf

[38] WHO. Tobacco industry and corporate responsibility… an inherent contradiction. (2004). Disponible : https://escholarship.org/uc/item/6kf7q7v9

[39] L’éco-organisme ALCOME, outil de greenwashing de l’industrie du tabac en France, (24 mai 2022) Disponible : https://cnct.fr/communiques/eco-organisme-alcome-outil-greenwashing-industrie-tabac-france/

Voir aussi : P 17. Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC). Tobacco’s toxic plastics: A global outlook. (9 Juin 2022). Disponible : https://ggtc.world/library/tobaccos-toxic-plastics-a-global-outlook

[40] Tobacco control. E Smith, P McDaniel. Covering their butts: responses to the cigarette litter problem. (21 Octobre 2010). Disponible : https://doi.org/10.1136/tc.2010.036491  

Voir aussi : Sensibiliser : L’enjeu, c’est le geste. La sensibilisation par l’information permet d’améliorer durablement le comportement des fumeurs et par conséquent la réduction à son plus strict minimum des mégots sur la voie publique. Le « bon geste » systématique des fumeurs sera principalement visé. Consulté le 22 août 2022 Disponible : https://alcome.eco/responsabilite-elargie-du-producteur/

[41] P 7. WHO. Tobacco: poisoning our planet. (29 Mai 2022). Disponible : https://www.who.int/publications/i/item/9789240051287

[42] Idem

[43] Tobacco control. JE Schneider, NA Peterson, N Kiss, AS Doyle. Tobacco litter costs and public policy: a framework and methodology for considering the use of fees to offset abatement costs. (12 Mars 2011). Disponible : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/20/Suppl_1/i36

[44] Hebrew Environment, Science & Policy Network. N Neve. מטפלים בבדלים – הצעת חוק חדשה תתמודד עם ההשלכות הסביבתיות של תעשיית הסיגריות. Treat the Cigarette Butts – a new bill will deal with the environmental consequences of the cigarette industry. (25 Juin 2018). Disponible : https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3254943

[45] Tobacco control. E Smith, P McDaniel. Covering their butts: responses to the cigarette litter problem. (21 Octobre 2010). Disponible : https://doi.org/10.1136/tc.2010.036491

[46] ASH. YH Hendlin. For an earth free of tobacco waste. (22 Avril 2017). Disponible : https://ash.org/earth-free-of-tobacco-waste/

[47] Bright hub. How Long Does it Take Plastic to Decompose? (21 Février 2011). Disponible : https://www.brighthub.com/environment/green-living/articles/107380/

[48] National Library of Medicine. YH Hendlin, M Vora, J Elias 1, PM Ling. Financial conflicts of interest and stance on tobacco harm reduction: a systematic review. Disponible : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31095414/

[49] EUR-Lex. Proposal for a Directive as regards corporate sustainability reporting. (21 Avril 2021). Disponible : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52021PC0189

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Publié le 23 août 2022