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La Journée mondiale sans tabac attire l’attention sur les conséquences environnementales du tabac

2 juin 2022

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 6 août 2024

Temps de lecture : 7 minutes

La Journée mondiale sans tabac attire l’attention sur les conséquences environnementales du tabac

Air, eau, forêt, déchets, CO2 : les conséquences sur l’environnement de la production et de la consommation de tabac sont phénoménales et peu évoquées. La Journée mondiale sans tabac est une opportunité de faire le point sur ces aspects peu connus de l’industrie du tabac.

La Journée mondiale sans tabac est, chaque année, une occasion d’organiser des actions de sensibilisation et d’incitation au sevrage tabagique. Cette année, c’est sous le signe de l’environnement qu’est placée cette journée, afin de rappeler les nombreuses conséquences du marché du tabac sur l’environnement.

Une industrie gourmande en ressources naturelles

La production de tabac nécessite d’importantes ressources naturelles. Un rapport de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) indique que cette production consomme 22 millions de tonnes d’eau, 200 000 hectares de terres cultivables et 600 millions d’arbres pour fabriquer les 6 000 milliards de cigarettes fumées annuellement[1]. Cette seule production entraîne l’émission de 84 millions de tonnes de dioxyde de carbone, soit 20% des émissions du trafic aérien. A ceci s’ajouteront les émissions provenant de la combustion des cigarettes elles-mêmes, libérant dans l’atmosphère les 7000 composés chimiques contenus dans la fumée de tabac, dont 70 sont reconnus comme cancérigènes.

L’accaparement des ressources en eau et en terre est particulièrement dommageable dans les pays à revenu faible et moyen, où sont principalement situées les plantations de tabac. Il faut en effet 3,7 litres d’eau pour fabriquer une seule cigarette, et 678 litres d’eau pour produire un kilogramme de tabac. La culture du tabac est par ailleurs à l’origine de 5 % de la déforestation mondiale. Elle entraîne également la « maladie du tabac vert », due à l’absorption massive de nicotine, qui touche plus particulièrement les enfants et les femmes parmi les travailleurs mobilisés pour cette culture. Ces travailleurs sont aussi fortement exposés aux engrais et aux pesticides, abondamment utilisés dans la culture du tabac, qui est la sixième culture la plus consommatrice de ces produits chimiques.

Une conséquente production de déchets

L’industrie du tabac est également une importante productrice de déchets. Le filtre des cigarettes, inefficace pour protéger la santé des fumeurs, est ainsi composé de plastique (acétate de cellulose). Ce filtre peut donc être considéré comme un plastique à usage unique, ce qui devrait logiquement appeler à sa disparition. On estime qu’environ 4 500 milliards de mégots sont jetés au sol chaque année avant de finir leur course dans les océans, ce qui en fait le deuxième type de pollution par les plastiques dans le monde (40 %).

A ces mégots, s’ajoutent les déchets provenant des emballages de cigarettes ou générés par d’autres produits que les cigarettes. Les cigarettes électroniques et les dispositifs de tabac chauffé génèrent notamment des déchets plastiques et métalliques, ainsi que des batteries usagées, qui sont sensiblement plus polluants et persistants que les cigarettes classiques, pourtant déjà très polluantes. Les cigarettes électroniques jetables culminent ici en termes de pollution, puisqu’il s’agit de produits à usage unique contenant une batterie et des produits chimiques, et souvent jetés parmi les déchets courants. Les autres produits du tabac non fumés ne sont pas en reste : en Inde, une étude conduite dans l’état de Tamil Nadu a ainsi calculé que sur les 8238 tonnes de déchets annuels du tabac, près de 44% des déchets étaient attribuables au tabac à mâcher, très commun dans cette région[2].

Le contournement du principe « pollueur-payeur »

Nettoyer ces mégots et ces déchets comporte un coût financier, en plus des différents coûts écologiques. Selon l’OMS, il est estimé à 234 millions de dollars US en Allemagne, et à 2,6 milliards de dollars US en Chine[3]. L’application du principe « pollueur-payeur » impliquerait que ce soient les industriels qui contribuent financièrement à traiter les déchets qu’ils génèrent ; dans le secteur du tabac, ces industriels tentent plutôt de se délester de cette tâche en la confiant aux états et aux fumeurs.

Bien que la France soit, avec l’Espagne, saluée par l’OMS pour les efforts engagés en matière de traitement des déchets du tabac, la situation française se révèle problématique en la matière. Transposant la directive européenne sur les plastiques à usage unique, la France a en effet confié, en août 2021, la gestion de la collecte des mégots à Alcome, un éco-organisme fondé, financé et dirigé par l’industrie du tabac. Or, la gestion de cet éco-organisme devrait, pour respecter l’article 5.3 de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT), être totalement indépendante de l’industrie du tabac et simplement alimentée par une taxe spécifique mise en place sur les déchets produits par l’industrie[4]. A l’inverse, les actions proposées par Alcome, qu’il s’agisse de distribution de cendriers de poche ou d’installation de cendriers dans l’espace public, visent plutôt à renormaliser l’usage du tabac et à encourager la consommation.

La RSE, prétexte de communication

Cette transgression de l’article 5.3 de la CCLAT, qui stipule que les politiques publiques doivent échapper aux influences de l’industrie du tabac, est le signe de l’intrusion des industriels dans l’élaboration des politiques publiques, en vue de perpétuer l’usage de tabac et d’instituer celui des nouveaux produits du tabac et de la nicotine. Afin de montrer leur « bonne volonté » et leur « engagement citoyen », les majors du tabac ont fortement investi, depuis le début des années 2000, le champ des activités sociales et environnementales, sous couvert de la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Ces activités, souvent plus démonstratives qu’efficaces, ne compensent en rien les dommages environnementaux infligés par l’industrie du tabac et sur lesquels elle souhaite peu s’attarder. Elle préfère, à l’inverse, utiliser ces activités de RSE comme supports de communication et de promotion de ses nouveaux produits. Or, dans les pays signataires de la CCLAT et plus encore dans ceux où la publicité pour le tabac est explicitement interdite, la promotion des produits du tabac n’est en principe pas permise, ce qui devrait invalider la plupart des opérations de RSE. La CCLAT contient aussi, dans son article 17, un volet dans lequel il est expressément demandé de faciliter la reconversion vers d’autres cultures des terres allouées à la production de tabac, et dans son article 18, d’accorder un soin tout particulier aux questions environnementales dans la culture et la production des produits du tabac.

La résorption des dommages environnementaux dus au tabac peut s’envisager autrement que par les options proposées par l’industrie. Retirer les filtres des cigarettes serait, dans un premier temps, une façon de réduire ces dommages. Réduire le nombre de fumeurs et parvenir à une Génération sans tabac seraient une autre manière, plus simple et plus efficace, de résoudre les multiples coûts et conséquences liés au tabac.

Mots-clés : JMST, Journée mondiale sans tabac, environnement, déchets, mégots, RSE, Alcome

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Tobacco: poisoning our planet, WHO, publié le 29 mai 2022, consulté le 31 mai 2022.

[2] Express News Service, Tobacco leaves more than 8,000 tonne waste trail in Tamil Nadu: Study, The New Indian Express, publié le 30 mai 2022, consulté le 31 mai 2022.

[3] L’OMS tire la sonnette d’alarme concernant l’impact de l’industrie du tabac sur l’environnement, OMS, publié le 31 mai 2022, consulté le 31 mai 2022.

[4] Alcome : pourquoi l’éco-organisme de lutte contre les mégots pose problème, Génération sans tabac, publié le 17 mars 2022, consulté le 31 mai 2022.

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