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Les filtres biodégradables : la fausse bonne solution de l’industrie du tabac

Après une première session en 2022, les négociations sur le Traité Plastique des Nations Unies ont lieu du 29 mai au 2 juin à Paris afin de parvenir à un accord international juridiquement contraignant pour mettre un terme à la pollution plastique. Les filtres de cigarettes, qui sont une des principales sources de pollution plastique mondiale, seront au cœur des discussions, alors que l’industrie du tabac essaie de proposer des alternatives qui se veulent plus vertueuses mais qui continueront d’avoir un impact délétère sur l’environnement et la santé.

De plus en plus de pays souhaitent s’engager dans la voie de l’interdiction pure et simple des filtres de cigarettes à l’image des gouvernements belges et néerlandais qui se sont récemment positionnés en faveur d’une telle interdiction.

On estime que plus de 4 500 milliards de filtres de cigarettes sur les 5 500 milliards de cigarettes produites annuellement par l’industrie du tabac finissent dans la nature. Les filtres sont principalement composés d’acétate de cellulose qui mettent entre 10 et 15 ans à se décomposer et libèrent jusqu’à 7 000 substances chimiques dont une centaine sont toxiques notamment cancérigènes. De ce fait, les filtres sont à l’origine de la plus importante pollution par plastique dans le monde : environ 40% des déchets ramassés dans la méditerranée sont des mégots, et 30% sur les littoraux aux États-Unis.

Bien que l’industrie du tabac admette que les mégots de cigarettes soient l’un des déchets les plus répandus dans le monde, elle rejette la responsabilité sur les consommateurs et refuse de payer pour les dégâts qu’elle cause sur l’environnement. Pour se positionner comme des partenaires dans la construction d’un monde durable tout en continuant de vendre leurs produits mortifères, les industriels du tabac s’efforcent de proposer des « alternatives ». Parmi les « solutions » proposées par l’industrie figurent les filtres biodégradables. Ces derniers sont composés à partir de fibres d’abaca, de coton floqué et de chanvre, susceptibles de se décomposer dans la nature plus rapidement. Cependant cette option semble essentiellement relever d’une stratégie de greenwashing de l’industrie du tabac face aux risques de règlementations environnementales de ses produits.

Les mégots biodégradables ne protègent pas l’environnement

Les filtres usagés de cigarettes, quelle que soit leur composition, contiennent des éléments toxiques extrêmement dangereux : baryum, plomb et mercure, ainsi que des hydrocarbures aromatiques et des traces de pesticides utilisés par l’industrie du tabac dans la phase de culture. En se décomposant, le filtre libère ces produits chimiques, dans lesquels l’on trouve également des métaux lourds et des substances radioactives comme le polonium, directement dans la nature. Compte tenu de sa toxicité, aucune solution viable de traitement et de recyclage n’existe pour ces produits. Ainsi, le seul avantage que pourrait avoir cette nouvelle génération de filtres, à savoir un intérêt environnemental, est donc inexistant. Il tendrait même à aggraver leur impact environnemental si les fumeurs pensent que le jet de mégot n’aura plus d’influence sur l’environnement en raison de son caractère biodégradable.

Les filtres y compris biodégradables ne protègent pas la santé des fumeurs

Puisque les filtres n’ont aucune justification sanitaire pour le fumeur et sont un simple outil marketing de l’industrie du tabac, l’introduction de filtres « biodégradables » par cette dernière pourrait conduire à une renormalisation du tabagisme en maintenant l’attractivité du produit. Le filtre facilite non seulement l’initiation des jeunes du tabagisme, en réduisant le caractère irritant pour les voies respiratoires de la fumée, mais dissuade également l’arrêt. Enfin, il brouille la perception des fumeurs sur la perception des dangers réels que fait peser le tabagisme sur leur santé.

Les filtres « biodégrables » pourraient même participer à améliorer l’image du tabagisme, en suggérant que certaines consommations de tabac peuvent être respectueuses de l’environnement. Ce risque de renormalisation du tabagisme est d’autant plus fort auprès des jeunes générations, davantage sensibles aux problématiques environnementales.  Cela pourrait par ailleurs être un nouvel argument marketing potentiellement redoutable pour l’industrie du tabac, comme l’ont été il y a plusieurs décennies l’introduction des filtres ou des cigarettes dites « légères », qui ont conduit à une augmentation de la consommation.

Mots-clés : filtres, biodégradables, environnement, plastique, pollution, cigarettes, mégots.

©Génération Sans Tabac

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Comité national contre le tabagisme |

Publié le 30 mai 2023