Snapchat visé par des médecins néerlandais pour la vente illégale de vapes
15 juin 2025
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 11 juin 2025
Temps de lecture : 5 minutes
Des médecins et des organisations de santé publique néerlandaises ont adressé une mise en demeure au réseau social Snapchat, accusé de faciliter la vente illégale de produits de vapotage aromatisés via sa plateforme. Cette initiative s’inscrit dans une mobilisation croissante contre la prolifération de produits nicotinés accessibles aux mineurs sur les réseaux sociaux.
Des ventes illégales largement répandues via Snapchat
Aux Pays-Bas, Snapchat est devenu un canal privilégié pour la vente illicite de produits de vapotage, en particulier des cigarettes électroniques jetables aromatisées appelées « puffs ». Ces produits, très populaires chez les adolescents, sont proposés à la vente par des comptes anonymes qui contournent la législation nationale et ciblent directement les jeunes consommateurs via des contenus attractifs et codés.
Depuis janvier 2024, les arômes dans les e-liquides autres que le goût tabac sont interdits aux Pays-Bas, conformément à la politique nationale de lutte contre le tabagisme visant à réduire l’attractivité du vapotage chez les jeunes. Par ailleurs, les dispositifs de vapotage jetables sont également interdits à la vente, car ils sont considérés à la fois comme nocifs pour la santé publique et particulièrement polluants. Ces mesures réglementaires placent les Pays-Bas parmi les pays européens les plus stricts en matière de contrôle des produits de vapotage.
Malgré ces interdictions, une multitude de comptes sur Snapchat continuent de proposer à la vente des produits prohibés : puffs aromatisés à la fraise, à la pastèque, ou encore à la barbe à papa, souvent contenant des taux élevés de nicotine, bien au-delà de la limite européenne fixée à 20 mg/ml. Les vendeurs s'adressent directement aux jeunes via des stories, des images colorées, des emojis, ou des publications en langage crypté, rendant leur détection difficile pour les systèmes automatisés de modération de la plateforme.
Les produits sont souvent livrés dans des délais très courts, parfois dans la journée, via des services de livraison informels ou des points de rendez-vous, sans aucune vérification d’âge. Il s’agit d’une vente totalement illégale, qui échappe à tout contrôle sanitaire, fiscal et réglementaire. Certains dispositifs saisis ou achetés à titre de tests ne comportent aucun avertissement sanitaire, ni élément de traçabilité, et sont soupçonnés de contenir des substances non déclarées.
La Dutch Youth Smoking Prevention Foundation, qui a documenté ces pratiques à grande échelle, souligne l’inaction persistante de Snapchat, malgré de nombreux signalements et le caractère manifeste de violation de ses propres conditions d’utilisation. Selon l’organisation, des dizaines de comptes illégaux restent actifs chaque jour, contribuant à normaliser l’usage de la nicotine chez les mineurs et sapant les efforts de santé publique menés au niveau national.
Une situation préoccupante pour la protection des jeunes
La vente illicite de produits de vapotage via Snapchat révèle les limites des dispositifs actuels d’encadrement des plateformes numériques face à des pratiques commerciales clandestines qui ciblent directement les adolescents. Cette situation constitue une menace sérieuse pour la santé publique, d’autant plus préoccupante dans un contexte où les jeunes représentent une cible privilégiée de l’industrie de la nicotine.
Les professionnels de santé et les organisations de prévention rappellent que les produits de vapotage, notamment les puffs aromatisées, sont conçus pour séduire les jeunes consommateurs : arômes sucrés, design coloré, formats discrets et usage facile. Leur diffusion illégale sur Snapchat ou sur d’autres réseaux sociaux contourne non seulement les interdictions en vigueur, mais banalise l’exposition précoce à la nicotine, une substance hautement addictive dont les effets sur le cerveau en développement sont bien documentés.
Dans la mise en demeure adressée à Snap Inc., la Dutch Youth Smoking Prevention Foundation et plusieurs médecins demandent la suppression immédiate des comptes identifiés comme vendeurs illégaux de produits de vapotage[1]. Ils appellent également à la mise en place de mécanismes de signalement plus efficaces et accessibles, à un renforcement du contrôle des contenus promouvant des produits interdits, ainsi qu’à un engagement clair et public de la plateforme pour protéger les mineurs, assorti d’un plan d’action concret. À défaut de réponse satisfaisante, les signataires menacent de porter l’affaire en justice auprès de l'Autorité néerlandaise pour les consommateurs et les marchés (ACM) et auprès de la Commission européenne afin de contraindre Snapchat à agir[2].
Enfin, cette affaire illustre une dynamique plus large : l’adaptabilité constante de l’industrie du tabac et de la nicotine, qui investit de nouveaux espaces numériques pour promouvoir ses produits, malgré les interdictions. En misant sur des canaux peu surveillés, comme les messageries éphémères et les réseaux utilisés par les plus jeunes, ces stratégies compromettent les avancées de santé publique et soulignent l’urgence d’étendre et surtout d’appliquer la réglementation à l’écosystème numérique dans son ensemble.
AE
[1] Communiqué, Doctors demand action from Snapchat against vape dealers, Youth Smoking Prevention, publié le 10 juin 2025, consulté le 11 juin 2025
[2] Dutch doctors threaten legal action against snapchat over illegal vape sales, NL Times, publié le 10 juin 2025, consulté le 11 juin 2025
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