Sénégal : le Cicodev réclame un meilleur financement de la lutte antitabac
9 février 2023
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 9 février 2023
Temps de lecture : 4 minutes
Au Sénégal, l’institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (Cocidev Afrique) mène actuellement une campagne de communication et de plaidoyer en vue d’augmenter la fiscalité sur le tabac. Le Cicodev pointe le fardeau que pèse le tabagisme sur les finances publiques sénégalaises, et le manque de moyens alloués à la santé publique.
L’institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement propose la création d’une taxe parafiscale sur les produits du tabac qui soit directement affectée au financement de la santé publique sénégalaise en général, et de la lutte contre le tabagisme et les maladies non transmissibles en particulier[1].
Un budget insuffisant consacré à la santé
Selon le Cicodev, seul 4,7% du budget de l’Etat au Sénégal est consacré à la santé publique, loin derrière les 15% recommandés lors de la Déclaration d’Abuja, plus de vingt ans auparavant, au moment d’une prise de conscience des pouvoirs publics africains de renforcer les moyens alloués à la lutte contre le Sida, le paludisme, ou la tuberculose. Toutefois, le Sénégal n’est pas le seul pays d’Afrique dans cette situation d’insuffisance, puisqu’à la fin de l’année 2020, seuls deux Etats avaient atteint cet objectif de consacrer 15% du budget à la santé[2].
Le tabagisme, un coût majeur pour les pouvoirs publics
Selon une étude menée par le Consortium pour la recherche économique et sociale (CRES), un think tank basé à Dakar, le coût social du tabagisme est estimé à 122 milliards de francs CFA (185 millions d’euros) par an pour la société sénégalaise, dont 74 milliards pour les seuls coûts de santé. A titre de comparaison, les recettes fiscales associées aux produit du tabac représentent 24 milliards de francs CFA annuels (36 millions d’euros), soit un déficit de 98 milliards (149 millions d’euros). Malgré le fardeau économique que représente la consommation tabagique au Sénégal, le ministère de la Santé ne consacre que 25 millions de francs CFA par an, soit moins de 40 000 euros.
La forte ingérence de l’industrie du tabac au Sénégal
A la fin de l’année 2021, la Ligue sénégalaise contre le tabac avait déjà exhorté le Ministère de la Santé du Sénégal à augmenter sensiblement la fiscalité sur les produits du tabac, dans un double objectif de réduire la prévalence tabagique de 10% et d’abonder un fonds de financement de la lutte contre le tabagisme.
La Ligue sénégalaise alertait également les pouvoirs publics sur la nécessité de lutter contre le lobbying de l’industrie du tabac, qui voit dans les pays en voie de développement un nouveau marché, permettant de compenser le déclin de la consommation, enclenché depuis plusieurs décennies dans les pays industrialisés. Malgré l’adoption en 2014 d’une loi interdisant par principe tout contact entre les autorités publiques et l’industrie du tabac, le Sénégal n’échappe pas complètement aux tentatives d’ingérence de la part des fabricants. Ainsi, en 2021, un décret permettait au Sénégal d’adopter le système Codentify de traçabilité des produits du tabac, alors que celui-ci émane directement des cigarettiers, dont l’implication dans le commerce illicite est pourtant établie.
Un dispositif réglementaire élaboré au Sénégal
Malgré les faiblesses de financement, le Sénégal demeure toutefois un des pays d’Afrique les plus en pointe en matière de lutte contre le tabagisme. Ces dernières années, le pays a considérablement renforcé sa réglementation pour lutter contre l’épidémie tabagique. Ainsi, depuis 2016, le pays a interdit la consommation de produits du tabac dans les lieux publics, la vente aux mineurs, ou encore la commercialisation de tabac à moins de 200 mètres d’une école ou d’un hôpital. De la même manière, la réglementation proscrit la vente de cigarettes à l’unité et toute forme de publicité, directe comme indirecte, en faveur du tabac. Enfin, 70% de la surface des paquets de tabac sont désormais recouverts d’avertissements sanitaires (image et texte), montrant les risques que le tabagisme fait peser sur la santé.
Mots-clés : Sénégal, Afrique, Fiscalité, Lobbying ©Génération Sans TabacFT
[1] Agence de Presse Sénégalaise (APS), Une campagne de Cicodev Afrique pour la création d’une taxe parafiscale dédiée au financement de la santé, 07/02/2023, (consulté le 08/02/2023)
[2] Afrique Renouveau, Financement public de la santé en Afrique : 15 % d'un éléphant n'est pas 15 % d'un poulet, 10/2020, (consulté le 08/02/2023)
Comité national contre le tabagisme |