République tchèque : progression de la proportion de fumeurs atteints de troubles psychiques
3 septembre 2023
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 3 septembre 2023
Temps de lecture : 4 minutes
Une étude de cohorte indique que la proportion de fumeurs présentant des troubles psychiques consultant dans un centre de sevrage tabagique de Prague a augmenté de 4 % par an depuis 2011, les femmes étant davantage touchées. L’arrêt du tabac entraîne une amélioration de leur état psychique.
Différentes études ont montré que les personnes présentant des troubles psychiques sont plus souvent fumeuses que la population générale, fument plus de cigarettes par jour, et présentent une plus forte dépendance à la nicotine ; elles ont davantage de difficulté à maintenir le sevrage tabagique dans la durée, et, au cours des années, leur nombre diminue moins rapidement que celui des autres fumeurs.
Une équipe de chercheurs tchèques s’est penchée sur les caractéristiques de cette population de fumeurs parmi les consultants du Centre de traitement de la dépendance tabagique de l’Hôpital général universitaire de Prague depuis sa création en 2005[1].
Une étude portant sur l’ensemble des patients d’un centre d’arrêt du tabac
Les données des années 2005, 2020 et 2021n’ont pas été prises en compte car considérées comme atypique, de même que celles concernant les fumeurs dont les données étaient incomplètes. Au total, à partir des 7498 dossiers disponibles, la population retenue pour analyse était de 6546 fumeurs.
Lors de leur consultation initiale, le questionnaire de Beck Depression Inventory (BDI-II) a été administré à chaque fumeur, et 1743 d’entre eux (26,6 %) ont auto-déclaré un trouble psychique (anxiété, état dépressif, trouble bipolaire, schizophrénie), présent ou passé.
Une prépondérance de troubles psychiques chez les femmes
Alors que les patients consultant au CTDT de Prague étaient pour 48 % des femmes et 52 % des hommes, l’existence de troubles psychiques était déclarée par 34,2 % des femmes et 19,6 % des hommes. Au total, parmi les personnes déclarant des troubles psychiques, 62 % étaient des femmes et 38 % des hommes, suggérant que les femmes fumeuses sont davantage sujettes aux troubles psychiques. La proportion de fumeurs déclarant des troubles psychiques est passée de 23 % en 2006 à 35 % en 2019, avec une augmentation annuelle de ce pourcentage depuis 2011 d’environ 4 %.
Dans la population tchèque, la prévalence tabagique globale est passée de 31 % en 2004 à 24 % en 2021, et la prévalence de troubles psychiques était évaluée à 29,6 % en 2020, avec une nette augmentation à la suite du premier confinement, par comparaison avec 2017 (20 %)[2]. Ainsi, le taux de personnes présentant des troubles psychiques était plus élevé chez les fumeurs consultant dans ce centre que dans la population générale.
Les chercheurs n’ont pas observé de différence entre les fumeurs selon qu’ils présentaient des troubles psychiques ou non concernant le nombre de cigarettes fumées par jour et les taux de monoxyde de carbone (CO) mesurés dans l’air expiré. En revanche, les patients déclarant des troubles psychiques avaient des scores plus élevés au test de Fagerström mesurant la dépendance tabagique.
Une nette amélioration des états dépressifs était observée chez les fumeurs déprimés ayant arrêté et maintenu leur abstinence sur une année.
Envisager une systématisation de la prise en charge tabacologique
Vue l’augmentation du nombre de fumeurs déclarant des troubles psychiques, et vue l’efficacité de l’arrêt du tabac sur certains d’entre eux, les auteurs de l’étude concluent sur la nécessité de ne pas négliger les demandes de ces fumeurs et de leur proposer des prises en charge adaptées et plus intensives. Ils suggèrent également, à l’instar d’une étude de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) sur les stratégies de sortie du tabagisme (Tabatraj)[3], d’inclure plus systématiquement la prise en charge tabagique dans les soins en psychiatrie.
Mots-clés : République tchèque, sevrage tabagique, troubles psychiques, prévalence.
©Génération Sans TabacMF
[1] Zvolska, K., Tichopad, A., Stepankova, L. et al. Increasing prevalence of mental disorders in smokers seeking treatment of tobacco dependence: a retrospective observational study. BMC Psychiatry, 23, 621 (2023). https://doi.org/10.1186/s12888-023-05115-x
[2] Winkler P, Formanek T, Mlada K, Kagstrom A, Mohrova Z, Mohr P, Csemy L. Increase in prevalence of current mental disorders in the context of COVID-19: analysis of repeated nationwide cross-sectional surveys. Epidemiol Psychiatr Sci. 2020 Sep 29;29:e173. doi: 10.1017/S2045796020000888. PMID: 32988427; PMCID: PMC7573458.
[3] Rivierez I, Les sorties du tabagisme, un état de la littérature en sciences sociales, OFDT, rapport, juillet 2023, 40 p.
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