Le programme de prévention Tabado cible les apprentis et les lycéens professionnels
2 juin 2021
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 2 juin 2021
Temps de lecture : 5 minutes
Une étude indique la pertinence du programme Tabado, qui alterne des séances de sensibilisation, des consultations d’aide à l’arrêt du tabac et des ateliers motivationnels, au sein des établissements de l’enseignement technique et professionnel.
Initié par l’Université de Lorraine et le CHU de Nancy, le programme Tabado a été testé de 2007 à 2009 dans huit centres de formation des apprentis (CFA) et a été déclaré probant. Sur l’année scolaire 2019-2020, il a été déployé auprès de 142 établissements de douze régions (dont une d’Outre-Mer), en étant financé par le Fonds de lutte contre les addictions et coordonné par l’Institut national du cancer.
Une population plus fumeuse que les autres jeunes
Le programme Tabado s’adresse aux jeunes apprentis et lycéens professionnels, plus souvent consommateurs de tabac et qui ont moins de perceptions négatives des produits de tabac. Il propose non seulement des séances de sensibilisation sur le tabac et le sevrage, mais aussi des consultations individuelles d’aide à l’arrêt du tabac et jusqu’à quatre ateliers motivationnels de groupe, le tout au sein des établissements scolaires. Le questionnaire rempli en début de session par près des deux tiers des participants (63%, soit 34 669 réponses) a permis de dresser un portrait plus affiné de cette population, qui confirme l’intérêt de ce programme [1].
L’analyse des questionnaires révèle que les apprentis et les lycéens professionnels sont sensiblement plus souvent fumeurs que la moyenne des individus de leur âge. Ils sont plus nombreux à avoir expérimenté des produits du tabac (64% contre 59%), à être fumeurs quotidiens (27% contre 25%), et à avoir une consommation de plus de dix cigarettes/jour (9% contre 5%) [2]. Plus de la moitié (54%) des fumeurs ont déclaré avoir essayé au moins une fois d’arrêter de fumer, dont 26% deux ou trois fois et 13% plus de trois fois. Les tentatives d’arrêt du tabagisme sont plus fréquentes chez les fumeurs occasionnels que chez les fumeurs quotidiens ayant une consommation élevée. Les apprentis sont nettement plus consommateurs que les lycéens professionnels, que ce soit en termes de tabagisme quotidien (+20%) ou de quantité fumée (+10%) ; ils affichent aussi une moins forte intention d’arrêt du tabac. L’âge est un facteur d’augmentation du tabagisme quotidien, qui devient plus important à partir de 17 ans.
Des modes variés de consommation et de poly-consommation
L’usage de la chicha est très répandu dans cette population (36% en ont utilisé dans le mois), notamment par les fumeurs consommant plus de 10 cigarettes par jour (64% d’usage de chicha dans le mois).
La consommation de tabac de ces jeunes est également couramment associée à d’autres consommations. L’usage de la cigarette électronique est plus important chez ces élèves et apprentis que pour la moyenne des autres jeunes (10% contre 2%).
Parmi les fumeurs quotidiens, on constate une consommation conjointe de produits du tabac et de cigarettes électroniques plus fréquente : 30% d’usage régulier de cigarettes électroniques, 64% d’usage récent).
La consommation de tabac est, dans une proportion non négligeable, associée aux usages réguliers de cannabis (30% d’usage régulier chez les fumeurs quotidiens) et d’alcool.
Un programme qui reste à adapter à sa population
Les données de cette étude permettent d’envisager un ciblage plus précis des interventions : les séances de prévention sont adaptées à tous les publics mais les consultations individuelles gagneraient à se tourner vers les élèves et apprentis à partir de 17 ans. Les différents modes de consommation de tabac devraient être mieux pris en compte, tout comme les usages associés d’alcool ou de cannabis. Les intervenants devront aussi être en capacité d’apporter des réponses claires face à ces poly-consommations et à leur évolution.
Les prochaines évaluations du programme Tabado devraient permettre de mieux mesurer son efficacité en matière de sevrage tabagique. Il faudra pour cela développer une méthodologie plus adaptée aux caractéristiques de cette population afin de favoriser l’accès de ces jeunes aux soins. Sensibiliser ces jeunes aux stratégies commerciales de l’industrie du tabac qui les ciblent spécifiquement pourrait aussi contribuer à réduire l’impact des disparités sociales. L’implantation de ce programme dans les établissements scolaires est a priori louable, pour peu que les établissements commencent par faire respecter les interdictions de fumer auxquelles ils sont tenus.
Mots-clés : Tabado, jeunes, apprentis, prévention ©Génération Sans Tabac[1] Cathelineau F, Le Tyrant M, Audran M, Jeannin C, Deutsch A. Tabado, un programme pertinent d’accompagnement des lycéens professionnels et apprentis à l’arrêt du tabac développé en milieu scolaire. Bull Epidémiol Hebd. 2021;(8):148-54. [2] Le Nézet O, Janssen E, Brissot A, Philippon A, Shah J, Chyderiotis S, et al. Les comportements tabagiques à la fin de l’adolescence. Enquête Escapad 2017. Bull Epidémiol Hebd. 2018;(14-15):274-82. Comité National Contre le Tabagisme |