L’usage des pipes à eau favorise l’apparition du cancer du nasopharynx
6 septembre 2023
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 6 septembre 2023
Temps de lecture : 4 minutes
Une étude de cohorte vietnamienne a mis en lumière une nette incidence de l’usage des pipes à eau dans l’apparition du cancer du nasopharynx
Le nasopharynx correspond à la partie du pharynx située justes derrière le nez. Le cancer du nasopharynx est assez rare dans le monde, de l’ordre d’un cas pour 100 000 habitants, avec un taux d’incidence deux à trois fois plus important chez les hommes que chez les femmes. Ce type de cancer est particulièrement présent en Asie (85 % des cas), notamment dans le sud de la Chine et la région de Canton, mais est aussi signalé en Asie du Sud-Est, en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et dans la région arctique. Au Vietnam, il constitue la neuvième cause de cancer la plus répandue, 6040 nouveaux cas étant apparus en 2020.
Plusieurs facteurs de risque de ce cancer ont été identifiés, dont le fait d’être un homme, d’ethnie cantonnaise, porteur du virus Epstein-Barr (EBV) ou d’antigènes des leucocytes humains, d’avoir des antécédents familiaux, de consommer beaucoup de poisson fumé mais peu de légumes ou de fruits frais, et de fumer.
La consommation de tabac sous forme de pipe à eau représentant 30,9 % des fumeurs au Vietnam, une équipe de chercheurs vietnamiens a tenté de distinguer ce risque de celui des autres produits du tabac fumés[1].
Une étude de cohorte conduite sur douze ans
Les chercheurs ont mis sur pied une étude de cohorte incluant 52 325 individus provenant de neuf communes du Nord du Vietnam, sur une période de douze ans, entre 2007 et 2019. Après exclusion des femmes – qui ne représentaient que 1,9 % des fumeurs –, des enfants de moins de 10 ans et des personnes ayant déménagé, l’étude a retenu 20 144 participants masculins et a analysé 39 cas de décès par cancer du nasopharynx.
Les fumeurs exclusifs de cigarettes (16,6 %) ont été distingués des fumeurs exclusifs de pipe à eau (14,5 %) et des fumeurs de ces deux produits (13,1 %). Les ex-fumeurs étaient eux-mêmes distingués des personnes n’ayant jamais fumé (55,8 %) et qui constituaient le groupe témoin. Des questionnaires passés en face-à-face évaluaient le mode de consommation du tabac, mais aussi les données sociodémographiques, les habitudes alimentaires, les modes de cuisson et la consommation d’alcool.
Une nette incidence des pipes à eau dans l’apparition de ce cancer
Les résultats font apparaître une nette surmortalité par cancer du nasopharynx chez les utilisateurs exclusifs de pipe à eau, et un risque plus marqué mais non significatif chez les utilisateurs duels de cigarettes et de pipe à eau. Avoir commencé à fumer avant 21 ans était également un facteur aggravant, de même que la durée du tabagisme, son intensité et les quantités de tabac fumées au cours de la vie. L’usage exclusif de cigarettes semblait en revanche n’avoir qu’un rôle limité dans l’apparition de ce type de cancer. L’infection au virus Epstein-Barr, facteur de risque important dans le développement du cancer du nasopharynx, s’expliquerait de son côté par le partage des pipes à eau, comme l’ont pointé des travaux de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)[2].
Les auteurs estiment ainsi que le cancer du nasopharynx serait un risque spécifiquement lié à l’usage de la pipe à eau, aux côtés d’autres risques déjà démontrés pour ce type de consommation de tabac : cancers de la bouche, de l’œsophage, de la vessie, du poumon, risque cardiovasculaire et bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO). Les concentrations de toxines tels l’arsenic, le chrome ou le plomb dans l’aérosol des pipes à eau expliqueraient, selon eux, cette toxicité encore plus importante que celle des cigarettes, alors que les pipes à eau sont généralement perçues comme moins toxiques par leurs usagers.
Mots-clés : Vietnam, cancer du nasopharynx, pipe à eau, EBV.
©Génération Sans TabacMF
[1] Nguyen, T.G., Kieu, H.D., Truong, D.T.T. et al. Exclusive waterpipe smoking and the risk of nasopharynx cancer in Vietnamese men, a prospective cohort study. Sci Rep 13, 13237 (2023). https://doi.org/10.1038/s41598-023-40253-y
[2] Meleigy M, Waterpipe and communicable diseases link, says WHO. Lancet Infect. Dis. 7(7), 448. https://doi.org/10.1016/S1473-3099(07)70150-0.
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