Le Kenya confirme son rejet du nouveau produit « Lyft » de BAT
6 avril 2021
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 6 avril 2021
Temps de lecture : 4 minutes
La branche kenyane de British American Tobacco (BAT) a lancé en juillet 2019 des pochettes de nicotine sans tabac dénommées Lyft, qui ont connu un grand succès auprès des jeunes[1]. Les pressions exercées par BAT pour réintroduire ces produits sur le marché kenyan après leur interdiction illustrent les pratiques du fabricant et la stratégie plus globale de l’industrie du tabac pour renouveler et développer ses marchés.
Lyft est un des nouveaux produits du cigarettier BAT, présenté comme un substitut de la cigarette et décliné en plusieurs arômes fruités. Commercialisé sous forme de petites pochettes à sucer, ce produit de nicotine sans tabac a été vendu durant un an dans les supermarchés, les petits commerces et sur Internet. Son succès rapide auprès des jeunes et sa mise sur le marché illégale ont conduit le gouvernement kenyan à en suspendre la vente un an plus tard, en septembre 2020.
BAT a en effet commercialisé sans autorisation préalable ses produits Lyft en juillet 2019, en visant sans détour le marché des jeunes et des mineurs. Ce fabricant a pour cela obtenu un accord de mise en vente délivré par le Bureau de la Pharmacie et des Poisons, et reconnu depuis comme illégal par le gouvernement.
Pressions sur le gouvernement kenyan
Pour tenter de réintroduire ces produits, BAT a exercé de nombreuses pressions sur le gouvernement afin qu’ils ne soient pas considérés – et surtout réglementés et taxés – comme des produits du tabac. Le 29 mars 2021, le fabricant a renouvelé ces pressions afin d’être rapidement autorisé à remettre en vente ces produits, à en assurer la publicité et à en écouler 400 000 boîtes avant leur date de péremption. Les acteurs de santé de la société civile ont alors pointé les nombreuses relations entre le Ministère de la Santé et le fabricant depuis que ces produits avaient été déclarés illégaux[2].
Les associations locales de lutte contre le tabagisme ont alerté les autorités sur les risques liés à la vente de ce produit susceptible de mettre à mal le programme de lutte antitabac. « Ce produit ne devrait même pas se trouver sur le marché. Nous ne devons pas récompenser un fabricant de tabac en l’autorisant à vendre un produit illégal », a déclaré un représentant de l’Alliance pour le Contrôle du Tabac au Kenya (KETCA) pointant les fabricants qui pensent pouvoir s’affranchir des lois.
La réduction des risques, nouveau cheval de bataille de l’industrie
Les actions de BAT menées au Kenya pour commercialiser le Lyft sont caractéristiques des agissements illégaux de l’industrie du tabac et de sa stratégie actuelle en matière de nouveaux produits. Dans le cas présent, il s’agit d’introduire sur le marché un nouveau produit en dehors de tout cadre légal, en tentant de le démarquer des autres produits de tabac et en faisant pression sur le gouvernement pour obtenir des dérogations de vente, le tout après avoir vendu ce produit à des mineurs et avoir obtenu illégalement l’accord d’une agence gouvernementale.
L’un des principaux arguments avancés par BAT pour être autorisé à faire de la publicité pour ces produits sans tabac était d’informer les fumeurs de cigarettes et de les attirer vers des produits supposés moins nocifs. Cette stratégie dite de « réduction des risques », similaire à celle des dispositifs de tabac chauffé, cherche à faire croire que l’industrie s’ingénie à mettre au point des produits moins nocifs pour la santé. Les documents internes des industriels montrent que, contrairement à leurs déclarations, les fabricants n’ont aucune intention de renoncer aux profits des cigarettes, qui continuent et continueront d’être mises en vente. Les nouveaux produits à base de nicotine sont surtout là pour conquérir de nouveaux consommateurs et pour maintenir l’addiction de ceux qui voudraient sortir du tabagisme[3]. L’utilisation d’arômes fruités pour attirer les consommateurs les plus jeunes est l’un des stratagèmes classiques de l’industrie du tabac.
Mots clés : Kenya, Lyft, BAT, nouveaux produits Crédit photo : Nairobi Stocks Review ©Génération Sans Tabac[1] Génération Sans Tabac, BAT utilise ses nouveaux produits pour affaiblir la lutte anti-tabac au Kenya, 8 octobre 2020, consulté le 2 avril 2021 [2] Sharon Maombo, Health ministry asked to reject return of nicotine pouch Lyft to Kenyan market, The Star, 31 mars 2021, consulté le 2 avril 2021 [3] Tobacco Tactics, IQOS Use, “Switching” and “Quitting”: The Evidence, dernière mise à jour le 29 octobre 2020, consulté le 2 avril 2021 Comité National Contre le Tabagisme |