Angleterre : l’aide à l’arrêt du tabac, une priorité pour les autorités locales

23 décembre 2024

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 20 décembre 2024

Temps de lecture : 6 minutes

Angleterre : l’aide à l’arrêt du tabac, une priorité pour les autorités locales

La dernière enquête annuelle menée par Action on Smoking and Health (ASH) et Cancer Research UK auprès des autorités locales britanniques a révélé une hausse importante des services d'aide à l'arrêt du tabac gérés par les autorités locales à la suite d'investissements financiers importants. Pour la première fois depuis le transfert de la santé publique aux autorités locales il y a dix ans, toutes les autorités locales interrogées ont mis en place un service d'aide au sevrage tabagique, apportant un soutien essentiel aux personnes désireuses d'arrêter de fumer.

Le rapport ASH-CRUK 2024 met en lumière les avancées impressionnantes réalisées dans la lutte contre le tabagisme en Angleterre. L’engagement croissant des autorités locales, soutenu par des investissements gouvernementaux stratégiques, laisse entrevoir des progrès durables pour parvenir à une génération sans tabac dans les prochaines années. Toutefois, pour que ces efforts portent leurs fruits, il est essentiel d’assurer un financement stable et d’adopter une approche coordonnée à l’échelle nationale[1].

Les données les plus récentes indiquent que 11,6% des adultes de plus de 18 ans sont fumeurs en Angleterre, un chiffre en baisse chaque année depuis 2011.

Le contrôle du tabac, une priorité pour la grande majorité des autorités locales

L’investissement de 70 millions de livres sterling du gouvernement a permis une expansion majeure des services d'arrêt du tabac. Pour la première fois en une décennie, toutes les autorités locales interrogées ont mis en place un service d'arrêt du tabac, dont 89 % disposent désormais d’un service spécialisé, contre seulement 72 % en 2023. Cette progression a également conduit à une meilleure accessibilité des services pour les populations vulnérables, notamment grâce à des campagnes ciblées et au développement de nouveaux points d'accès dans des zones défavorisées.

Le rapport souligne une prise de conscience accrue parmi les autorités locales, avec 88% des municipalités considérant désormais le contrôle du tabac comme une priorité élevée, contre 54 % en 2023. Cette évolution est soutenue par la création de nouvelles alliances locales et régionales de contrôle du tabac, favorisant une approche collaborative. Par exemple, dans certaines régions comme le Nord-Est de l'Angleterre et le Grand Manchester, ces partenariats ont permis d’accélérer la réduction de la prévalence du tabagisme.

Au total, près de 50 % des autorités locales ont signalé une augmentation de la demande pour leurs services d’arrêt du tabac en 2024.

Cibler les populations vulnérables

Les fonds alloués ont permis d’intensifier les efforts pour atteindre les groupes où la prévalence du tabagisme reste élevée. Les zones à forte précarité économique ont été les principales cibles, avec 90 % des autorités locales concentrant leurs efforts sur ces zones. Les femmes enceintes et leurs partenaires ont également bénéficié de campagnes et de services spécifiques, tout comme les personnes ayant des problèmes de santé mentale ou vivant dans des logements sociaux. A cette fin des conseillers spécialisés ont été recrutés.

Un des programmes phares, « Swap to Stop », encourage les fumeurs à passer aux cigarettes électroniques. Adopté par 93 % des autorités locales, ce programme cible particulièrement les femmes enceintes, les personnes souffrant de troubles mentaux, et les populations défavorisées.

En outre, plusieurs autorités ont mis en place des services pour les jeunes, face à l'augmentation des taux de vapotage dans cette tranche d'âge. 57 % des autorités offrent des programmes d'arrêt du vapotage spécifiques pour les jeunes.

« L’objectif est d’adapter les services pour qu’ils soient culturellement appropriés et accessibles à ceux qui en ont le plus besoin, tout en co-créant des solutions avec les communautés elles-mêmes », souligne un représentant du Westminster City Council.

Bien que ces initiatives aient conduit à une augmentation de la demande pour les services d’arrêt du tabac dans près de la moitié des collectivités locales, le recrutement rapide de personnel qualifié et la garantie d’un financement durable au-delà de la première année demeurent des préoccupations majeures.

Des financements incertains qui menacent les progrès réalisés

Le gouvernement actuel s'est engagé à maintenir le financement supplémentaire pour les services d'aide à l'arrêt du tabac et l'application de la loi pour le prochain exercice financier (2025/26). Toutefois, l'incertitude plane sur le statut de la subvention locale de santé publique (qui contribue à la moitié du coût des services locaux d'aide au sevrage tabagique), du programme « swap to stop » et des programmes nationaux tels que les incitations financières pendant la grossesse, les campagnes médiatiques et l'investissement dans les services par l'intermédiaire du National Health Service (NHS). Les autorités locales ont indiqué que l'absence de certitude quant au financement à long terme a rendu le recrutement, la planification et la mise en service difficiles, mettant en péril les services d'aide au sevrage tabagique.

ASH précise que le gouvernement pourrait limiter davantage la charge sur les finances publiques en levant les fonds nécessaires par le biais d'une taxe « pollueur-payeur » sur les fabricants de tabac.

Se protéger de l’ingérence de l’industrie du tabac

Il a été demandé aux personnes interrogées dans le cadre de l'enquête s'il existait au sein de leurs autorités locales des politiques limitant les relations de leurs fonctionnaires ou de leurs membres avec des représentants des industries du tabac, de l'alcool et de l'alimentation. Bien que des politiques restreignant ces relations avec l'industrie du tabac aient été signalées dans 45% des collectivités locales interrogées, 39% des répondants ne savaient pas si une telle politique existait et les 16% restant n’avaient aucune politique.

Les auteurs du rapport demandent que toutes les autorités locales élaborent de telles politiques destinées à limiter les interactions avec le secteur tabac à ce qui est strictement nécessaire et dans des conditions de transparence excluant par ailleurs tout accord volontaire ou convention avec ce secteur. Ces dispositions s’appliquent aussi bien aux responsables politiques élus qu’aux personnels et collaborateurs. L'Association des collectivités locales a publié un guide à l'intention des collectivités locales pour les aider à remplir leurs obligations au titre de l'article 5.3 de la convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac.

©Génération Sans Tabac

AE


[1] Communiqué, Survey shows funding uncertainty threatens progress on smoking, ASH, publié le 17 décembre 2024, consulté le 20 décembre 2024

Comité national contre le tabagisme |

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