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L’usage de la chicha faciliterait le passage au tabagisme des jeunes n’ayant jamais fumé

Une méta-analyse pointe l’influence de la chicha dans la susceptibilité de devenir fumeur chez les adolescents et les jeunes adultes n’ayant jamais fumé, et propose quelques pistes pour y parer.

L’explication des facteurs concourant à l’installation du tabagisme reste un large champ d’études. Parmi ces facteurs, l’effet passerelle entre les différents produits du tabac et de la nicotine est notamment étudié, mais peu de données sont disponibles sur les usages de la chicha (pipe à eau ou narghilé). S’appuyant sur les résultats de six études, une méta-analyse d’une équipe de chercheurs chinois a exploré les relations entre usages de la chicha et de cigarettes chez les adolescents et les jeunes adultes n’ayant jamais fumé[1].

Une susceptibilité de devenir fumeur deux fois plus importante chez les expérimentateurs de chicha

Cette méta-analyse s’appuie sur une base totale de 59 710 participants, dont 3559 avaient au moins expérimenté la chicha. Des six études considérées, deux ont été conduites dans des pays arabes, trois aux Etats-Unis et une en Chine. Quatre d’entre elles portaient sur les adolescents, tandis que deux se concentraient sur les jeunes adultes, les âges des participants s’étendant au final entre 13 et 29 ans. Les six études incluaient des questions prospectives explorant la susceptibilité de devenir fumeur.

Les résultats indiquent que la susceptibilité de devenir fumeur serait deux fois plus importante chez les non-fumeurs ayant expérimenté la chicha que chez ceux ne l’ayant jamais expérimentée. Les auteurs font ici l’hypothèse que l’exposition et la dépendance à la nicotine, issues des premières expérimentations de chicha, faciliteraient le passage aux cigarettes classiques. Les concentrations de nicotine, plus importantes dans la fumée de chicha que dans celle des cigarettes classiques, et la plus forte réactivité à la nicotine des jeunes cerveaux pourraient renforcer encore les mécanismes de dépendance. L’exposition au tabagisme passif, connue pour être un facteur d’initiation et de dépendance à la nicotine, est, elle aussi, plus conséquente avec la chicha et pourrait expliquer cette plus forte disposition à devenir fumeur.

Les facteurs culturels et sociaux pourraient aussi intervenir

Cette susceptibilité de devenir fumeur étant plus importante chez les consommateurs réguliers de chicha et dans les études portant sur les pays arabes, les auteurs admettent toutefois que d’autres facteurs, notamment liés au mode d’utilisation et au contexte culturel, pourraient également intervenir. Bien qu’elle semble évidente, cette dernière piste est souvent négligée dans les travaux scientifiques, alors que l’influence sociale et l’identification aux pairs sont des facteurs également bien connus de l’initiation tabagique[2].

La limite majeure de cette méta-analyse est qu’elle porte sur la susceptibilité de devenir fumeur de cigarettes et non pas sur les fumeurs réels bien qu’il y ait de fortes corrélations entre ces deux situations. Les auteurs appellent à d’autres études auprès des personnes n’ayant jamais fumé pour corroborer ces résultats et suggèrent de mieux intégrer la chicha dans les politiques de santé publique.

Mots-clés : chicha, jeunes, effet passerelle

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Yu Z, Wang M, Fu J, Association between waterpipe use and susceptibility to cigarette smoking among adolescents and young adults who never smoked: A systematic review and meta-analysis, Tob. Induc. Dis. 2023;21(February):29.

[2] Spach, M. (2016). L’influence du groupe de pairs sur la consommation de substances psychoactives licites et illicites à l’adolescence. Revue Jeunes et Société, 1(1), 57–82. https://doi.org/10.7202/1076136ar

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 25 février 2023