Actualités

indonesie-cclat-oms-lutte-antitabac

Indonésie : la ratification de la Convention-Cadre permettrait de diminuer la prévalence tabagique

La lutte antitabac en Indonésie pourrait progresser avec la mise en œuvre de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) de l’OMS. Le pays est actuellement le seul de la région Asie-Pacifique à ne pas l’avoir ratifiée en raison du fort lobby de l’industrie du tabac. Une récente étude[1] présente des preuves empiriques contrant les arguments de l’industrie sur les conséquences économiques négatives qu’aurait l’adoption du traité.

En comparant l’Indonésie qui n’a pas ratifié le traité de l’OMS la CCLAT, à d’autres pays aux économies proches (Bangladesh, Brésil et Pakistan) parties à ce traité, on constate une différence dans la prévalence du tabagisme après l’entrée en vigueur de celui-ci. Le Bangladesh a ratifié la CCLAT en 2004, tandis que le Pakistan et le Brésil l’ont ratifiée en 2005. Les taux globaux de tabagisme ont régulièrement diminué dans ces trois pays depuis 2007, alors que sur la même période, la prévalence du tabagisme en Indonésie n’a diminué que de 1,4 %. Au Bangladesh la prévalence globale est passée de 45,5% en 2007 à 39,1% en 2018, de 30,7% en 2007 à 20% en 2018 au Pakistan et de 25,5% à 16,5% au Brésil.

Le poids du tabagisme en Indonésie

Le tabac tue environ 290 000 personnes par an en Indonésie et plus de 50 000 de ces décès sont dus à l’exposition à la fumée secondaire. Parmi les adultes indonésiens (âgés de 15 ans et plus), 33,8 % consomment du tabac, dont près des deux tiers des hommes (62,9 %)[2]. On constate une augmentation inquiétante de la prévalence du tabagisme chez les femmes et une augmentation constante de la prévalence du tabagisme chez les mineurs âgés de 10 à 18 ans. La prévalence du tabagisme chez les femmes a en effet presque doublé, passant de 2,5 % en 2013 à 4,8 % en 2018, tandis que la prévalence chez les 10-18 ans est passée de 7,2 % en 2013 à 8,8 en 2019 puis 9,1 % en 2018.

L’industrie du tabac, principale opposante à l’adoption de la Convention-Cadre en Indonésie

Les défenseurs de la lutte antitabac en Indonésie ont travaillé aux niveaux national et infranational avec des résultats prometteurs, plusieurs gouvernements régionaux ayant adopté des réglementations antitabac. Par exemple la ville de Bogor est devenue la première ville indonésienne à adopter une loi de lutte contre le tabagisme complète en 2009 incluant notamment des espaces sans tabac et une interdiction de la publicité sur les lieux de vente. Au niveau national, à l’exception notable de l’adoption d’un avertissement sanitaire illustré couvrant 40 % de la surface de l’emballage, aucun progrès significatif n’a été réalisé. L’Indonésie reste l’un des rares pays à diffuser des publicités pour le tabac à la télévision, et les taxes sur les cigarettes sont parmi les plus basses au monde.

Bien que l’industrie du tabac interfère dans les politiques publiques de presque tous les pays d’Asie du Sud-Est (ASEAN), le niveau d’ingérence de l’industrie du tabac dans l’élaboration des politiques en Indonésie est le plus élevé de la région[3]. L’industrie du tabac et ses partisans soutiennent que la ratification de la CCLAT aura des conséquences négatives sur l’économie du pays en raison du déclin de la production de tabac et des activités économiques associées. L’industrie affirme que cela entraînerait des problèmes macroéconomiques majeurs, notamment une augmentation des taux de pauvreté et de chômage et une diminution du PIB par habitant.

La Convention-Cadre contribue à la diminution de la consommation de tabac

L’étude conclut également que l’ampleur de la contribution économique de l’industrie du tabac dans l’économie nationale est surestimée et que les arguments selon lesquels la mise en place de mesures plus strictes aurait des conséquences économiques désastreuses ne sont pas corroborées par les expériences d’autres pays qui ont ratifié la CCLAT. À contrario, la réduction de la prévalence globale du tabagisme est susceptible d’induire des avantages à long terme tels qu’une diminution des dépenses de santé et une amélioration de la productivité du travail. Des politiques fiscales fortes augmentent simultanément les recettes fiscales du gouvernement et réduisent les dépenses sanitaires liées au tabac.

Mots clés : Indonésie, Convention-Cadre, CCLAT, lobby, tabac

©Génération Sans Tabac

AE


[1] Ahsan, A., Afin, R., Amalia, N. et al. FCTC ratification, smoking prevalence, and GDP per capita: lessons for Indonesia and the rest of the world. Global Health 18, 11 (2022). https://doi.org/10.1186/s12992-022-00810-y

[2] The toll of tobacco in Indonesia, Campaign for Tobacco-Free Kids, dernière mise à jour le 26 août 2021, consulté le 8 février 2022

[3] Mary Assunta. Global Tobacco Industry Interference Index 2021. Global Center for Good Governance in Tobacco Control (GGTC). Bangkok, Thailand. Nov 2021.

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 8 février 2022