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La Chine, à l’assaut du marché mondial du tabac

Pourtant peu connu, la China National Tobacco Corporation (CNTC) est le plus grand producteur de tabac au monde et est sous le contrôle de l’État chinois. En 2021, le tabac de la CNTC représentait plus de 46 % de la production mondiale, loin devant Philip Morris International (PMI) ou British American Tobacco (BAT). La méconnaissance de ce mastodonte du tabac tient notamment au fait que les activités de la CNTC sont très majoritairement concentrée dans le marché intérieur chinois : en effet seul 1 % du tabac produit en Chine est vendu à l’étranger.

Un monopole d’Etat en contradiction avec les impératifs de santé publique en Chine

Fondée en 1982 suite à la centralisation de bon nombre d’entreprises locales de production de tabac, la CNTC gère des centaines de producteurs, de fournisseurs et d’entreprises de culture de tabac en Chine et dans le monde. La CNTC est réglementée par la State Tobacco Monopoly Administration (STMA), un organe gouvernemental hautement impliqué dans la définition de la politique de lutte contre le tabagisme en Chine et dans la prise de décisions stratégique de la CNTC. Cet arrangement de l’agence de régulation sur l’entreprise gouvernementale de production de tabac crée un conflit inhérent entre une politique de lutte contre le tabagisme solide définie pour réduire la consommation du tabac dans le pays et les intérêts commerciaux issus de la croissance des ventes de tabac.

Des accords avec les principaux acteurs mondiaux du tabac

Depuis les années 80, la CNTC, malgré son fort ancrage local, cherche à se tourner vers le marché mondial, en cohérence avec la stratégie nationale chinoise d’exportation. Pour ce faire, le géant chinois a multiplié les accords avec les principales multinationales du tabac, à l’instar de Philip Morris International (1994), RJ Reynolds (1997), Japan Tobacco International (2003), ou encore BAT en 2013. Ces accords peuvent prendre la forme de partages de connaissance technologique, de création d’entreprises communes, ou d’ouvertures réciproques de marché d’un fabricant à l’autre.

Le lancement d’un hub international à Hong Kong

En 2019, la CNTC a déposé une demande d’introduction en bourse à Hong Kong afin de lever plus de 100 millions de dollars américains pour la China Tobacco International Inc. (CTI), l’une de ses sociétés d’outre-mer.
La CTI Hong Kong a été chargée de quatre principales responsabilités :

  • L’exportation de feuilles de tabac en collaboration avec la CTI Brésil, la CTI Argentine et la CTI Amérique du Nord ;
  • L’exportation de feuilles de tabac en Asie du Sud-Est ;
  • L’exportation de cigarettes manufacturées en Asie du Sud-Est ;
  • La vente de nouveaux produits.

Le développement d’une présence à travers la chaine d’approvisionnement mondiale

En plus de son expansion par le biais de coentreprises, la CNTC a renforcé sa présence internationale en créant des filiales afin d’avoir accès à différentes parties de la chaîne
d’approvisionnement mondiale du tabac. Ce faisant, la société travaille souvent en étroite collaboration avec les gouvernements pour obtenir des conditions favorables à l’établissement de différentes entreprises.

Le CNTC s’appuie sur un réseau de filiales agricoles internationales pour soutenir la production de produits du tabac destinés au marché national et à la distribution internationale. Ainsi, en 2020, la Chine a exporté pour plus de 486 milliards de dollars US de feuilles de tabac, et pour 163 milliards de dollars US de cigarettes manufacturées. La Chine importe également près de 100 millions de kilogrammes de tabac non manufacturé chaque année, notamment depuis l’Argentine, le Brésil, le Kazakhstan, le Malawi, le Zimbabwe ou la Zambie.

Par ailleurs, la CNTC a créé des filiales chargées de la production de cigarettes en Asie du Sud-Est, comme au Cambodge ou au Myanmar, en Amérique latine (Argentine), mais également en Europe : L’une des principales filiales de la CNTC est la China Tobacco International Europe Company (CTIEC), qui opère depuis la Roumanie et assure la présence de la CNTC en Europe. Les opérations de la CTIEC, soutenues par un investissement de 40 millions de dollars du gouvernement chinois, ciblent les marchés d’Europe de l’Est, d’Asie du Sud-Est, du Moyen-Orient et d’Afrique.

La participation présumée de la Chine au commerce illicite mondial

Au niveau mondial, la CNTC a été accusée de se livrer à des activités de commerce illicite telles que la contrebande et la contrefaçon, afin de favoriser son expansion dans de nouveaux marchés.

Ainsi, La CTIEC a exporté des cigarettes depuis sa base de fabrication en Roumanie vers plusieurs pays européens, dont l’Ukraine, dès 2013. Il s’est avéré que les produits illicites saisis dans d’autres pays européens provenaient d’Ukraine, d’entreprises approvisionnées par la CTIEC. Les cigarettes produites par la CTIEC ont été vendues à une société irakienne, Devmak, avant d’être prétendument introduites en contrebande en Italie, avec l’aval de la CTIEC. Les contrebandiers se sont avérés avoir des liens avec le crime organisé et sont également soupçonnés d’être actifs en Moldavie et au Monténégro.

©Génération Sans Tabac

FT


Ce document reprend les principaux éléments du rapport de la Stopping Tobacco Organisations and Products (STOP) : L’expansion de la China National Tobacco Corporation dans le monde

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 27 octobre 2022