Europe : vente illégale de puffs sur Internet
17 septembre 2024
Par: Comité national contre le tabagisme
Dernière mise à jour : 16 septembre 2024
Temps de lecture : 5 minutes
En mars dernier, l’Association suisse pour la prévention du tabagisme (AT Suisse) avait alerté les autorités helvètes que la grande majorité des cigarettes électroniques jetables (puffs) vendues dans le pays ne respectaient pas la loi et étaient vendues illégalement sur des plateformes en ligne. Selon l’association, une majorité des dispositifs vendus disposaient d’un réservoir de liquide supérieur à 2ml.
Dans les pays de l’Union Européenne, ainsi qu’en Suisse et au Royaume-Uni, les cigarettes électroniques à système fermé (pods) ou les dispositifs jetables (puffs) contenant de la nicotine ne peuvent pas contenir plus de 2 ml de liquide ni plus de 20 mg/ml de nicotine.
Des réservoirs jusqu’à 15 fois supérieurs à la limite autorisée
Une enquête menée par AT Suisse en mars 2024 avait révélé que 108 sites internet suisses vendant des dispositifs de vapotage, vendaient des puffs dont le réservoir dépassait la limite autorisée de 2ml. En moyenne un réservoir de 2ml permet entre 600 et 900 bouffées. L’étude précise que les dispositifs offrant 1 500 ou 2 500 bouffées sont couramment disponibles sur les sites de vente en ligne ou dans les boutiques en Suisse et des modèles plus récents proposent 10 000 voire 16 000 bouffées. Cela correspond à des réservoirs de 30ml, soit 15 fois la limite légale autorisée.
Ce type de dispositif est aussi retrouvé dans d’autres pays européens. En France, de très nombreux sites internet proposent des produits similaires. Le site français puff-store.fr propose des dispositifs ayant un réservoir de 14ml et un taux de nicotine de 20mg/ml.
La marque RandM Tornado, vendue sur plusieurs dizaines de sites français proposent des modèles possédant un réservoir de 20ml et un taux de nicotine allant jusqu’à 50mg/ml, soit 2,5 fois la limite légale autorisée en France.
AT Suisse a constaté également la circulation sur Internet de produits à la vente dont les concentrations nicotine sous forme de sels étaient illégalement élevées allant jusqu’à 60 mg/ml.
En mai dernier[1], le Trading Standards du Pays de Galles a déclaré avoir confisqué plus de 140 000 dispositifs électroniques de vapotage, vendus dans des magasins de jouets à travers le pays ou des magasins ambulants de vapotage. Ces produits peuvent avoir des taux de nicotine beaucoup plus élevés que ceux autorisés et des réservoirs de e-liquides plus importants avec des dispositifs allant jusqu’à 18 ml. Ces produits restent cependant accessibles sur de nombreux sites britanniques.
La vente de ces dispositifs est illégale et concerne une grande partie des pays européens. Ces derniers sont disponibles facilement en quelques clics livrés à travers les pays de l’UE.
Des produits facilement accessibles aux mineurs
En France, sur les sites précédemment cités, il n’existe aucune vérification de l’âge de l’acheteur lors de l’achat. Une étude[2] menée en 2023 par le Comité national contre le tabagisme avait montré que sur les 15 sites internet suivi, seul un site avait mis en place un système de contrôle renforcé pour prévenir la vente à des mineurs. Sur les 25 comptes de réseaux sociaux suivis, seuls six avaient restreint l’accès aux contenus en fonction de l’âge. Ils empêchaient l’accès aux contenus aux moins de 18 ans dans trois comptes ou aux moins de 21 ans dans trois autres comptes. Enfin, neuf sites sur dix proposaient la possibilité de créer un compte client, sans vérification de l’âge, afin de bénéficier d’offres promotionnelles supplémentaires par mail ou par SMS.
Comme le souligne l’organisation AT Suisse, ces produits sont également vendus à des prix attractifs, facilitant d’autant plus leur accès pour des adolescents. À titre d’illustration, en Suisse, une puff Elfbar de 600 bouffées coûte 8 CHF (8,5 euros) et les puffs contenant plus 16 000 bouffées sont à peine trois fois plus chères à 26,90 CHF (environ 29 euros).
En France, il est possible de trouver des dispositifs contenant 10 000 bouffées ou plus à moins de 10 euros, livrés gratuitement en moins de 48h à domicile.
Inaction des autorités compétentes
AT Suisse dénonce l’inaction des autorités suisses face à l’accessibilité de ces produits illégaux[3]. La présidente de l’association, également conseillère nationale (PS/GE) avait déjà déposé une question écrite en 2023 à ce sujet. Elle alertait sur la présence de très nombreux dispositifs de vapotage illégaux et demandait aux autorités suisses, notamment le Conseil fédéral et l'Office fédéral des douanes et de la sécurité frontalière d’agir pour y remédier.
Il y a quelques jours, Le Parlement jurassien[4] (canton du Jura) a voté l'interdiction des puffs. Les députés espèrent ainsi faire pression au niveau fédéral pour une interdiction dans l’ensemble du pays. Les acteurs de santé publique saluent cette mesure mais estiment qu’elle sera difficile à mettre en œuvre, notamment à cause de la vente en ligne qui permettra toujours aux mineurs de s’en procurer.
AE
[1] Génération sans tabac, Pays de Galles : des cigarettes électroniques illégales vendues dans des magasins de jouets, publié le 20 mai 2024, consulté le 12 septembre 2024
[2] Rapport, Le CNCT demande l’interdiction des sachets de nicotine, vendus illégalement en France et dépose une plainte, CNCT, publié le 29 mai 2024, consulté le 12 septembre 2024
[3] Luciano Ruggia, Puff bars illégales : aucune réaction des autorités depuis six mois, AT Suisse, publié le 6 septembre 2024, consulté le 12 septembre 2024
[4] Le Parlement jurassien vote l'interdiction des "puffs", RTS, publié le 5 septembre 2024, consulté le 12 septembre 2024
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