Le tabac chauffé ne relève pas de la réduction des risques, selon la MILDECA

30 mars 2023

Par: Comité national contre le tabagisme

Dernière mise à jour : 30 mars 2023

Temps de lecture : 4 minutes

Le tabac chauffé ne relève pas de la réduction des risques, selon la MILDECA

La Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) vient de publier sa Stratégie interministérielle de mobilisation contre les conduites addictives 2023-2027, qui accorde une large place à la protection des mineurs vis-à-vis des ventes de tabac, d’alcool et de jeux d’argent. Au sujet de la réduction des risques, ce document exprime nettement que les dispositifs de tabac chauffé ne sauraient constituer des produits adaptés à la réduction des risques en tabacologie, un argument que les industriels n’hésitent pas à brandir.

Première cause de mortalité évitable en France avec 75 000 décès par an, le tabagisme figure parmi les sujets majeurs de mobilisation de la Stratégie interministérielle de mobilisation contre les conduites addictives 2023-2027. Le thème du tabac y est abordé sous plusieurs facettes, qu’il s’agisse de vente aux mineurs, de marketing social ou de réduction des risques[1]. L’objectif d’une Génération sans tabac en 2032, soit moins de 5 % de fumeurs chez les jeunes, est quant à lui réaffirmé.

Faire respecter l’interdiction de vente aux mineurs

C’est peut-être sur le thème de la protection des mineurs que cette stratégie 2023-2027 marquera les esprits. Constatant, études clients-mystères à l’appui, que les deux tiers des buralistes vendent du tabac aux mineurs et que 95 % des mineurs fumeurs s’approvisionnent dans le circuit légal des buralistes, la MILDECA propose de jouer sur ce levier pour parvenir à une réduction significative du tabagisme chez les jeunes. Les produits de vapotage ne sont pas directement évoqués, mais on peut supposer que leur vente à des mineurs devrait connaître les mêmes dispositions.

Pour cela, la MILDECA préconise non seulement un renforcement important de la formation des buralistes, mais envisage également de faire respecter l’interdiction de vente aux mineurs « par un dispositif de contrôle continu et dissuasif, formalisé par un protocole interministériel ». Les contrôles sont aujourd’hui quasi-inexistants, puisque seulement 24 contraventions ont été dressées pour des infractions de vente de tabac aux mineurs en 2018[2]. Les buralistes ne risquent ainsi d’être contrôlés qu’une fois par siècle pour ce type d’infraction. Le respect de cette interdiction fondamentale constituerait un pendant aux nombreuses mesures de soutien aux buralistes et s’effectuerait « en application du protocole d’accord sur l’accompagnement du réseau des buralistes 2023-2027 » qui leur accorde de substantiels avantages.

Valorisation de l’opération de marketing social « Mois sans tabac »

Les atouts du marketing social sont nettement mis en avant dans cette Stratégie 2023-2027. Le défi collectif du dispositif « Mois sans tabac » devrait ainsi être renouvelé chaque année, mais l’initiative « Dry January », son équivalent pour l’alcool, ne retient toujours pas l’attention des pouvoirs publics. La notion de dénormalisation – issue de la lutte contre le tabagisme et qui consiste à ne plus exhiber les consommations pour éviter l’effet incitatif – est également mise à l’honneur avec la multiplication des espaces sans tabac, ce principe pouvant être décliné pour toutes les substances psychoactives.

Abordant le sujet de la réduction des risques et des dommages (RDRD) liés au tabac, la MILDECA énonce clairement que le tabac chauffé ne saurait s’inscrire dans cette logique. Elle précise même que « le tabac à chauffer ne doit en aucun cas être une aide au sevrage tabagique, les substances inhalées lors de son utilisation étant les mêmes que celles dans le tabac classique, même si les concentrations de substances toxiques sont moindres que dans le tabac fumé. » Une précision de taille, qui invalide le discours des industriels du tabac au sujet du tabac chauffé. Aux Etats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) a accordé au tabac chauffé le statut de « produit à risque modifié », mais les industriels du tabac persistent, notamment en Europe, à se réclamer de la RDRD, un abus de langage qui méritait d’être clarifié.

Mots-clés : MILDECA, Stratégie 2023-2027, vente aux mineurs, tabac chauffé.

©Génération Sans Tabac

MF

[1] MILDECA, Stratégie interministérielle de mobilisation contre les conduites addictives 2023-2027, mars 2023, 56 p.

[2] Prévention en santé, Annexe au projet de loi de finances pour 2021, Ministère du Budget.

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