Une étude parue dans la revue Tobacco Prevention and Cessation montre que l’état de santé des routiers est particulièrement dégradé. Avec une prévalence tabagique singulièrement élevée, une consommation alimentaire à risque, et un fort taux d’obésité, cette profession est beaucoup plus touchée par les maladies non transmissibles, comme les cancers ou les diabètes[1].
Les chercheurs ont interrogé sur six aires d’autoroutes françaises 373 chauffeurs routiers, français et étrangers, en leur demandant de préciser leurs caractéristiques sociodémographique (âge, sexe, état civil et nationalité), et leurs comportements en matière de consommation de produits du tabac, de boissons sucrées ou énergisantes, et de pratiques sportives. Sur la base de leur poids et de leur taille, l’indice de masse corporelle (IMC) des chauffeurs a également pu être calculé.
Un mode de vie sédentaire chez les chauffeurs routiers
L’âge moyen des personnes interrogées était de 43,4 ans. Près des trois quarts des chauffeurs routiers ont déclaré être mariés (73,8%), tandis que 70,3% d’entre eux étaient de nationalité française. En matière de comportement individuel, deux chauffeurs sur trois ont déclaré ne pas pratiquer de sport, et presque 60% d’entre eux ont affirmé consommer au moins trois sodas ou boissons énergisantes par jour, et près d’un sur quatre a déclaré en boire cinq par jour. Les résultats montrent également que les chauffeurs routiers sont particulièrement touchés par un risque d’obésité, puisque 68,7% d’entre ont un IMC les classant au moins en surpoids, tandis que 19,5% d’entre eux sont considérés comme obèses et 9,4% souffrent d’obésité morbide.
Une forte consommation tabagique, associée à la consommation de boissons sucrées et énergisantes
Les chercheurs soulignent également la forte prévalence tabagique qui pèse sur cette profession. En effet, sur les 373 personnes interrogées, 191 se déclarent fumeurs (51,1%). Cette consommation tabagique semble par ailleurs aller de pair avec l’intensité de la consommation de boissons sucrées ou énergisantes : en effet, 27,6% des personnes déclarant ne pas boire ce type de boisson sont par ailleurs fumeurs. En revanche, la prévalence tabagique monte à 46,1% pour les chauffeurs consommant entre une et deux de ces boissons par jour, à 50% pour les personnes en consommant entre trois et quatre par jour, et à 68,2% pour les conducteurs consommant cinq sodas ou boissons énergisantes par jour. En comparaison, selon le Baromètre de Santé publique France, en 2020, 36,2% des hommes âgés de plus de 18 ans déclaraient consommer du tabac[2].
Chauffeur routier : une espérance de vie diminuée par rapport au reste de la population
D’un point de vue sanitaire, ces résultats montrent que la profession de chauffeur routier est sujette à risques. Sur l’ensemble des données, seuls 10,2% des chauffeurs routiers ont un IMC standard et sont également non-fumeurs. D’autres études préliminaires ont montré que les conducteurs routiers ont de plus forts risques de développer des maladies non-transmissibles, comme les maladies cardiaques, le diabète, ou le cancer du poumon, notamment en raison de leurs modes de vie sédentaire, ou de leur consommation tabagique et de boissons sucrées. Aux Etats-Unis, des résultats similaires ont été observés, conduisant les chercheurs à estimer que l’espérance de vie des hommes de cette profession est considérablement inférieure à la moyenne nationale[3].
Les auteurs de l’étude menée en France appellent ainsi à mettre en œuvre des politiques adaptées afin d’améliorer les conditions de travail de ces chauffeurs routiers, et de les protéger efficacement contre des comportements à risque.
Mots clés : Routiers, MNT, Sédentarité, Etude
FT
[1] Josseran, L., McNeill, K., Fardini, T., Sauvagnac, R., Barbot, F., Quera Salva, M., Bowser, M., and King, G. (2021). Smoking and obesity among long-haul truck drivers in France. Tobacco Prevention & Cessation, 7(October), 66. https://doi.org/10.18332/tpc/142321
[2] Santé publique France, Consommation de tabac parmi les adultes en 2020 : résultats du Baromètre de Santé publique France, 26/05/2021, (consulté le 02/11/2021)
[3] Apostolopoulos Y, Sönmez S, Shattell MM, Belzer M. Worksite-induced morbidities among truck drivers in the United States. AAOHN J. 2010;58(7):285-296. doi:10.3928/08910162-20100625-01
