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Des publicités illicites ciblent les adolescents sur Facebook

Une organisation de défense des libertés publiques sur internet révèle comment les législations d’interdiction de publicités sont contournées sur Facebook, notamment afin de cibler les jeunes.

Les lois australiennes sont parmi les plus sévères au monde vis-à-vis des produits de tabac, qu’il s’agisse de leur vente, de leur publicité ou de leur consommation. Elles s’appliquent avec encore plus de vigueur lorsqu’il s’agit de mineurs de moins de 18 ans. Les réseaux sociaux offrent pourtant aux publicitaires de larges possibilités de contourner ces lois.

Le profilage des mineurs par leurs données personnelles

La branche australienne du groupe Reset, spécialisé dans la défense des libertés publiques sur Internet, a récemment testé le système de filtre commercial de Facebook. Le célèbre réseau social se défend d’autoriser toute publicité pour le tabac, l’alcool ou jeux d’argent qui ciblerait les mineurs, et prétend avoir mis au point des outils numériques permettant de détecter les annonces aux contenus inappropriés. Pourtant, en créant une page fictive s’adressant aux jeunes, Reset a pu avoir accès à un dispositif de profilage permettant d’envoyer des publicités ciblées à 740 000 jeunes Australiens de 13 à 17 ans [1].

« Il semble que Facebook utilise les données des adolescents de la même manière que celles des adultes », constate un responsable de Reset Australie. Son équipe a pu faire des simulations de profilage en faisant varier les critères démographiques, personnels et affinitaires et en explorant huit types de contenus inappropriés aux mineurs : tabac, alcool, jeux d’argent, contenus pornographiques, sites de rencontres en ligne, perte de poids extrême, restauration rapide et contenus renforçant les stéréotypes genrés. Il coûterait ainsi seulement 3,03 $ australiens (AUD) pour cibler 1000 adolescents s’étant déclarés intéressés par l’alcool, contre 11,24 $ pour cibler autant d’adolescents intéressés par les jeux d’argent et 38,46 $ pour ceux intéressés par la perte de poids extrême. Les tarifs pour cibler 1000 adolescents intéressés par le tabac (138,50 $) ou les cigarettes électroniques (210,97 $) sont les plus conséquents, loin devant ceux proposés pour des profils intéressés par les contenus pornographiques ou genrés [2].

Des contenus inappropriés aux mineurs

Reset a ensuite pu soumettre à l’automate régulant la conformité des publicités publiées sur Facebook treize visuels inappropriés pour les mineurs et couvrant l’ensemble des thèmes explorés. Dix d’entre eux ont été acceptés, y compris ceux proposant de rencontrer un senior fortuné ou de constituer un cocktail à l’aide du bar des parents. Deux visuels montrant de la fumée de cigarette ont été refusés, mais celui d’une photo glamour de cigarette électronique a été accepté.

Le ciblage issu du traçage de données personnelles sur les réseaux sociaux inquiète autant les parents que les adolescents. Interrogés par Reset, ces derniers se déclarent choqués que leurs données puissent être ainsi commercialisées, qui plus est sans leur accord. Ce type de techniques commerciales n’est toutefois pas exclusif à Facebook, mais se retrouve aussi chez sa filiale Instagram ou chez YouTube (Google). Reset propose donc de déployer en Australie un système anti-traçage des mineurs, à l’instar de ceux actuellement mis en place au Royaume-Uni [3] et en Irlande.

Les réseaux sociaux, terrain de jeux de l’industrie du tabac

La mise en œuvre du traité international de l’OMS, la Convention Cadre pour la Lutte AntiTabac, CCLAT, ratifiée aujourd’hui par plus de 180 pays, interdit toute forme de publicité, promotion, parrainage en faveur du tabac. Aussi l’industrie du tabac s’applique-t-elle à explorer toutes les formes de contournements de législations dont elle n’a pu empêcher l’adoption et l’application pour continuer à promouvoir ses produits.

Internet et les réseaux sociaux démultiplient les occasions de publicité et ces possibilités de contournement des législations, qui plus est sur des supports personnalisés et instantanés. Forte d’un chiffre d’affaire de 500 milliards de dollars par an et de très confortables bénéfices, l’industrie du tabac dispose d’une puissance de feu publicitaire difficilement égalable. Elle a fortement investi dans les réseaux sociaux ces dernières années pour promouvoir le tabac fumé ou non fumé. Elle sait que les adolescents et les jeunes adultes ont tendance à être plus attentifs que les adultes aux messages publicitaires en ligne. Une récente étude relative aux publicités des cigarettes électroniques l’atteste[4]. A l’affût de toutes les failles, légales ou non, l’industrie du tabac ouvre souvent la voie aux autres industries occasionnant des maladies non transmissibles.

Mots-clés : Facebook, Réseaux sociaux, publicité, marketing, tabac, jeunes

©Génération Sans Tabac


[1] Duffy C, Facebook approves alcohol, vaping, gambling and dating ads targeting teens, lobby group finds, ABC News (Australia). Publié le 28 avril 2021, consulté le 29 avril 2021.

https://www.abc.net.au/news/2021-04-28/facebook-instagram-teenager-tageted-advertising-alcohol-vaping/100097590

[2] Reset Australia, Pro ling Children for Advertising: Facebook’s Monetisation of Young People’s Personal Data, avril 2021.

https://au.reset.tech/uploads/resettechaustralia_profiling-children-for-advertising-1.pdf

[3] Information Commissioner’s Office, ICO publishes Code of Practice to protect children’s privacy online. Publié le 21 janvier 2020, consulté le 29 avril 2021.

https://ico.org.uk/about-the-ico/news-and-events/news-and-blogs/2020/01/ico-publishes-code-of-practice-to-protect-children-s-privacy-online/

[4] Génération sans tabac, Royaume-Uni : évaluation de la réglementation sur la publicité du vapotage. Publié le 28 avril 2021, consulté le 29 avril 2021.

https://www.generationsanstabac.org/actualites/royaume-uni-evaluation-reglementation-publicite-vapotage/

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 30 avril 2021