Actualités

fertin-pharma-pmi-substituts-nicotiniques

Philip Morris rachète Fertin Pharma, un spécialiste des substituts nicotiniques

Philip Morris International (PMI) a annoncé jeudi 1er juillet avoir conclu un accord de 813 millions de dollars pour l’acquisition de la société Fertin Pharma d’ici la fin 2021[1]. PMI prend ainsi pied dans l’univers pharmaceutique et disposera d’un important fonds de produits à délivrance orale.

Fertin est à l’origine une entreprise suédoise spécialisée dans le chewing-gum (marque V6), rachetée en 1978 par le groupe danois Bagger-Sørensen, lui aussi spécialiste en la matière. Fondée en 1915 par Holger Sørensen, la société  Vejle Caramel- og Tabletfabrik a commercialisé ses premiers chewing-gums dès 1927, avant de prendre le nom de Dansk Tyggegummifabrik A/S et, en 1939, le nom commercial de Dandy[2]. Acteur majeur du secteur de la confiserie, le groupe, devenu ensuite Gumlink, est à l’origine des marques de gommes Stimerol, Dandy et Virol, qu’il revendra en 2002 au groupe Cadbury-Schweppes.

Du chewing-gum aux substituts nicotiniques

C’est au début des années 1990 que Fertin s’aventure dans le domaine pharmaceutique en mettant au point ses premiers substituts nicotiniques sous forme de gommes à mâcher, qui deviennent rapidement ses produits-phares. Devenue Fertin Pharma, la société se distance du groupe Gumlink en 2001 ; la famille Bagger-Sørensen gardera néanmoins 30% du capital de Fertin Pharma en 2017, quand ce dernier est repris par le fonds d’investissement EQT Mid Market.

Fertin Pharma se développe fortement au cours de la décennie 2010 et investit en Inde : un centre de recherche et de développement est ouvert à Mumbai en 2011, et une unité de production est implantée à Goa en 2014. C’est aussi en 2014 que Fertin Pharma fonde son Nicotine Research Center, qui a pour vocation de développer de nouveaux systèmes de délivrance de nicotine.

Des innovations dans les traitements oraux

Ces infrastructures permettront à Fertin Pharma de concevoir ses produits actuels, qui intéressent tout particulièrement Philip Morris. Dans son catalogue, Fertin Pharma propose en effet non seulement des gommes à mâcher, mais aussi des gommes à sucer (sous le nom de « losanges »), des sachets à sucer (« pouches »), des gommes compressées à double couche, ainsi que des tablettes à diffusion rapides (sous le nom de Zapliq). Ces différents systèmes conçus pour délivrer de la nicotine ont aussi été déclinés pour d’autres usages pharmaceutiques, qu’il s’agisse de vitamines, d’antalgiques, de traitements contre les allergies ou de gommes permettant d’éviter le syndrome de « bouche sèche » lié à certains traitements anticancéreux (radiations contre les tumeurs du cou et du cerveau)[3]. Fertin Pharma a par ailleurs déposé de nombreux brevets, dont deux destinés aux cannabinoïdes médicaux ou de « bienêtre » ont été approuvés au Canada pour sa filiale NordicCan[4].

Une mine d’opportunités pour PMI

La large gamme de produits détenue par Fertin Pharma intéresse PMI à plus d’un titre. En plus de lui offrir un marchepied vers l’univers pharmaceutique, elle lui permettra d’une part d’élargir sa gamme de produits de nicotine non fumés, qui peut être étendue à d’autres univers que celui de la seule nicotine, et d’autre part de bénéficier d’une précieuse expertise pour de nombreux produits à délivrance orale. Qu’il s’agisse des « pouches » ou des gommes à double couche, Fertin Pharma a en effet développé différentes techniques de diffusion plus ou moins rapide des substances (incluant la caféine ou les antalgiques), mais aussi de masquage des goûts ou des effets indésirables, notamment pour atténuer les irritations dues à la délivrance de nicotine.

Les travaux de Fertin Pharma en matière de propriété intellectuelle ou d’argumentaire sur les produits « sans résidus », adaptés aux lois non-fumeurs ou anti-vape, ont aussi de quoi séduire le cigarettier. Le positionnement de Fertin Pharma sur le médical et le bienêtre ouvre par ailleurs la voie à de nombreuses possibilités de développement de produits et pourrait fournir de nouvelles opportunités au discours commercial actuel de PMI, ancré sur une promesse de réduction des risques.

Sur le créneau du cannabis, PMI, qui s’était jusqu’ici restreint à investir dans le segment du cannabis thérapeutique, pourrait ainsi étendre au cannabis récréatif sa gamme de produits non fumés[5]. On peut supposer que les lourds investissements opérés au Canada par les groupes Altria et British American Tobacco dans le secteur du cannabis thérapeutique et récréatif ne laissent pas PMI indifférent. La réduction progressive du marché des cigarettes fumées est quant à elle un motif suffisant pour que les industriels du tabac se penchent sur tous les autres systèmes de délivrance de nicotine – ou d’autres substances. PMI, qui ne comptait jusqu’ici que cinquante salariés au Danemark, s’implante fortement dans ce pays où il a déjà acquis en mai 2021 le producteur danois de snus AG Snus Aktieselskab[6].

 

Mots-clés : PMI, Fertin Pharma, substituts nicotiniques, pouches, cannabis

©Génération Sans Tabac

M.F


[1] PMI, Philip Morris International Announces Agreement to Acquire Fertin Pharma, communiqué de presse. Publié le 1er juillet 2021, consulté le 2 juillet 2021.

[2] Wikipedia, Fertin Pharma. Consulté le 2 juillet 2021.

[3] Fertin Pharma, Can chewing gum make a difference for cancer patients? Consulté le 2 juillet 2021.

[4] Fertin Pharma, NordicCan Secures Two Patents issued by the Canadian Intellectual Property Office for the Administration of Cannabinoids through Oral Dosage Formats. Publié le 22 avril 2021, consulté le 2 juillet 2021.

[5] Génération Sans Tabac, Philip Morris pourrait se lancer dans le secteur de la marijuana. Publié le 5 mai 2021, consulté le 2 juillet 2021.

[6] Mazanti-Andersen, AG Snus Aktieselskab sold to Phillip Morris International. Publié le 7 mai 2021, consulté le 2 juillet 2021.

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 5 juillet 2021