Actualités

Philippines

L’industrie du tabac remporte une large victoire aux Philippines

Aux Philippines, le Congrès a adopté une loi réglementant les nouveaux produits du tabac et de la nicotine. Présentée comme une mesure visant à protéger et promouvoir le droit des personnes, la réglementation apparaît bien plus favorables aux intérêts de l’industrie du tabac qu’à ceux de la santé publique.

Les autorités sanitaires et médicales, y compris gouvernementales, ont dénoncé l’absence de prise en compte de leur expertise lors des auditions réalisées dans le cadre des discussions parlementaires de ce projet de loi[1]. Pour certains experts médicaux, la précipitation avec laquelle cette loi a été adoptée, en contexte de pandémie de Covid-19, témoigne de la forte capacité d’interférence de l’industrie du tabac dans les politiques publiques aux Philippines.

Un projet de loi qui facilite l’initiation et la consommation

Le projet de loi adopté, promu par ses défenseurs sous la bannière de la « réduction des risques », permet en réalité d’assouplir la réglementation actuelle sur les nouveaux produits du tabac et de la nicotine. Ainsi, l’âge légal pour acheter des cigarettes électroniques et du tabac chauffé a été descendu à 18 ans, contre 21 ans auparavant. Par ailleurs, les publicités en ligne pour ces deux produits sont désormais autorisées, tandis que la limite de saveurs commercialisées à deux arômes est supprimée[2]. Ces trois mesures, loin de permettre une réduction de la consommation, ont notamment pour conséquence d’augmenter l’exposition des jeunes générations à ces nouveaux produits, et de favoriser l’initiation et la consommation de nicotine ou de tabac. Au mois de février, le ministère de la Santé avait averti en ce sens, en soulignant qu’adopté, le projet de loi permettrait aux lycées d’acheter des produits du tabac, y compris dans les centres commerciaux.

Des produits sous la juridiction du Département du commerce et de l’industrie

Alors que ces nouveaux produits du tabac et de la nicotine devraient être sous la juridiction de la Food and Drug Administration (FDA) des Philippines, ils seront en réalité réglementés par le Département du commerce et de l’industrie (DTI). Ce dernier aura ainsi la « compétence exclusive » sur « toutes les questions » liées à la cigarette électroniques et le tabac chauffé, ainsi que leurs dispositifs. Pia Cayenato, une des seules sénatrices opposées à ce projet de loi, a critiqué cette disposition, affirmant que le DTI n’a ni l’expérience, ni les compétences pour réglementer ces nouveaux produits.

Une confusion permanente entre cigarette électronique et tabac chauffé

Le Département du commerce et de l’industrie reconnaît ces nouveaux produits comme étant des « alternatives viables » pour les fumeurs souhaitant arrêter leur consommation. Pourtant, cigarette électronique et tabac chauffé ne sont pas des produits de même nature. La cigarette électronique n’est pas un produit du tabac, et, sous certaines conditions, peut être envisagée comme un dispositif complémentaire de soutien aux gros fumeurs dans leurs tentatives d’arrêt. Si les risques associés à la consommation de cigarette électroniques ne sont pas suffisamment connus, la littérature scientifique tend à démontrer qu’elles sont moins nocives que la cigarette manufacturée. En revanche, le tabac chauffé est un produit du tabac. A ce jour, aucune étude indépendante n’est parvenue à démontrer que la consommation d’un tel produit était moins dangereuse que celle d’une cigarette classique. Par ailleurs, le tabac chauffé, délivrant des quantités nicotiniques identiques à celle d’une cigarette, ne peut en aucun cas être considéré comme un outil de sevrage.

Mots clés : Philippines, ingérence, tabac chauffé, 

©Génération Sans Tabac

FT


[1] Vera Files, Tobacco industry sticks to game plan amid the pandemic, 05/04/2022, (consulté le 06/04/2022)

[2] Vera Files, ‘95% less harm?’: Without scientific consensus, legislators favor ‘reduced risk’ claims in e-cigs, HTPs, 05/04/2022, (consulté le 06/04/2022)

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 7 avril 2022