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Le tabac, un défi pour les entreprises et les états

Le 28 avril est la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, centrée sur la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles[1]. Une occasion de faire le point sur les multiples incidences du tabagisme sur le travail et sur la santé des salariés.

Qu’il s’agisse de le cultiver ou de gérer sa consommation sur le lieu de travail, le tabac est encore présent sous de nombreuses formes en milieu professionnel. Une tribune publiée dans China Daily permet un tour d’horizon de ces questions, en Chine comme ailleurs[2].

Exposition à la fumée de tabac sur le lieu de travail

Par la fumée secondaire qu’il dégage, le tabac nuit à la qualité de l’environnement de travail et porte atteinte aux conditions de travail. Si le décret de décembre 2006 protège les salariés de la fumée du tabac en France[3], cette situation est loin d’être universelle, même si elle s’améliore progressivement : seulement 3% de la population mondiale était protégée par des législations complètes d’interdiction de fumer dans les lieux publics en 2007, alors qu’ils sont aujourd’hui 21%. Dans les entreprises privées, ces mesures de protection complètes concerneraient jusqu’à 51% des lieux de travail, selon un rapport de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT)[4]. Des mesures qui sont de plus en plus faciles à respecter, à mesure que la proportion de fumeurs se réduit dans la population. A l’échelle mondiale, les fumeurs ne représenteraient que 18% de la population, avec de fortes variations selon les pays, ce qui reste donc une minorité de salariés.

Les législations continuent par ailleurs d’évoluer et prennent en compte les nouveaux produits de la nicotine : à partir du 30 avril, il sera également interdit de vapoter sur les lieux de travail à Hong Kong.

Des atteintes à la sécurité et à la santé des salariés

Sur le plan de la sécurité, les mégots mal éteints restent l’une des premières sources d’incendie, ce qui touche toutes les entreprises mais plus encore celles confrontés aux risques industriels. L’usage de tabac peut par ailleurs être une source d’accidents du travail qui peuvent affecter la conduite de machines ou de véhicules, du fait des moments d’inattention occasionnés par l’allumage, la consommation et l’extinction des produits du tabac.

La productivité des salariés fumeurs est par ailleurs moins importante que celle des autres salariés, du fait des nombreuses pauses et de la moindre concentration des fumeurs. Les pauses des fumeurs peuvent parfois occasionner des tensions au sein des équipes de travail, ce qui altère l’ambiance au travail. Les fumeurs connaissent aussi davantage d’arrêts de travail pour maladies et invalidités dus à la consommation de tabac, qui affectent fortement les entreprises.

Les dangers de la culture du tabac

La culture du tabac est en elle-même un secteur qui met en péril la santé de ses travailleurs. Les conditions de travail des exploitations de tabac exposent leur main d’œuvre à de multiples risques : maladie du tabac vert (provoquée par l’absorption de nicotine par la peau), substances chimiques agricoles, troubles de la l’appareil respiratoire et pénurie alimentaire.

Sur ce dernier plan, malgré les discours et les incitations des industriels du tabac, de nombreux pays ont pu vérifier que la culture du tabac n’est que très peu rentable, en particulier pour les petits producteurs. Elle accapare par ailleurs de vastes terrains qui pourraient être dédiés à la production alimentaire. C’est par exemple le cas de la Chine, qui possède les exploitations de tabac les plus étendues mais est contrainte d’importer une proportion importante de ses produits alimentaires. Les planteurs de tabac de la province de Yunnan ont ainsi pu enregistrer une augmentation de 110% de leurs gains en passant de la culture du tabac à d’autres cultures. La Chine, le Bengladesh, la Tanzanie et le Brésil font partie des pays qui ont amorcé la transition vers d’autres cultures de sols jusqu’ici dédiés au tabac.

Des atteintes aux droits humains, notamment pour les enfants

Les plantations de tabac peuvent enfin se révéler comme des lieux d’atteintes aux droits humains, tout particulièrement en Afrique subsaharienne. De nombreux travaux et enquêtes ont révélé que ces exploitations recourent fréquemment au travail des enfants, en contradiction avec la Convention relative aux droits des enfants[5]. Par ailleurs, les conditions d’exercice imposées aux petits fermiers locaux et à leurs enfants s’apparentent parfois, par exemple au Malawi, à du travail forcé[6].

Quatre articles de la CCLAT peuvent être mobilisés pour améliorer la situation des salariés. Il s’agit des articles 8, qui incite à protéger la population contre la fumée de tabac, 9, qui règlement les produits du tabac, 17, qui encourage la transition des cultures du tabac vers d’autres types de culture économiquement viables, et 18, qui invite les cultivateurs et les producteurs de tabac à respecter . Le préambule de la CCLAT fait aussi référence à trois traités des droits humains (enfants, femmes et PIDESC) qui doivent être pris en compte en milieu de travail.

Mots-clés : travail, salariés, entreprises, CCLAT, culture du tabac

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail – 28 avril, Nations Unies, non daté, consulté le 28 avril 2022.

[2] Mc Kay J, Anti-smoking measures give reason to celebrate, China Daily, publié le 27 avril 2021, consulté le 28 avril 2022.

[3] Selon Santé Publique France, 16% des salariés seraient tout de même encore exposé au tabagisme passif sur leur lieu de travail, cette proportion s’élevant jusqu’à 34% pour les ouvriers. Exposition à la fumée de tabac sur le lieu de travail et au domicile entre 2014 et 2018, Résultats du baromètre de Santé Publique France, Santé Publique France, 2020.

[4] 2021 global progress report on implementation of the WHO Framework Convention on Tobacco Control, Genève, World Health Organization, 2022.

[5] L’industrie du tabac : un obstacle à l’élimination du travail des enfants, Génération Sans Tabac, publié le 21 juin 2021, consulté le 28 avril 2022.

[6] Deux géants du tabac accusés de travail forcé par des cultivateurs et des enfants du Malawi, Génération Sans Tabac, publié le 20 mai 2021, consulté le 28 avril 2022.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 28 avril 2022