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Le Cameroun interdit la vente et l’usage de la chicha et de ses produits

Face à la croissance des usages de chicha chez les jeunes, les autorités camerounaises ont, comme celles d’autres pays africains, fait le choix de l’interdiction. Aussi appelée narguilé, pipe à eau ou hookah, l’usage de la chicha est jusqu’ici en pleine expansion au Cameroun, 46% des jeunes de 15 à 20 ans l’ayant déjà expérimenté dans ce pays selon le ministère de la Santé publique.

Cette situation a conduit en février 2022 le ministre de l’Administration territoriale à interdire l’importation, la vente, la promotion et la consommation de la chicha pour protéger la santé de la population, de nombreux Camerounais estimant cette consommation moins dangereuse que celle des cigarettes classiques[1].

Interdiction de la chicha dans plusieurs pays africains

Le Cameroun rejoint ainsi, après le Kenya, la Gambie, la Tanzanie, le Rwanda, le Ghana et le Sénégal, la liste des pays africains ayant pris des mesures d’interdiction de la chicha. Le Kenya[2] et le Soudan se sont toutefois distingués sur ce thème en revenant à plusieurs reprises sur cette interdiction. Au Burkina Faso, la ville de Ouagadougou a, elle aussi, interdit la consommation de chicha.

La question de l’application réelle de cette mesure au Cameroun est cependant posée, la pratique de la chicha étant très populaire et de nombreux bars à chicha ayant ouvert ces dernières années[3].

Des dommages similaires au tabagisme

Au niveau mondial, la consommation de chicha, traditionnellement très implantée dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, a fortement progressé à partir des années 2000 sur plusieurs continents, notamment en Asie, en Afrique, en Europe et en Amérique du Nord. Une note consultative de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), complétée en 2015, a recensé les principales atteintes à la santé de la consommation de chicha, qui recoupent celles du tabac : présence de nombreuses particules toxiques, atteintes des voies respiratoires, du système cardiovasculaire, des dents et de la cavité buccale, nocivité de la fumée secondaire, risque de forte addiction[4]. Fumer une heure une chicha correspondrait ainsi à absorber l’équivalent de la fumée de 100 cigarettes. Ce rapport pointe notamment que plusieurs articles (5, 6 et 8 à 16) de la Convention-Cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) peuvent directement s’appliquer à réglementer le commerce et l’usage de la chicha. Le rôle de passerelle entre la chicha et les autres formes de tabac fumé est aussi souligné.

Cet effet de passerelle vers le tabac fumé est plus spécialement redouté chez les adolescents n’ayant pas encore expérimenté la cigarette. Les représentations erronées d’une moindre toxicité de la chicha conduisent en effet une frange non négligeable d’adolescents à se tourner d’abord vers cette forme de tabagisme. En France, une récente étude de l’OFDT sur les consommations des élèves de 3ème révèle que si l’expérimentation de la chicha a globalement baissé de 26,2% à 20% entre 2018 et 2021, l’expérimentation exclusive de la chicha est restée constante (6,2%) durant cette période[5]. Cette étude précise aussi que 69,3% des élèves de 3ème ayant expérimenté la chicha ont également expérimenté la cigarette. Les auteurs appellent ainsi à un regain de vigilance concernant l’usage exclusif de la chicha et d’une manière générale concernant ce produit.

Mots-clés : Cameroun, chicha, Afrique, effet passerelle, interdiction, jeunes

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Cameroon Bans Shisha Smoking In Bars, Others, Sahara Reporters, publié le 14 mars 2022, consulté le 17 mars 2022.

[2] Chronology of shisha ban in Kenya, Kenya tobacco control Alliance (KETCA), document de présentation, 2019, 12 p.

[3] Cameroun : le gouvernement interdit la « chicha », Koaci, publié le 14 mars 2022, consulté le 17 mars 2022.

[4] Waterpipe tobacco smoking: health effects, research needs and recommended actions for regulators, 2nd edition, WHO Study Group on Tobacco Product regulation, 2015, 66 p.

[5] Spilka S, Philippon A, Le Nézet O, Janssen E, Brissot A, Eroukmanoff V, Godeau E, Usages d’alcool, de tabac et de cannabis chez les élèves de 3e en 2021, OFDT, Tendances N°148, décembre 2021.

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 18 mars 2022