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La Corée du Sud évalue les efforts nécessaires pour en finir avec le tabagisme

Adopter une réglementation spécifique et renforcer la recherche en matière de lutte contre le tabagisme sont deux des pistes suggérées par des chercheurs pour parvenir à une génération sans tabac en Corée du Sud. Une étude met en parallèle la tentative manquée d’une génération sans tabac dans ce pays et les succès obtenus dans trois autres, reconnus comme leaders de la lutte contre le tabac.

Avec une prévalence tabagique de 21 % et après une première tentative manquée en 2019, la Corée du Sud envisage de devenir un pays sans tabac, soit une prévalence tabagique inférieure à 5 % de la population, à l’horizon 2030.

Pour évaluer les étapes restant à parcourir afin d’atteindre cet objectif, une étude publiée par une équipe de chercheurs coréens a comparé l’état d’avancement de la Corée du Sud en matière de lutte contre le tabagisme, à celui de trois pays considérés comme étant en pointe sur ce plan : l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Finlande[1].

Trois pays pris en références par la Corée du Sud

Cette comparaison entre les quatre pays permet de distinguer plusieurs éléments-clés de la mise en place d’une génération sans tabac. Les volets de la réglementation et de la recherche y apparaissent particulièrement déterminants en référence au programme MPOWER de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)[2] et plus globalement de la ConventionCadre pour la lutte antitabac (CCLAT).

Fixer une échéance ainsi que les taux de prévalence envisagés constituent également des étapes indispensables, ce qu’ont mis en place l’Australie, la Nouvelle-Zélande et la Finlande dans leur programme de génération sans tabac. Ce n’était pas le cas de la Corée du Nord lorsque fut émise, en 2019, l’idée d’une interdiction totale de la vente de tabac dans son Plan complet de lutte contre le tabagisme et d’éradication de la fumée induite dans l’environnement. Une étude conduite à la même époque auprès de 1500 adultes sud-coréens indiquait que 70 % des personnes interrogées soutenaient une mesure d’interdiction complète de la vente de tabac. Cette mesure ne fut cependant pas débattue par les parlementaires et fut remisée après une dissolution de l’Assemblée nationale en avril 2020.

Une exploration des écueils à la mise en place d’une génération sans tabac

L’expérience des trois pays considérés comme des modèles montre par ailleurs que l’inscription de la lutte contre le tabagisme dans une loi qui lui est propre est non seulement une manière d’officialiser ce domaine, mais permet aussi, par la suite, de faire évoluer cette réglementation. En Corée du sud, cette législation est partagée entre deux textes de loi qui nuisent à sa pleine application. Le fait qu’il existe encore un fabricant coréen de tabac – KT&G – constitue d’autre part une menace permanente dans la mise en place d’une réglementation efficace, par le jeu des influences et du lobbying. Le strict respect de l’article 5.3 de la CCLAT, qui stipule qu’il faut tenir les industriels du tabac à l’écart de politiques publiques de santé, doit ici être observé, afin de garantir une réglementation opérante.

Le volet de la recherche est un aspect tout aussi essentiel de la lutte contre le tabagisme. Il permet en effet d’asseoir les propositions antitabac sur une base scientifique, ce qui s’avère essentiel pour défendre des propositions de lois auprès des législateurs et étayer un projet aussi ambitieux que la génération sans tabac. Les trois pays de référence ont chacun mis en place un centre de recherche spécifiquement dédié aux études sur le tabac, et peuvent ainsi produire des données utiles à la prise de décision des législateurs. Un tel organisme est appelé de leurs vœux par les auteurs de l’étude coréenne, même si la recherche ne suffit pas à parer les influences des industriels du tabac. La mise en place d’une génération sans tabac n’est enfin envisageable que si les taux de prévalence d’un pays sont suffisamment bas pour y parvenir, ce qui nécessite notamment un suivi de l’évolution des consommations. A cela s’ajoute la mise en œuvre indispensable des mesures éprouvées et reconnues comme efficaces sur le plan international, réunies dans le traité de la CCLAT ratifié par le pays.

Remplir l’ensemble de ces conditions paraît indispensable pour parvenir à instituer une génération sans tabac. La recherche conduite et les efforts de la Corée du Sud pour y aboutir devraient également permettre à d’autres pays d’éviter certaines erreurs et d’atteindre plus facilement l’objectif d’une génération sans tabac.

Mots-clés : Corée du Sud, Australie, Nouvelle-Zélande, Finlande, génération sans tabac.

©Génération Sans Tabac

MF

[1] Kang H, Cheon E, Kim HK, et al. Vision for tobacco endgame in Korea: suggestions for countries with endgame aspirations. Tobacco Control Published Online First: 05 May 2023. doi: 10.1136/tc-2022-057691

[2] Le programme MPOWER s’articule autour de six dimensions : Monitoring tobacco use and prevention policies ; Protecting people from tobacco smoke ; Offering help to quit tobacco use ; Warning about the dangers of tobacco ; Enforcing bans on tobacco advertising, promotion and sponsorship ; Raising taxes on tobacco.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 11 mai 2023