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Les hausses de taxes indispensables mais insuffisantes pour réduire la consommation de tabac

Une étude réalisée par l’Institut d’économie de la santé de l’Université des sciences appliquées de Zurich[1] pour le compte de la Ligue pulmonaire et du Groupe de travail suisse sur la prévention du tabac s’est penchée sur la question de l’effet des hausses de taxes sur le tabac sur le comportement tabagique. L’étude établit une comparaison entre pays européens. Elle montre qu’une augmentation de la fiscalité du tabac dans les pays ayant des mesures de lutte antitabac relativement strictes va de pair avec une prévalence plus faible du tabagisme.

L’étude comparative a utilisé un ensemble complet de données provenant de l’OMS, de la Banque Mondiale ou encore du Tobacco Control Scale (TCS) portant sur 27 pays européens. Elle couvre la période de 2010 à 2020.

Le prix influe sur le comportement tabagique du fumeur

Les résultats montrent que les fumeurs réagissent aux augmentations des taxes sur le tabac quel que soit le pays. Dans les pays qui possèdent un environnement favorable à la consommation (par rapport au classement TCS de 2019 comme la Suisse ou l’Allemagne), les fumeurs réagissent aux augmentations des taxes sur le tabac en réduisant leur consommation de cigarettes mais en n’arrêtant pas de fumer. Dans un pays appliquant des mesures antitabac plus complètes et plus strictes (comme le Royaume-Uni ou la Norvège), les fumeurs sont plus nombreux à arrêter de fumer lorsque les prix augmentent.

Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une augmentation significative des taxes et des prix des produits du tabac est la mesure la plus rentable pour réduire la consommation de tabac. Le modèle de calcul de l’étude a démonté qu’une hausse de 10% des prix peut entraîner une baisse de la consommation allant jusqu’à 9%.  L’étude confirme aussi que les hausses de taxes et de prix ont un effet plus important sur les jeunes : lorsque les prix augmentent, la consommation de tabac diminue deux à trois fois plus chez les jeunes que chez les adultes. Des taxes et des prix plus élevés dissuadent également fortement les jeunes de commencer à fumer.

La hausse des taxes doit être intégrée dans un arsenal complet de mesures

Un ensemble de mesures de lutte antitabac est nécessaire pour réduire considérablement la prévalence tabagique. Les augmentations significatives et régulières de taxes sont nécessaires mais pas suffisantes en tant que mesure individuelle. Les résultats démontrent que dans les pays ayant des réglementations strictes et complètes en matière de lutte antitabac (Europe du Nord et de l’Ouest), la consommation a en moyenne baissé de 7% entre 2010 et 2020 contre en moyenne 3% dans les pays avec des mesures plus faibles (Europe du sud ou de l’est).

Le moyen le plus efficace de réduire durablement la consommation de tabac consiste à mettre en œuvre des politiques globales et éprouvées de lutte antitabac, ciblant à la fois l’offre et la demande comme celles énoncées dans la Convention-Cadre de l’OMS (l’interdiction de la publicité pour le tabac, le déploiement des lieux sans tabac, l’interdiction des arômes, les avertissements sanitaires et les emballages sanitaires ou encore le remboursement des substituts nicotiniques etc.). Celles-ci permettent de favoriser et maintenir l’arrêt et prévenir l’entrée dans le tabagisme des jeunes.

La Suisse, un environnement favorable à la consommation de tabac

Les auteurs ont pointé en particulier la situation de la Suisse qui connaît une prévalence élevée et stagnante depuis une décennie (passant de 27 à 24% de la population adulte entre 2010 et 2020).

Le pays qui n’a toujours pas ratifié la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac (CCLAT) connaît une très forte ingérence de la part de l’industrie du tabac. Les données montrent que dans la plupart des pays de l’UE, les mesures de lutte contre le tabagisme se sont renforcées entre 2010 et 2020 et les taxes sur le tabac ont augmenté dans presque tous les pays. En 2020, la Suisse avait la plus faible charge fiscale totale pesant sur les cigarettes par rapport aux pays de l’UE et n’avait pas augmenté ses taxes depuis 2013. La marque de cigarettes actuellement la plus vendue (octobre 2021) coûte 8,50€ par paquet de 20 cigarettes et les taxes représentent 51,8 % du prix de vente, loin des 75% recommandés par l’OMS.  Les auteurs de l’étude appellent le gouvernement suisse à augmenter les taxes sur le tabac et à mettre en place un dispositif complet de mesures antitabac pour réduire durablement la prévalence tabagique.

Mots clés : Suisse, fiscalité, taxes, tabac, Europe, prix

©Génération Sans Tabac

AE


[1] Andreas Kohler, Linda Vinci, Renato Mattli, Die Wirkung von Tabaksteuern – Die Schweiz im europäischen Ländervergleich, Winterthurer Institut für Gesundheitsökonomie, School of Management and Law, ZHAW, 7 décembre 2021

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 10 décembre 2021