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Grande-Bretagne : le nombre de vapoteurs a été multiplié par cinq en dix ans

Une étude nationale révèle qu’en Grande-Bretagne, 8,3 % des adultes, soit 4,3 millions de personnes, vapotent régulièrement. On compte parmi eux 350 000 non-fumeurs, dont 60 % de plus en une seule année.   

L’étude YouGov, conduite cette année auprès de 13 000 adultes d’Angleterre, d’Ecosse et du Pays de Galles, a permis de dénombrer 4,3 millions de vapoteurs réguliers au Grande-Bretagne, soit 8,3 % des adultes[1]. Une tranche de population en nette progression, puisqu’ils n’étaient que 800 000 (soit 1,7 %) voici dix ans, soit cinq fois moins.

Parmi ces vapoteurs réguliers, 2,4 millions sont des ex-fumeurs, 1,5 millions sont encore fumeurs et 350 000 n’ont jamais fumé de tabac. Plus de la moitié (56%) vapent depuis plus de trois ans. La proportion des personnes qui vapent régulièrement sans avoir jamais fumé est en forte croissance, passant de 4,9 % en 2021 à 8,1 % en 2022, soit une hausse de 60 % en une seule année, un phénomène notamment expliqué par la rapide diffusion des cigarettes électroniques jetables (« puff ») parmi les jeunes. L’usage de ces cigarettes électroniques jetables concerne, en 2022, 15 % des vapoteurs réguliers, contre 2,3 % en 2021. 48 % des 18-24 ans ont déclaré avoir déjà expérimenté au moins une forme de vapotage.

Plus d’un tiers de vapofumeurs

35 % de ces vapoteurs réguliers en 2022 sont aussi fumeurs de tabac, ce que l’on désigne communément comme l’usage duel. Les fumeurs qui vapotent quotidiennement indiquent fumer moins de cigarettes que les fumeurs qui vapotent irrégulièrement.

Un ex-fumeur sur cinq a déclaré avoir stoppé son tabagisme à l’aide d’une cigarette électronique, mais près de la moitié des fumeurs ayant essayé le vapotage l’ont ensuite arrêté, et 28 % des fumeurs ne l’ont jamais expérimenté. Sur l’ensemble des adultes interrogés, un tiers estime que le vapotage est au moins autant ou davantage nocif que le tabagisme.

Une progression inquiétante chez les adolescents

En parallèle, l’organisation Action on Smoking and Health (ASH UK) a publié, en juillet, les résultats d’un étude similaire (YouGov youth), conduite annuellement auprès des jeunes de 11 à 17 ans[2]. L’organisation s’alerte de l’augmentation du vapotage régulier chez les adolescents, qui est passé de 4 % en 2020 à 7% en 2022, ainsi que de celle de l’expérimentation des cigarettes électroniques, passée de 14 % en 2020 à 16% en 2022. Dans cette population, l’usage des cigarettes électroniques jetables suit une progression très rapide, passant de 7 % en 2020 à 8 % en 2021 et à 52 % en 2022, soit une multiplication par sept en deux ans. 70 % de ce marché des « puffs » est détenu par deux marques, que sont Elf Bar et Geek Bar. Les arômes fruités sont les préférés des jeunes (57 %), suivis par ceux au menthol.

L’étude de ASH UK attire l’attention sur les ventes illégales de ces produits aux mineurs, dont près de la moitié (47 %) sont réalisées en magasin. ASH UK cite également une étude « clients-mystère », conduite début 2022 avec des mineurs, qui indique que 33 % des magasins acceptent de vendre ces produits aux mineurs, les proportions les plus élevées étant réparties entre les achats par téléphone mobile (50 %) et dans les magasins discount (52 %). ASH UK pointe également la prolifération, notamment sur le marché noir, de cigarettes électroniques jetables destinées au marché américain, qui proposent des teneurs en nicotine et des contenances plus importantes que celles autorisées en Europe et au Royaume-Uni.

« Le gouvernement dit qu’une « révolution du vapotage » l’aidera à atteindre son ambition d’un pays sans tabac en 2030, mais ce ne sera pas suffisant. Nous avons besoin d’un plan complet afin d’aider tous les fumeurs. » a déclaré Hazel Cheesemain, directeur adjoint de ASH UK. L’organisation réclame notamment au gouvernement une dotation de 15 millions de livres aux autorités locales, afin de renforcer l’application de l’interdiction de vente aux mineurs. Elle pointe par ailleurs l’intense promotion du vapotage sur les réseaux sociaux, et renvoie à la responsabilité des pouvoirs publics de faire respecter les dispositions en vigueur.

Mise en question de la place du vapotage dans les politiques publiques

Bien que le gouvernement britannique se réjouisse de la « révolution du vapotage » en cours en Grande-Bretagne, ce sont plutôt des résultats en demi-teintes qui apparaissent. Les données de l’étude YouGov ont été uniquement communiquées à l’agence de presse nationale PA, ce qui n’est pas le meilleur gage de transparence.

Dans un document d’information aux autorités locales, ASH UK reconnaît que l’usage des cigarettes électroniques n’est pas sans risque et qu’il est totalement contre-indiqué chez les mineurs et les non-fumeurs[3]. L’organisation réclame d’ailleurs un renforcement des contrôles de l’âge de vente aux mineurs des produits du tabac et de la nicotine, et une interdiction effective de la publicité et de leur promotion sur Internet. Tout en reconnaissant d’autre part que ces cigarettes électroniques ne suffiront pas à éteindre l’épidémie de tabagisme, ASH UK conteste cependant un effet passerelle qui conduise les jeunes vapoteurs à fumer et souligne régulièrement le rôle des cigarettes électroniques dans l’arrêt du tabagisme..

Cette politique ne fait toutefois pas l’unanimité et reste actuellement cantonnée au Royaume-Uni et à la Nouvelle-Zélande. Dans une tribune publiée le 30 juillet dernier, le Dr Des Cox, pneumologue, critique la politique antitabac britannique, principalement basée sur le remplacement du tabagisme par l’usage de la cigarette électronique[4]. En s’appuyant sur les données de l’étude YouGov youth de ASH UK, il pointe le rôle d’initiation à la nicotine chez les jeunes non-fumeurs des cigarettes électroniques jetables, dont de nombreuses voix réclament l’interdiction. Il estime que l’effet passerelle des cigarettes électroniques vers le tabagisme est bien réel, dans un ratio de 3 à 5, et que ce point doit être mis en balance avec les bénéfices observés pour les adultes qui auraient arrêté de fumer à l’aide de ces dispositifs électroniques. Il considère que la position britannique, qui s’appuie surtout sur une synthèse d’experts de 2013, devrait être relativisée et davantage guidée par des études plus robustes, comme des méta-analyses et des revues systématiques de la littérature. Il note enfin que, contrairement au Royaume-Uni, le guide national de l’arrêt du tabac irlandais ne fait aucune référence au rôle des cigarettes électroniques.

Mots-clés : Royaume-Uni, Grande-Bretagne, ASH UK, cigarette électronique, puff, Irlande

©Génération Sans Tabac

MF


[1] Vaping reaches record levels – report, The National, publié le 29 août 2022, consulté le 29 août 2022.

[2] Fears of growth in children vaping disposables backed up by new national survey, ASH UK, publié le 7 juillet 2022, consulté le 29 août 2022.

[3] ASH brief for local authorities on youth vaping, ASH UK, août 2022.

[4] Cox D, E-cigarettes are not part of the solution to a tobacco free Ireland, The Journal, publié le 30 juillet 2022, consulté le 29 août 2022.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 8 septembre 2022