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France : le marché du tabac en recul pour le premier semestre 2022

Selon les chiffres de la Douane, le marché du tabac accuse un certain recul en volume pour le premier semestre de l’année 2022. En raison du moratoire sur la fiscalité sur les produits du tabac, mis en place au début 2021, cette diminution des volumes s’est doublée d’un recul du marché du tabac en valeur.

Catégorie Evolution en volume (par rapport au 1er semestre de 2021) Evolution en valeur (par rapport au 1er semestre de 2021)
Marché global -7,4% -7,6%
Cigarettes -5,6% -6,1%
Tabac à rouler -16,1% -15,7%
Cigares/cigarillos -9,8% -8%

Les chiffres présentés dans le tableau ci-dessus présentent l’évolution du marché du tabac en volume (évolution des livraisons en volume effectuées au premier semestre 2022 par rapport à l’année précédente), et en valeur (évolution du chiffre d’affaires sur le marché du tabac sur la même période). Sur l’ensemble des produits du tabac présentés, tous sont en déclin d’au moins 5%, allant jusqu’à une diminution de plus de 16% pour le tabac à rouler. Cette diminution générale de 7,4% en volume traduit a minima une baisse significative des achats de produits du tabac au sein du réseau des buralistes, sinon une diminution de la consommation par les Français.

Vers une augmentation des prix par l’industrie du tabac ?

Sur son site internet, le Monde du tabac, plateforme d’information associée à la Confédération des buralistes, mentionne : « on notera qu’avec la mise en place du moratoire fiscal, dès le début 2021, les chiffres en valeur ne profitent plus de l’effet hausse des prix »[1]. Autrement dit, l’absence de politique fiscale voulue par Oliver Dussopt, alors ministre délégué chargé des Comptes publics, a traduit la baisse des volumes en une diminution du chiffre d’affaires globale. Dans la perspective d’augmenter le chiffre d’affaires du secteur, les fabricants de tabac pourraient s’engager dans une politique de hausses des prix, leur permettant ainsi d’accroître leur marge bénéficiaire. Toutefois, les hausses de prix, lorsqu’elles sont mises en place par l’industrie du tabac, sont de portée limitée, afin de ne pas entraîner de diminution de la consommation. Les études menées sur l’élasticité-prix soulignent que les hausses de prix ne sont efficaces pour réduire la consommation qu’à la condition d’être significatives et régulières. A l’inverse, les petites hausses tarifaires, compte tenu du caractère hautement addictif des produits du tabac, n’ont pas d’impact sur les niveaux de consommation, et pénalisent ainsi uniquement le pouvoir d’achat des fumeurs, sans bénéfice pour la santé publique. En outre les hausses limitées des prix à l’initiative des fabricants ne permettent pas des rentrées fiscales aussi élevées.

La question de l’évolution du marché parallèle en France

En appui de l’étude KPMG sortie à la fin du mois de juin 2022, l’industrie du tabac souligne que ces diminutions en volume sont seulement le reflet d’un transfert d’une partie de la consommation de tabac en dehors du réseau des buralistes. Selon l’étude publiée par le cabinet de conseil, les achats réalisés hors réseau atteindraient 34,6% de la consommation française, tandis que près d’une cigarette sur trois consommée en France proviendrait de la contrebande ou de la contrefaçon. Ces chiffres sont toutefois vigoureusement contestés par les ONG de lutte contre le tabagisme. En effet, selon la littérature scientifique, le rapport KPMG, exclusivement financé par Philip Morris International, ne peut être considéré comme une source fiable d’information. Le cabinet de conseil est notamment accusé de surévaluer délibérément les marchés parallèles, par le biais d’une méthodologie opaque et biaisée, dans l’objectif de dissuader les pouvoirs publics de mener des politiques de lutte contre le tabagisme, à l’instar d’une politique fiscale sur l’ensemble des produits du tabac. Par ailleurs, l’étude KPMG pointe une augmentation spectaculaire de 600% de la contrefaçon entre 2019 et 2020, et de plus de 30% entre 2020 et 2021. Pour KPMG, plus de 400 millions de paquets de cigarettes consomées en France sont des paquets de contrefaçon.

Dans une note, le Comité national contre le tabagisme affirme que ces chiffres sont peu vraisemblables, car il « impliqueraient l’achat et la consommation de près de 300 millions de paquets par an en France, soit environ 30 paquets par fumeur. De tels niveaux de contrefaçon requerraient des capacités humaines, logistiques et organisationnelles inédites de la part des réseaux parallèles. Par ailleurs, une aussi brusque augmentation induirait une mutation extrêmement rapide des modes de consommation de la part d’une grande partie des fumeurs en France »[2].

Mots-clés : Marché du tabac

©Génération Sans Tabac

FT


[1] Le Monde du tabac, Marché du tabac sur les 6 premiers mois de l’année : -7,4 % en volume, -7,6 % en valeur, 09/07/2022, (consulté le 12/07/2022)

[2] Comité national contre le tabagisme, Lutter contre le commerce illicite de tabac en France, 06/2022

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 13 juillet 2022