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Evaluation des politiques fiscales dans le monde : premiers résultats

Des chercheurs de l’Institute for Health Research and Policy de l’Université de l’Illinois à Chicago ont lancé le 15 décembre la première édition de l’International Cigarette Tax Scorecard lors du 18e webinaire de la Conférence mondiale sur le tabac ou la santé. Cette grille d’évaluation[1] analyse la performance des politiques fiscales des cigarettes dans 174 pays.

À l’aide des données de l’Organisation mondiale de la santé, la grille d’évaluation repose sur quatre critères : le prix en valeur absolue des cigarettes, ajusté en parité de pouvoir d’achat (PPA) pour comparer les prix entre les pays), l’évolution de l’accessibilité financière des cigarettes au fil du temps, la part des taxes dans les prix de détail et le type de taxes. Une note sur 5 est attribuée à chaque pays, la note totale reflétant une moyenne des notes des quatre composantes (5 étant la meilleure note).

Des disparités importantes selon les pays

Seuls quatre pays ont obtenu un score de 4 ou plus, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, avec des scores de 4,63, suivis de l’Équateur et du Royaume-Uni, avec des scores de 4,38.  L’Australie et la Nouvelle-Zélande avec leurs droits élevés² d’accise spécifique, uniformes et qui adoptent des augmentations régulières ont considérablement réduit l’accessibilité des cigarettes. Le paquet de cigarettes en Australie coûtait moyenne à 14,47 $ PPA en 2018, et 16,08 $ en Nouvelle-Zélande.  Les pays où les politiques fiscales sur les cigarettes ont le plus progressé depuis 2014 sont Bahreïn (+3 points), l’Arabie saoudite (+2,75), les Émirats arabes unis (+2,75), le Kirghizistan (+2,50) et les Philippines (+2,50). Ces améliorations reflètent l’introduction de droits d’accise élevés sur les cigarettes et la simplification du mécanisme fiscal applicable aux cigarettes. La France se classe au 13e rang, ex-aequo avec la Bosnie-Herzégovine, la Grèce, la Norvège et la Serbie en Europe avec un score de 3,63.

L’Irak, la Libye et l’Afghanistan ont les scores les plus faibles (entre 0 et 0,25). Ces pays n’ont aucune politique fiscale pour les produits du tabac, ce qui se traduit par des cigarettes très bon marché.  Le score moyen mondial est passé de 1,85 en 2014 à 2,07 en 2018. Cette relative progression cache des disparités de situations : les scores globaux se sont améliorés dans 89 pays mais ils se sont dégradés pour 43 pays.

Des efforts inégaux selon les pays dans la région européenne

La région européenne se classe en tête en matière de politique fiscale des cigarettes. Cependant avec un score de 2,79, l’Europe est seulement un peu au-dessus de la moyenne.  Cette situation ne revêt là encore pas la même réalité. Ainsi la directive de l’Union européenne de 2001 sur la taxation des produits du tabac, qui s’appliquait en 2018 aux 28 membres de l’Union Européenne (y compris le Royaume-Uni) n’a pas eu les mêmes conséquences selon les pays concernés. La fiscalité des produits du tabac relève de la compétence des Etats membres mais l’existence de cette directive a permis de tirer vers le haut des pays où les prix étaient particulièrement bas, en particulier les derniers pays ayant rejoint l’Union Européenne (Bulgarie, Pologne etc.). Pour les autres, cette directive a eu relativement peu de conséquences et se pose aujourd’hui la question de sa révision pour qu’elle soit davantage adaptée.

L’instauration de politiques fiscales efficaces minée par l’industrie du tabac

Malgré des preuves considérables en faveur de l’augmentation des taxes sur le tabac et des orientations établies par les organisations internationales, certains décideurs politiques, en particulier dans les pays à revenu faible et intermédiaire,  ont tardé à adopter ces politiques. Ces retards résultent essentiellement d’une forte opposition de l’industrie du tabac et de ses alliés. Ces derniers affirment que les hausses de taxes entraînent une augmentation du commerce illicite et des pertes d’emplois et qu’elles sont régressives. Ces affirmations sont très exagérées[2] voire inexactes[3]. Néanmoins, ces oppositions ont ralenti ou bloqué la mise en œuvre de politiques fiscales efficaces pour réduire la consommation de tabac. Les hausses significatives de taxes dissuadent en effet les jeunes de commencer à fumer et incitent les fumeurs actuels à réduire ou arrêter leur consommation. Des directives détaillées sur les meilleures pratiques en matière de taxation du tabac ont été élaborées par la Convention-cadre de l’OMS mais également par la Banque Mondiale.

Mots clés : Fiscalité, tabagisme, évaluation

©Génération Sans Tabac


[1] Frank J. Chaloupka, Ph.D., Jeffrey Drope, Ph.D., Erika Siu, and al. Tobacconomics Cigarette Tax Scorecard Country Scores; Tobacconomics, 15 décembre 2020, consulté le 16 décembre 2020

[2] Génération Sans Tabac, L’industrie du tabac derrière la contrebande, 16 mars 2020, consulté le 16 décembre 2020

[3] Génération Sans Tabac, Etude. Les hausses de taxes n’entraînent pas le commerce illicite, 23 octobre 2020, consulté le 16 décembre 2020

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 17 décembre 2020