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Etude. Les hausses de taxes n’entraînent pas le commerce illicite

La hausse répétée et significative des taxes sur le tabac est reconnue comme étant le levier le plus efficace pour faire diminuer la consommation tabagique d’une population. Toutefois, les cigarettiers s’opposent systématiquement à cette politique antitabac, en avançant notamment l’argument selon lequel il conduirait à l’augmentation du commerce illicite. Dans une étude publiée dans la revue Tobacco Control, des chercheurs ont cherché à mesurer le commerce illicite, avant et après les hausses de taxes, dans les pays suivants : Géorgie, Brésil, Afrique du Sud, Colombie, Mongolie, Gambie et Vietnam. L’étude souligne les quatre points suivants :

Les estimations de l’industrie manquent de transparence et de fiabilité

L’étude pointe un écart quasi-systématique et important entre les estimations fournies par les études indépendantes, et celles fournies par l’industrie du tabac, dont les méthodologies restent généralement opaques. En 2016, l’estimation de l’industrie du tabac est six fois plus importante que celle donnée par les études indépendantes menées en Colombie. La raison de la surestimation du commerce illicite est simple : elle permet de dissuader les pouvoirs d’augmenter la pression fiscale sur les produits du tabac.

Le rôle du facteur géographique pas toujours déterminant

Les chercheurs ont montré qu’au Vietnam et en Géorgie, les villes frontalières étaient davantage vulnérables au commerce illicite que les autres. Toutefois, ce constat ne fait pas office de règle, puisque les données récoltées en Mongolie ont montré que le phénomène inverse était observé. En particulier, la province de Bayan-Ölgii, proche de la frontière chinoise et russe, a vu le commerce illicite diminuer après une augmentation des taxes survenue entre 2017 et 2018. Il a été démontré que les paquets de cigarette illicites venaient essentiellement de Corée et d’Ukraine, soit à des distances respectives de 2650 et 5250 kilomètres.

L’impact des augmentations de taxes sur le commerce illicite est résiduel

En janvier 2016, le Vietnam a décidé d’augmenter la taxation sur le paquet de 65 à 70% de son prix à la sortie d’usine. La part de consommation de produits issus du commerce illicite dans la consommation totale est tombée à 14% en 2017, contre 21% en 2012. Selon les chercheurs, les hausses de taxes ne sont pas des facteurs déterminants pour expliquer le commerce illicite. La situation socioprofessionnelle des individus est relativement plus déterminante pour expliquer le phénomène. Cependant, si en Gambie l’achat de produits du commerce illicite est davantage le fait d’hommes plus âgés, riches et célibataires, les fumeurs susceptibles d’acheter ces mêmes produits en Afrique du sud sont issus de milieux défavorisés, avec un faible niveau d’éducation, et au chômage.

La faiblesse de l’administration fiscale comme cause sous-jacente du commerce illicite

Les chercheurs montrent que l’Afrique du Sud a connu une hausse du commerce illicite entre 2009 et 2014, passant de 5 à 17% du marché national, au même moment où les capacités de l’administration à assurer ses missions ont diminué, et où des unités d’enquête sur la contrebande ont été dissoutes. A l’inverse, l’étude souligne qu’en Géorgie, les réformes de l’administration fiscale, la réduction de la corruption et la mise en place de solutions technologiques pour détecter les produits de contrebande ont permis une diminution significative du commerce illicite. Pourtant, le pays a régulièrement augmenté les taxes sur les produits du tabac, en vue de la future intégration de l’Union européenne.

En définitive, l’étude tend à démontrer que les augmentations de taxes sur le tabac ne se sont pas caractérisées par une hausse significative du commerce illicite. Les chercheurs rappellent l’importance pour les pouvoirs publics de suivre les recommandations établies par le Protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac. En particulier, la lutte contre le commerce illicite exige la mise en place d’un système de suivi et de traçabilité indépendant directement et indirectement de l’industrie du tabac.

 

Cette actualité est issue de l’article suivant :

Priscilla Tiigah and Erika Dayle Siu, Tobacco Control, Illicit Tobacco Trade not exacerbated by tobacco tax increases in low & middle income countries, research shows, 15/10/2020, consulté le 21/10/2020

Mots clés : Taxes, Commerce Illicite

©Génération Sans Tabac


Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 23 octobre 2020