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En Afrique du Sud, les cigarettiers s’opposent aux mesures du COVID-19

En Afrique du Sud, la Fair Trade Independant Tobacco Association (FITA) a indiqué avoir déposé un recours en justice dans le but de lever l’interdiction de vendre des cigarettes, disposition exceptionnellement en vigueur dans le pays dans un contexte de confinement[1].

Depuis plusieurs jours, l’industrie du tabac s’est associée à d’autres secteurs, comme les alcooliers, afin de plaider auprès de la présidence pour un assouplissement des règles, jugées inopportunes et irrationnelles par les intéressés[2].

Dans son argumentaire, la FITA va jusqu’à avancer que « la situation actuelle ne peut être endurée plus longtemps par les différents acteurs de la filière tabac, sans aboutir à de graves conséquences pour ces derniers », comme les ouvriers agricoles, les ouvriers d’usine, les commerçants, ainsi que les nombreux Sud-Africains ordinaires […] dont les moyens de subsistance sont actuellement en jeu ».

La compagnie demande ainsi le retrait pur et simple de la mesure, permettant dans le même temps, selon elle, de donner un coup de pouce « bien nécessaire » à l’économie en Afrique du SUd, d’autant que l’interdiction en vigueur alimenterait les réseaux illégaux de contrebande, provoquant un manque à gagner fiscal pour les caisses de l’Etat.

Cet événement est en somme un concentré des pratiques de l’industrie du tabac, décrites par Anna Gilmore, visant à s’ingérer et influencer la prise de décision politique[3]. Ici, la compagnie FITA use de tous les moyens pour revenir sur une décision politique prise par une instance légitime. Anna Gilmore montre à ce titre que l’industrie du tabac n’hésite pas à multiplier les litiges contre les pouvoirs publics, même lorsque ceux-ci sont perdus d’avance, afin de provoquer un « refroidissement réglementaire » auprès des décideurs publics.

Les cigarettiers mobilisent également un argumentaire rigoureusement faux pour appuyer leurs positions, affirmant par exemple que l’industrie du tabac représente une manne financière pour les pouvoirs publics.

Enfin, l’industrie du tabac cherche à décrédibiliser le bien-fondé des politiques publiques qui s’opposent à leurs intérêts : réglementer l’activité des cigarettiers entraînerait des pertes économiques colossales, supportées par des acteurs « méritants » (ouvriers agricoles, petits commerçants, etc.), tandis que les bénéfices seraient inévitablement absorbés par des groupes « non-méritants », ici les trafiquants de tabac. Or les études réalisées dans le prolongement de ces affirmations constantes n’ont jamais confirmé ces allégations.

©Génération Sans Tabac


[1] All Africa, « South Africa: Lockdown – Tobacco Association to Challenge Cigarette Ban in Court », 18 avril 2020

https://allafrica.com/stories/202004190019.html

[2] Times, « Tobacco and alcohol associations demand answers over lockdown bans », 20 avril 2020

https://www.timeslive.co.za/news/south-africa/2020-04-20-tobacco-and-alcohol-associations-demand-answers-over-lockdown-bans/

[3] Anna B. Gilmore, « The Policy Dystopia Model: An Interpretive Analysis of Tobacco Industry Political Activity », 20 septembre 2016

https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.1002125

©Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 27 avril 2020