La revue The Lancet a lancé mardi 28 mars un séminaire pour le lancement de la nouvelle revue sur les déterminants commerciaux de la santé, qui vise à comprendre le rôle des acteurs commerciaux sur la santé publique, et des solutions disponibles pour réduire l’impact négatif que peuvent avoir ces entreprises sur la santé humaine.
Les déterminants commerciaux de la santé sont définis comme les systèmes et les pratiques par lesquels les acteurs commerciaux influencent les niveaux de santé et d’équité au sein d’une population. S’intéresser aux déterminants commerciaux de la santé revient donc à chercher à comprendre les manières protéiformes et complexes que les acteurs commerciaux, par leur activité, peuvent avoir un impact sur la santé publique, et sur l’égalité face à la santé.
Santé publique et logique de profits : l’exemple du Covid-19
Les intérêts de la santé publique et ceux du secteur privé peuvent parfois être concurrents, comme l’a souligné une lettre ouverte signée par plus de 200 personnes dont Ban Ki-moon, l’ancien secrétaire général de l’ONU. En effet, lors de la pandémie de COVID-19, la vente de vaccins, la logique de profit conduisant les sociétés pharmaceutiques à vendre les vaccins et les tests aux plus offrants ont renforcé les inégalités sanitaires entre les populations riches et les populations pauvres, alourdissant le bilan humain de la pandémie d’un million de morts supplémentaires.
Comprendre la situation sanitaire au-delà de la responsabilité individuelle
De la même manière, les industries du tabac, de l’alcool, de l’énergie fossile et de l’alimentation transformée sont à celles seules à l’origine d’au moins un tiers des décès dans le monde. Le développement de maladies non transmissibles, à l’instar du cancer ou du diabète sont en partie imputables à des changements de modes de vie des populations, des évolutions dans la consommation, encouragées par les industries eux-mêmes. Alors que les grandes entreprises et les acteurs privés ont tendance à se placer du seul point de vue de la responsabilité individuelle, la notion de déterminant commerciaux s’attache ainsi à renverser le paradigme, en pointant la responsabilité de ces acteurs. Par exemple, les huit millions de morts provoqués par le tabagisme ne peuvent pas uniquement s’expliquer par des comportements individuels, mais davantage par les stratégies déployées par les fabricants pour encourager la consommation de leurs produits, faisant du tabagisme une épidémie industrielle. Ainsi les pratiques de lobbying ou les stratégies publicitaires entrent dans cette notion de déterminants commerciaux.
Une refondation du modèle économique et des modes de gouvernance
La revue appelle ainsi à repenser le progrès social, l’économie, la structuration du capitalisme contemporain et le rôle des acteurs privés. Cette transformation implique notamment la primeur de l’intérêt général, de la durabilité environnementale, des droits humains, de la santé, ainsi qu’une profonde mutation des modes de gouvernance, y compris chez les acteurs commerciaux, tenus responsables d’objectifs de santé, d’environnement et de développement durable. Le séminaire a rappelé la nécessité de l’implication des gouvernements, des organisations internationales, du monde de la recherche, et de la société civile. Il s’agit ainsi pour les acteurs commerciaux qu’ils de modifier leurs modèles de profit à tout prix, et qu’ils développent de nouveaux modes de financements, de nouveaux business model, respectueux de l’environnement, des besoins fondamentaux de la société et des individus, et soucieux du bon respect des réglementations.
Toutefois, si certaines compagnies peuvent avoir un impact très positif sur la santé, et doivent être associées à ce changement de paradigme, l’industrie du tabac ne peut en faire partie, comme le rappelle l’Organisation mondiale de la santé, qui postule l’existence d’un « conflit fondamental et irréconciliable entre les intérêts de l’industrie du tabac et ceux de la santé publique ».
Mots-clés : Déterminants commerciaux, The Lancet
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