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Des ONG appellent à prendre modèle sur la CCLAT pour l’industrie fossile

Plusieurs ONG environnementales européennes appellent l’Union européenne à traiter l’industrie fossile comme l’industrie du tabac, en restreignant fortement les interactions entre les compagnies et les décideurs politiques. Cet appel démontre que la lutte mondiale contre le tabagisme, notamment à travers la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, revêt un caractère avant-gardiste dans le contrôle et la réglementation des industries dites « controversées ».

Quatre ONG environnementales, dont les Amis de la Terre Europe et le Corporate Europe Agency, ont révélé que les six grandes compagnies du pétrole et du gaz, ainsi que cinq groupes d’influence qui leur sont associés, ont déployé un vaste lobbying auprès de la Commission européenne depuis l’accord de Paris sur le climat en 2015. Or, la Commission européenne ayant pour attribution de proposer et de mettre en œuvre les politiques communautaires, c’est elle qui est en charge de mettre sur pied la législation européenne sur l’énergie et le climat[1].

La proximité des lobbyistes de l’énergie fossile avec les décideurs européens

L’étude menée par les ONG souligne que 71 anciens ministres et hauts fonctionnaires travaillent désormais pour ces six compagnies pétrolières et gazières, permettant notamment aux industriels de bénéficier d’un carnet d’adresses précieux pour gagner en influence auprès des décideurs actuellement en place. Par ailleurs, depuis 2015, les chercheurs ont montré que ces entreprises ont obtenu 568 réunions avec des hauts responsables de la Commission européenne, et ont dépensé en six ans plus de 170 millions d’euros en lobbying pour l’Union européenne. Pour les responsables des organismes de défense de l’environnement, la porosité entre décideurs publics et le secteur du gaz et du pétrole est une menace directe pour la mise en place de réglementations contraignantes et efficaces, visant notamment à limiter l’impact du bouleversement climatique.

La CCLAT, un modèle de réglementation pour réduire l’influence du secteur des énergies fossiles

Selon Myriam Douo, responsable de campagne aux Amis de la Terre, la plupart des interactions entre les décideurs politiques et les lobbyistes ne devraient pas être autorisées[2]. L’organisation appelle ainsi les responsables à s’inspirer de l’existant, en particulier de la Convention-cadre de l’Organisation Mondiale de la Santé pour la lutte antitabac (CCLAT). En effet, ce traité impose aux Parties de limiter ces interactions au strict nécessaire, permettant de réduire en partie l’influence de l’industrie du tabac, et de participer à la dénormalisation d’une industrie responsable de huit millions de morts chaque année. Toutefois, si des progrès ont pu être obtenus grâce à la CCLAT, les institutions de l’Union européenne sont la cible d’un intense effort de lobbying de la part de l’industrie du tabac.

L’expertise utile de la lutte antitabac pour réglementer certains secteurs

L’appel des organisations à s’inspirer de la CCLAT rappelle que l’industrie du tabac a été un acteur précurseur dans la pensée et la mise en place de pratiques de désinformation et de lobbying contraires à l’intérêt général, ensuite reprises par plusieurs industries dites « controversées », comme les industries fossiles, alcoolières voire agroalimentaires.. En corollaire, les acteurs de la lutte antitabac ont ainsi développé une expertise et des outils réglementaires transposables au contrôle d’autres secteurs possiblement dangereux pour l’atteinte d’objectifs de développement durable, comme la santé ou l’environnement.

Mots clés : CCLAT, lobbying, ONG

©Génération Sans Tabac

FT


[1] Corporate Europe, Stop the revolving door: fossil fuel policy influencers, 25/10/2021, (consulté le jour même)

[2] The Guardian, Shun fossil fuel firms by treating them like tobacco industry, EU urged, 25/10/2021, (consulté le jour même)

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 26 octobre 2021