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Commerce illicite : le renouvellement des accords de coopération entre l’UE et un cigarettier en question

Smoke Free Partnership, une coalition d’ONG européennes de lutte contre le tabagisme appelle la Commission à s’opposer au renouvellement de l’accord de coopération sur le commerce illicite qui lie l’Union européenne au fabricant Japan Tobacco International (JTI). L’accord, conclu en 2007, expirera en décembre 2022.

En 2007, trois ans après une procédure similaire avec Philip Morris International, Japan Tobacco International a conclu un accord exécutoire pour éviter des poursuites de la part de l’Union européenne en raison de son implication dans le commerce illicite de ses propres produits. Dans cet accord, prévu pour quinze ans, le fabricant s’engageait à mettre en place une série de mesures de lutte contre la contrebande de cigarettes. La signature de cet accord engageait par ailleurs Japan Tobacco International à verser 400 millions de dollars pour des initiatives de lutte contre la contrebande et la contrefaçon.

L’implication de Japan Tobacco International dans le commerce illicite mondial

SFP appelle Johannes Hahn, le Commissaire européen au budget et à l’information, à s’opposer au renouvellement de cet accord pour plusieurs raisons. D’abord, la coalition souligne que cet accord permet au fabricant de se présenter comme un acteur crédible de lutte contre le commerce illicite des produits du tabac, alors même que cet accord a précisément été signé en raison de l’implication du cigarettier dans la contrebande.

Par ailleurs, SFP rappelle que JTI semble avoir poursuivi ses activités de contrebande en dépit de l’accord conclu avec l’Union européenne. En effet, en 2011, un réseau international de journalistes d’investigation, l’OCCRP, montrait notamment que des employés et distributeurs de JTI travaillaient directement avec des contrebandiers. Les ordinateurs des personnes ayant enquêté sur ces activités du fabricant ont par ailleurs été piratés par une société payée 300 000 dollars par JTI. Le PDG de Japan Tobacco en Russie avait par ailleurs déclaré que ces activités illégales ne le préoccupaient pas, dans la mesure où les bénéfices engrangés par la violation de la loi étaient supérieurs aux sanctions encourues par le fabricant.

Des accords incompatibles avec la Convention-cadre de l’OMS

Par ailleurs, la SFP souligne que cet accord de coopération est incompatible avec les directives d’application de l’article 5.3 de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, ratifiée par l’Union européenne. Ainsi, ces directives d’applications stipulent que « l’industrie du tabac ne devrait être partenaire d’aucune initiative liée à l’élaboration ou à l’application de politiques de santé publique, étant donné que ses intérêts sont en contradiction directe avec les objectifs de la santé publique ».

L’exigence d’une lutte indépendante contre le commerce illicite des produits du tabac

Cet accord apparaît d’ailleurs d’autant plus caduc au regard de l’évolution du cadre juridique. Depuis 2007, l’Union européenne a notamment ratifié le Protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac, qui exige la mise en place d’un système de suivi et de traçabilité rigoureusement indépendant de l’industrie du tabac. Cette exigence de stricte indépendance n’est par ailleurs pas respectée par la directive européenne sur les produits du tabac de 2014, qui permet à l’industrie du tabac de choisir elle-même les entreprises destinées à recueillir les données sur le stockage et les mouvements des produits du tabac, mais également de choisir les auditeurs externes mandatés pour les contrôler (articles 15 et 16).

Des accords inefficaces pour réduire le commerce illicite

Au-delà de la question juridique, SFP avance également le caractère inefficace de tels accords. Philip Morris International, qui avait signé avec l’Union européenne ces mêmes accords de coopération en 2004 pour une durée de 12 ans, n’avaient pas été renouvelés en 2016. Parmi les raisons du non-renouvellement était pointée l’absence de causalité directe entre l’accord de coopération et la baisse du nombre de produits du tabac illicites émanant des usines de Philip Morris International.

Mots-clés : Japan Tobacco International, Contrebande, Commerce Illicite, Union européenne, Commission européenne

©Génération Sans Tabac

FT


Comité national contre le tabagisme |

Publié le 30 novembre 2022