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Canada, vaccin et Covid. L’opération de relations publiques à 84 millions d’euros de Philip Morris

Au Canada, l’Organisation non gouvernementale Corporate Accountability[1] a écrit une lettre ouverte au Premier ministre Justin Trudeau, pour mettre fin à un financement gouvernemental de l’entreprise Medigo, en raison de l’existence d’importants conflits d’intérêt avec Philip Morris International (PMI)[2]

Le 23 octobre, Justin Trudeau annonçait en effet un investissement massif pouvant atteindre 130 millions de dollars canadiens (84 millions d’euros) dans Medicago, basé à Québec, afin de développer un vaccin contre la COVID-19. Cependant, Philip Morris détient aujourd’hui un tiers des fonds propres de l’entreprise, et participe au financement du développement du vaccin.

Un accord en infraction avec les obligations internationales du Canada

Cet accord gouvernemental est une infraction aux obligations légales de l’Etat canadien. Ce dernier, Partie de la Convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac (CCLAT), interdit aux gouvernements de s’associer aux stratégies RSE[3] de l’industrie du tabac, ou encore d’investir dans les entreprises qui lui sont affiliées.  Enfin, la CCLAT proscrit toute forme de publicité directe ou indirecte en faveur du tabac et de son industrie. Si le communiqué de presse gouvernemental ne mentionne pas la relation partenariale avec le géant du tabac, celui de PMI insiste sur les bénéfices d’un tel rapprochement. Selon André Calantzopoulos, PDG de PMI : « de meilleurs résultats peuvent être obtenus lorsque les gouvernements et les entreprises unissent leurs efforts pour promouvoir des objectifs communs pour le bien commun ».

Les signataires de cette lettre ouverte voient dans cette collaboration l’« une des stratégies de relations publiques les plus réussies » par l’industrie du tabac. La participation du cigarettier dans le développement d’un vaccin contre la Covid-19 est en effet une opération de blanchiment moral, dont l’objectif est double.

Cette opération vise d’abord à légitimer l’industrie comme un acteur responsable, et comme un interlocuteur crédible auprès des pouvoirs publics. En d’autres termes, les cigarettiers cherchent à revenir sur le texte de la CCLAT, qui limite les interactions entre gouvernement et industrie au strict nécessaire.  Enfin, il s’agit pour l’industrie de faire oublier son propre bilan sanitaire, avec 8 millions de morts par an, dont 47 000 au Canada. Ces chiffres sont d’autant plus embarrassants pour l’industrie du tabac que cette dernière cherche désormais, à travers ses nouveaux produits, à se faire passer pour un acteur engagé en santé publique. En particulier, Philip Morris instrumentalise la notion de « réduction des risques » comme argument commercial pour son tabac chauffé, alors qu’aucune étude indépendante ne va dans le sens d’une moindre nocivité de ces produits.

Lutte contre l’ingérence de l’industrie du tabac : quelques recommandations

Pour faire face à cette situation, la lettre ouverte développe un certain nombre de recommandations pour le gouvernement canadien, en particulier :

  • Rejeter l’accord Medicago en vertu des obligations de la CCLAT
  • Annuler l’accord et réinvestir les fonds dans le développement de vaccins qui ne sont pas parrainés ou financés par les compagnies de tabac.
  • Mettre pleinement en œuvre l’article 5.3 de la CCLAT afin d’éviter de futures relations partenariales entre les pouvoirs publics et l’industrie du tabac et ses alliés.

Mots clés : Vaccin, Canada, Covid

©Génération Sans Tabac


[1] Responsabilité Sociale

[2] Organizational sign on letter: Urge Canadian government to terminate conflictual agreement with Medicago, Corporate Accountability, (consulté le 23/11/2020)

[3] Responsabilité Sociale des Entreprises

Comité National Contre le Tabagisme |

Publié le 23 novembre 2020