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Au Québec, des magasins de vapotage se dotent de confiseries pour attirer les mineurs

Au moins deux chaînes de magasins de cigarettes électroniques ont modifié leur objet commercial en ajoutant un rayon confiserie, afin d’être autorisées à accueillir des mineurs. La Coalition québécoise pour le contrôle du tabac a formulé une plainte auprès du ministère de la Santé et plaide pour une interdiction des arômes dans les produits de la nicotine.

L’accès des mineurs aux magasins spécialisés dans la vente de cigarettes électroniques est interdit au Québec. Pour contourner cette réglementation, au moins deux chaînes de ce type de magasins ont ajouté à leur offre des rayons de confiseries leur permettant d’être considérés comme des épiceries ordinaires, et par là même d’accueillir des mineurs.

Après avoir observé ce phénomène durant plusieurs mois, la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac (CQCT) a adressé au ministre de la Santé et des Services sociaux une plainte documentée sur la situation[1]. Pour y remédier, la Coalition demande à mettre en œuvre une interdiction des arômes pour tous les produits de la nicotine, qu’elle a déjà plusieurs fois appelée de ses vœux.

Une transformation qui suit une décision de justice défavorable

Le constat dressé par la Coalition met en cause les chaînes de magasins Vapetown et Eurovap, qui furent durant plusieurs années spécialisées dans les cigarettes électroniques et les produits de vapotage. Depuis le début de 2022, ces deux enseignes ont intégré dans leurs rayons des confiseries et des friandises très variées, valorisant notamment les saveurs exotiques. Le site Internet d’Eurovap, qui ne présentait que des produits du vapotage en 2021, n’affiche à présent que des produits sucrés et de grignotage, tout en mentionnant que ses franchises vendent aussi bien des produits de vapotage que des produits de grignotage exotiques. De son côté, Vapetown a développé l’enseigne Munchiz, un spécialiste des sucreries qui vend également des produits de vapotage. Deux autres magasins spécialisés indépendants ont par ailleurs été mis en cause dans le même constat.

Ce subterfuge semble très clairement destiné à attirer les mineurs, à qui la fréquentation des magasins de vapotage est interdite. Les magasins de vapotage échapperaient à cette interdiction en se présentant comme de simples magasins de vente au détail, mais n’auraient dans ce cas pas le droit d’exposer leurs produits de vapotage. De nombreuses infractions à la visibilité des produits de vapotage ont cependant été constatées. « Il y aurait plus de bénéfices pécuniers à exposer des jeunes à l’offre de produits de vapotage et au marketing de saveurs qui les entourent, qu’à se contenter de servir une clientèle de vapoteurs adultes » précise Flory Doucas, porte-parole de la Coalition québécoise, qui voit surtout un calcul commercial dans cette transformation des magasins[2]. Elle souligne également que cette mutation a été observée dans le prolongement d’une décision de justice en défaveur de l’industrie du vapotage, en novembre 2021, au sujet de la loi encadrant les magasins de vapotage.

Des arômes déjà interdits ou restreints dans le reste du Canada

« Ce qu’il faut prioriser, comme çela a été fait pour le tabac, c’est la réduction de l’attrait de ces produits de manière à contrer le désir des jeunes de les consommer », poursuit Flory Ducas, en expliquant pourquoi l’enjeu des arômes est si déterminant. Une étude scandinave pointe ainsi que les arômes sucrés ont la préférence des nouveaux utilisateurs, et que les arômes fruités suggèrent une moindre nocivité que les arômes aux saveurs de tabac[3]. Bien que le gouvernement se soit prononcé dès novembre 2019 en faveur d’un meilleur encadrement des arômes[4], peu de choses ont avancé depuis au Québec.

D’autres provinces canadiennes, comme la Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-Brunswick, l’Île-du-Prince-Edouard et les Territoires du Nord-Ouest, ont pourtant déjà acté l’interdiction des arômes pour les cigarettes électroniques, ainsi qu’elles l’avaient fait pour les produits du tabac[5]. Ces interdictions ont depuis été confirmées par les tribunaux, suite aux actions de justice intentées par les industriels. L’allégation de ces derniers selon laquelle l’interdiction des arômes s’accompagnerait d’une reprise du tabagisme ne s’est pas vérifiée. En Ontario, en Colombie-Britannique et dans le Saskatchewan, la vente des produits du vapotage est strictement circonscrite aux magasins spécialisés.

Vers une meilleure régulation des produits de vapotage

Au-delà de l’interdiction des arômes, la Coalition québécoise préconise plusieurs autres mesures, telles que la limitation du taux de nicotine à 20 mg/ml, la fixation d’un volume maximum pour les flacons et les cartouches de liquides, l’adoption de paquet neutres pour les emballages du matériel et des e-liquides, l’apposition d’avertissements sanitaires, l’interdiction des dispositifs « intelligents » qui transmettent des données au fabricant, l’instauration d’un permis tarifé de vente, de distribution et d’importation, et une restriction des noms donnés aux magasins spécialisés afin d’en limiter l’attrait. Au Québec comme ailleurs, la régulation des magasins et des produits de vapotage reste donc encore en chantier. La Coalition rappelle qu’au Canada, aucun fabricant de produits de vapotage n’a cherché à faire homologuer ses produits en tant qu’aide thérapeutique à l’arrêt du tabac auprès de Santé Canada.

Mots-clés : Québec, Canada, CQCT, confiserie, arômes, vapotage, mineurs

©Génération Sans Tabac

MF


[1] CQCT, Évolution du marché démontrant la nécessité d’interdire les saveurs, plainte auprès du Ministre de la Santé et des Services Sociaux, 20 février 2023.

[2] Drapeau-Bordage A, Des boutiques de vapotage se déguisent en confiseries, Métro, publié le 21 février 2023, consulté le 22 février 2023.

[3] Nordic Welfare Center, The significance of flavour additives in the use of moist snuff and e-cigarettes, Janvier 2019, 28 p.

[4] Ministère de la Santé et des Services sociaux, Lutte contre le tabagisme et pratique du vapotage – La ministre Danielle McCann mandate le directeur national de santé publique pour qu’il lui propose de nouvelles mesures d’ici avril, publié le 25 novembre 2019, consulté le 22 février 2023.

[5] Rowe D, Vape stores selling candy to entice teens: Quebec anti-tobacco coalition, CTV News Montréal, publié le 21 février 2023, consulté le 22 février 2023.

Comité national contre le tabagisme |

Publié le 24 février 2023